JUDITH C PERRON
Il est une activité théâtrale importante dont on ne parle presque plus aujourd'hui en Acadie. Le théâtre de collège a en effet connu un moment de gloire certain, et son succès a fait naître une première génération de dramaturges acadiens. Cependant, vu son mode de production et sa nature pragmatique particulière, on s'étonne peu que ce théâtre ne revête pas l'importance historique qu'on accorde généralement àl'apparition d'un nouveau genre dans la littérature d'une nation.
College theatre is one historic form of theatrical activity that is rarely mentioned these days in French-speaking Acadia. Yet its profile was once elevated, and indeed its early success gave rise to a first generation of Acadian playwrights. The very nature of college theatre, with its highly specific parameters of composition and production, appears to explain the lack of historical importance which is otherwise generally ascribed to the appearance of a new genre in a nation's literary history.
En Acadie, comme ailleurs sans doute, le théâtre a connu plusieurs naissances et plusieurs fins avant de s'inscrire définitivement dans l'histoire culturelle et littéraire. Avant de parler de tradition théâtrale, de théâtre national ou de continuité, les praticiens et les critiques de théâtre parlent plutôt de l'activité théâtrale comme d'un outil. Les auteurs qui signent les articles publiés dans les journaux au début du XXe siècle insistent sur le penchant didactique de l'activité théâtrale, c'est-à-dire la sensibilisation de l'opinion au concept de patriotisme acadien. Et, dans les années 1970, les critiques parlent de la jeune dramaturgie comme d'un élément d'affirmation et de contestation permettant à une nouvelle génération d'artistes et d'intellectuels soit de manifester à leur tour leur conscience politique et sociale, soit de mettre en évidence les éléments caractéristiques de l'acadianité.1 Comme le pense Zénon Chiasson, 2il existe toujours une hésitation aujourd'hui que trahit le théâtre représenté, « une ambiguïté entre la couleur locale et l'aspiration à l'universel » qui prouve en quelque sorte que la « théâtralité pure » n'est pas encore au programme et que le théâtre qu'on présente veut toujours, dans son essence, dire quelque chose.
Le théâtre qu'on crée et qu'on monte dans les collèges au tournant du XXe siècle est un exemple de théâtre-instrument. La mise en scène des pièces, même des créations, vise l'exercice pédagogique et la formation des étudiants des collèges à l'élocution et à l'art oratoire. Cependant, le caractère pragmatique3 des textes en tant que tels retient davantage l'attention, ceux-ci aboutissant toujours à une leçon d'histoire et de patriotisme, à une reprise du discours social dominant, de même que des mythes longtemps véhiculés par les textes et les discours précédents. Non seulement la structure argumentative des pièces peut-elle nous montrer ce souci d'accorder une fonction didactique au théâtre, mais le discours, critique si l'on peut dire, qui suit montre à quel point cette fonction du théâtre est ancrée dans l'horizon d'attente des spectateurs particuliers à ce théâtre. L'importance donnée au mode de production des premières pièces témoigne à son tour de l'enjeu pragmatique de cette dramaturgie.
Au début du XXe siècle, et même avant, on commence à se préoccuper de faire revire l'histoire des Acadiens sur tous les plans de la vie culturelle. Dès la première grande Convention nationale des Acadiens en 1881, les délégués représentant les diverses régions encouragent tous les Acadiens à se remémorer les misères et la victoire des ancêtres qui ont réussi à repeupler le soi acadien. Les journaux de l'époque publient maints récits et articles qui évoquent les péripéties de l'exode des Acadiens, ou encore qui traitent des qualités de l'Acadien, principalement en termes religieux et patriotiques. Les Acadiens se choisissent une fête nationale, un saint patron et un drapeau, pour s'affirmer comme peuple distinct, mais aussi pour que se grave dans la mémoire collective l'histoire particulière d'un peuple vainqueur. Il s'agira donc de cela précisément dans les premières créations acadiennes montées dans les collèges à la première moitié du XXe siècle.
