Dans Les anciens Canadiens (1863) et ses Mémoires (1866), Philippe Aubert de Gaspé évoque le monde du régime seigneurial. Étant lui-même le dernier seigneur de Saint-Jean-Port-Joli, il déplore l’abolition de ce régime et voudra dans ses écrits établir « la défense et l’illustration » de cette institution que les « démocrates », comme il les surnomme, ont vilipendée. L’écrivain poursuit aussi un deuxième but, de nature plus politique. Les anciens Canadiens et les Mémoires donnent à entendre que le moyen pour les Canadiens de survivre à la suite de la débâcle que fut la Conquête consiste à accepter le nouvel ordre politique et de se fondre dans la nouvelle entité britannique. L’œuvre en est une d’affabulation compensatoire qui par effet de style propose une vision d'une société canadienne-française basée sur un régime seigneurial idéalisé et des accommodements avec le gouvernement britannique, mais qui menace d'être balayée par le réveil des « va-nu-pieds » démocrates.