Au contraire d'autres genres comme le roman, le théâtre a besoin, pour occuper les fonctions qu'on lui accorde, d'infrastructures bien définies. L'institution collégiale en Acadie offre le cadre nécessaire au genre de théâtre qu'on présente à l'époque. Les pièces, écrites par les membres du clergé, dont le corps professoral est exclusivement constitué, sont également jouées par les étudiants, mises en scène par les professeurs, et présentées à l'intérieur des murs du collège à quelques exceptions près. Le collège devient donc un appareil dramaturgique en lui-même qui fournit les créateurs et leur procure instantanément les acteurs, la salle, les metteurs en scène et, finalement, le public. Théâtre par et pour un milieu clos qui ne donne droit de cité qu'à la fraction intellectuelle et religieuse de la communauté acadienne. Ici, le fossé séparant l'institutionnel du populaire semble être des plus prononcés. En 1896, «Un Spectateur» précise que «depuis six ans nous avions assurément bien des fois déjà généreusement applaudi les artistes de la jeune institution qui à maintes reprises nous ont procuré de si agréables soirées» et qu'il n'est pas donné à tous de «gravir les sentiers escarpes qui conduisent sur ces sommets élevés de l'Idéal et du Beau, où les bruits mesquins de la terre n'arrivent point; il est permis à quelques âmes privilégiées-don du ciel et de Dieu-de pouvoir sonder les mystères de l'indicible harmonie qu'on y entend».4 Plus tard, en 1929, la Société Historique et Littéraire Acadienne déplore l'inaccessibilité de ces activités. «Déjà, écrit-on, le théâtre acadien possède quelques pièces, mais sans vouloir diminuer le moins du monde ces heureuses initiatives, il semblerait que ces pièces n'ont pas assez de vie pour intéresser un grand public ordinaire ».5
En plus d'occuper une fonction précise, le théâtre a aussi besoin des infrastructures pour survivre, au contraire du roman, toujours, qui survit par lui-même, par le livre. Or, la disparition de l'institution collégiale confessionnelle aura incontestablement une influence sur la perennité du théâtre au début du siècle.
En dépit de la nature hermétique de ce théâtre, il y a bien une communication souhaitée entre la scène et la salle. En relisant les pièces, on constate tout d'abord que l'horizon d'attente des spectateurs est satisfait, les Acadiens étant habitués à entendre, à lire ou à voir la représentation officielle qu'on fait d'eux en termes de peuple courageux, fidèle à la foi catholique, aux moeurs pures, trouvant son salut dans la souffrance expiatrice des péchés. La valorisation du passé et de la misère des ancêtres est sans cesse rappelée dans les pièces qu'on créait. Dans Subercase, créée en 1902, racontant la dernière bataille qui a fait des Anglais les gouverneurs de l'Acadie, un vieillard acadien reproche à un jeune soldat sans identité ce qui lui paraît être de la lâcheté:
Quoi ne craindrais-tu pas de voir nos fiers ancêtres Eux qui ne se courbaient qu'à la voix de leurs prêtres Sortir de leurs tombeaux, venir te reprocher La peur que selon moi tu ne sais plus cacher? 6
Ce genre de discours se perpétuera en rassurant les jeunes spectateurs et en les formant à l'image des plus vieux jusqu'à la création, en 1929, de L'Émigrant acadien qui, bien que présentée au public général, ne s'adresse pas moins aux fidèles et aux patriotes de la paroisse. On y évoque le problème du mouvement migratoire vers les États-Unis et ses effets sur le peuple acadien, sur sa vertu. La première est montée dans un couvent, et la tournée qui suit est prise en charge par les religieux et les religieuses des différentes régions. Dans l'extrait suivant, la voix du père témoigne de l'amour de la patrie de toute une génération aux prises avec une modernité qui tentera, en vain, de s'afficher:
Pourquoi regretter l'Acadie, dites-vous? Oh, mes enfants, vous êtes jeunes vous autres, et ne comprenez pas tous les liens qui rattachent vos pères à ce sol béni des ancêtres. [ .... ] L'Acadie pour nous les vieux, c'est l'humble coin de terre où nous sommes nés, où mes ancêtres dorment, où nous espérons vous voir vivre un jour.7
L'ensemble de l'argumentation fonctionne donc selon le principe de la prolepse où chaque argument visant à contrecarrer le discours accepté est vite repoussé, laissant la place à celui qui correspond à l'horizon d'attente des spectateurs visés de sortir gagnant.
Bénédict, personnage du Drame du peuple acadien, dira à son tour:
L'homme est injuste, soit! mais le Bon Dieu ne l'est pas et finalement la justice triomphera [ ... ] si nous avons à faire notre chemin de croix, confiance, Basile, nous aurons notre Dimanche de Pâques.8
Et le Philippe Mailloux de James Branch s'écriera, dans Vivent nos écoles catholiques:
Si nous mourrons parce que l'on nous attaque injustement, notre cause deviendra sacrée aux yeux de nos enfants et d'autres prendront notre place [ ... ]. Quand on meurt pour le bien de son pays et de l'Église, on peut partir sans regret et sans crainte.9
L'argumentation est donc assumée par l'auteur et correspond au discours enthymémique d'Albert Halsall, c'est-à-dire un discours présentant des «arguments narratifs qui se basent sur des maximes idéologiques présupposées et jamais discutées».10
Le discours critique qui suit la représentation de ces pièces est relativement abondant. Dans les pages du journal L'Évangéline, l'appréciation de ce théâtre paraît soit dans les chroniques des paroisses ou celles des événements à surveiller, soit dans des comptes rendus exclusifs. Néanmoins, l'homogénéité des propos est remarquable. Des représentations on retient leur caractère didactique, on s'identifie aux personnages et aux situations pour ce qu'ils représentent dans l'imaginaire collectif, mais aussi parce qu'ils correspondent au contexte social et politique des spectateurs. Même si le temps de fiction des pièces remonte souvent à deux siècles, le passé est repensé et réécrit en fonction du présent. Pascal Poirier, entre autres, soulignera l'actualisation de l'histoire sur la scène. «Certains vers particulièrement bien frappés, écrit-il au sujet de Subercase, s'appliquent autant à la situation présente des Acadiens qu'à celle de leurs aïeux de 1710. L'ennemi a changé de nom, voilà toute la différence».11 La fonction de communication sociale du texte est également perçue par le spectateur qui affirme, après la première du Drama du peuple acadien, que «bien des résolutions ont été prises [d']imiter [les Acadiens de la Déportation] dans leur attachement à leur langue et à leur foi [ ... ] les assistants sont sortis heureux et fiers d'être Acadiens, plus décidés que jamais à le rester toujours».12
Par ailleurs, les critiques seront encore plus loquaces lorsque viendra le temps de traiter du mode de production des pièces qui, semble-t-il, est inséparable du contenu. On notera la présence de personnes éminentes, de personnalités religieuses, présence qui souvent revêt une importance pareille à celle du spectacle lui-même:
Soudain le R.P. Supérieur fait son entrée salué par les joyeuses harmonies de la fanfare qui a toujours pour directuer le R.P. Conan [ ... ] Quand j'ai vule R.P. Supérieur se lever pour se faire notre interprète à tous, je me suis senti heureux au-delà de toute expression.13
On félicitera également les responsables de la production pour leur travail d'éducateurs, en utilisant souvent le ton et les propos entendus sur la scène. Sur les personnages du Drame on écrira, par exemple: « Rien ne lasse leur patience: leur foi grandit avec les épreuves », et on parlera du travail des producteurs du même souffle: « Que de travaux, de veilles, de fatigues, de patience il a fallu à l'un et à l'autre pour mener à bien cette belle entreprise ».14 Et si on fait remarquer la « merveilleuse leçon » apprise des personnages et des situations, on profite également de l'occasion pour témoigner de patriotisme à son tour, tout en faisant écho au discours conatif de la pièce: « Montrons notre gratitude et n'envoyons pas nos enfants dans des institutions étrangères tandis que nous avons les moyens de les faire instruire à notre porte ».15
La communication est, sans aucun doute, bien établie et le message social est transmis pour faire agir et réagir le spectateur à qui s'adresse le théâtre. On voit aussi que le contexte hors-scène, c'est-à-dire tout ce qui relève de la salle, des spectateurs et des préparatifs est intégré par les critiques dans ce courant de communication. « La grande cour de l'église, dira-t-on au sujet de la représentation de Vivent nos écoles catholiques!, ne pouvait contenir tous les autos [ ... ] les hommes firent appel à la bonne volonté des jeunes gens et tous allèrent dégarnir les maisons voisines pour trouver des chaises! »16
D'une part, le succès de la pièce dépend de deux facteurs précis: le nombre de spectateurs et la leçon apprise des situations et du discours mis en scène selon le mode de la vraisemblance. «A Paquetville, nous jouons des pièces acadiennes que les Acadiens peuvent comprendre et que les Acadiens aiment: et voilà pourquoi nous avons toujours une foule».17Les Acadiens avaient-ils un sens aigu du «théâtral»? On serait tenté de répondre par l'affirmative, même si, ou peut-être parce que, les pièces montées relèvent moins de la fiction que d'un monde historicisé, du vécu des ancêtres, mis à la disposition de tous dans le but d'instruire. D'autre part, l'oeuvre est réussie lorsque la théâtralisation qui est faite du moi collectif fonctionne comme miroir embellissant de la société.
Evidemment, on peut lire ou entendre le discours contenu dans ces pièces dans les romans publiés à l'époque aussi, dans les récits que fait paraître L'Évangéline, ou dans les sermons à l'église. Cependant la scène semble être valorisée dans la mesure où elle s'adresse à un «public choisi», les fidèles et les collégiens, parce qu'elle permet la présence dans un rassemblement de nature artistique de membres influents du clergé dont les paro es représentent «la fermeté proverbiale du peuple acadien [. . .], une leçon de plus pour les jeunes acteurs et l'auditoire en entier», 18 et aussi parce que le théâtre présente «aux yeux des spectateurs une tranche de vie, c'est-à-dire du réel, de l'humain, du vécu».19 Il s'agit, précise cet auteur, d'une «puissance fascinatrice», «originale et éminemment efficace». Ainsi, tous les facteurs qui préparent la réception du spectatuer font en sorte que celui-ci reçoit ce théâtre mi-fictif, mi-réel sans être bousculé par des idées qu'il ne serait pas prêt à entendre. Au premier abord, il semble que l'expérience esthétique du spectateur soit à son apogée lorsque les situations, les personnages et les arguments présentés sur scène lui paraissent vraisemblables et authenthiques. Et même s'il y a quelques éléments de nouveauté, comme l'usage du décor «pose plastique» dans la mise en scène (usage du support visuel), on le note comme représentation de ce qui se déroule sur scène, et on l'apprécie pour son réalisme. On peut par ailleurs parler de plaisir esthétique puisque les spectateurs s'engagent tous émotionnellement et intellectuellement dans ce genre de théâtre. Ce plaisir relève de la catharsis bien sûr, au sens brechtien, mais plus encore du plaisir de la mémoire et du plaisir de comprendre. Le plaisir esthétique, dans le sens de philosophie du beau, est donc vécu par rapport au discours, aux grandes vérités déclamées et en accord avec l'idéologie officielle de l'époque. « Qu'ils sont beaux, ces vrais chrétiens refusant à l'oppresseur un serment que leur catholicisme condamne et comme on applaudit avec admiration leur force d'âme et leur générosité en face du devoir». 20
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Etant donné le succès de ces pièces pendant la première moitié du XXe siècle, on peut être surpris par le fait qu'il n'en est resté que très peu de traces, bien que, à l'époque, on ait cru qu'elles feraient leur marque dans l'histoire et la littérature acadiennes, autrement dit, qu'elles prendraient la forme de classiques. Or, il n'en est rien. Seuls les tableaux rendant compte de l'activité théâtrale acadienne au cours des années font mention de ce théâtre, et ce de façon plutôt restreinte. Sur Subercase, par exemple, on dira aujourd'hui que l'auteur «a su faire vibrer les fibres endolories de ce peuple blessé résolument tourné vers le passé, vers la France; il évoque un patriotisme suranné ressenti par cette société fermée» 21 On dira aussi, en parlant du Drame qui a été couronné par l'Académie française: « Quel honneur pour l'auteur et surtout pour l'Acadie ». 22 On écrira également que cette pièce prenait à l'époque des allures de « super-spectacle » 23 ou encore on mettra l'accent sur l'objectif didactique que la pièce se proposait d'atteindre, soit « de rappeler aux jeunes les vertus de leurs ancêtres ».24 Mais on parlera surtout de façon générale de ce théâtre en disant qu'il s'agit d'«un théâtre socio-moralisateur [ . . . ] qui essaie de toucher le peuple acadien, le réveiller et le sortir de sa torpeur», 25 que ce sont des pièces «genre mélodrame», et que les auteurs étaient «davantage poussés par le souci de donner sur la scène une leçon d'histoire, de morale ou de patriotisme que par l'ambition de faire oeuvre littéraire». 25
On traite donc très peu de ces pièces, et le caractère très détaché des commentaires souligne le fait que ces oeuvres ne touchent plus le lecteur contemporain. On ne les monte plus, on ne les adapte pas, même si la tendance, au Québec par exemple, est d'adapter les anciens, de les tradapter même, depuis 1960 au moins. Peut-être remet-on en question la valeur littéraire de ces premiers textes. Le théâtre didactique n'est plus de mise, ni les discours moralisateurs, et il est peut-être même devenu risqué de parler explicitement de nationalisme acadien en utilisant un medium artistique. Et comme le théâtre jusqu'à maintenant a toujours voulu dire quelque chose, le théâtre des collèges arbore aujourd'hui une aura passéiste vers laquelle on ne tend plus.
Quoi qu'il en soit, ce théâtre ne semble avoir aucune influence sur la dramaturgie actuelle. Même si le théâtre d'aujourd'hui reprend certains thèmes des pièces examinées, comme celui de la déportation ou de la foi chrétienne, c'est surtout pour en révéler les tabous, les interdits devenus acceptables.2727 De plus, aucune des pièces du début du siècle n'est citée comme référence ou comme source d'inspiration; le père Braud ou l'abbé Branch ne sont donc pas perçus comme précurseurs. Quand on parle des auteurs et de leurs pièces, c'est pour fins de recensement, non dans le but de déterminer leur influence.
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Malgré l'absence de succès posthume de ces ceuvres, et l'écart qui les sépare des autres activités théâtrales, on retrouve une certaine continuité dans le théâtre de tous les temps en Acadie: il y a toujours eu reprise de mythes ou de caractéristiques spécifiquement acadiennes. Les thèmes historiques sont donc récursifs, mais aujourd'hui, contrairement à l'époque du théâtre de collège, on tend plutôt à miser sur ceux-là mêmes qui trouvent leur origine dans la vie populaire. En somme, deux théâtres ont existé parallèlement en Acadie: un théâtre didactique, à l'intérieur des collèges, et un théâtre essentiellement populaire (sans connotation péjorative). Le premier a disparu avec les infrastructures dont il dépendait; il a perdu son cadre, ses auteurs, ses acteurs et son publie du même coup. Le second, lui, est plus durable parce que les éléments puisés aux mythes millénaires y sont davantage présents, ce qui le rend à la fois plus subtil, plus ambigu et plus malléable. Et c'est ce théâtre qu'a choisi de raviver le théâtre professionnel actuel.
Notes
THÉÂTRE DE COLLÈGE,THÉÂTRE ET COLLÈGE: UNE INTERDÉPENDANCE PRÉCAIRE EN ACADIE
Judith C Perron
1 Voir à ce sujet MARGUERITE MAILLET, Histoire de la littérature acadienne (Moncton:Éditions d'Acadie 1983); ZÉNON CHIASSON, « Le théâtre acadien: quel bilan? », Si que 4 pp 5-15; JEAN-CLAUDE MARCUS, « Les fondements d'une tradition théâtrale en Acadie », Les Acadiens des Maritimes I (Moncton: Chaire d'études acadiennes 1980) pp 633-666
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2 ZÉNON CHIASSON, « Le théâtre acadien de 1960 à 1990: quelques pièces d'identité »,
communication donnée à Chicago à l'automne 1990. Lors de ce colloque sur les trente
dernières années de littérature au Québec, CHIASSON a dressé le bilan des pièces acadiennes qui ont traité de l'identité, sans toutefois les comparer au corpus de la dramaturgie québécoise dont fait partie, dans le cadre de l'institution théâtrale, l'oeuvre d'ANTONINE MAILLET. « La dimension de cette dernière, dit-il, la propulse dans les rangs du répertoire universel et nous oblige à chercher ailleurs les signes de notre identité théâtrale ». Dans cette perspective, il tente
de préciser ce que signifie « pièce acadienne » et brosse un tableau de l'évolution du traitement des signes de l'acadianité dans la dramaturgie acadienne contemporaine
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3 On parlera de pragmatique comme ALBERT HALSALL l'entend dans L'art de convaincre (Toronto: Paratexte 1988) lorsqu'il dit que « le récit pragmatique ne peut atteindre son but persuasif qu'en formant des arguments en fonction du public cible » (p 144). Et si l'on examine ces arguments de plus près, ce sera un regard sur l'oeuvre comme « instrument de
communication de structure artistique [ ... ] pour ce qu'elle fait plutôt que pour ce qu'elle est » (p 22)
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4 UN SPECTATEUR, « Grande séance musicale et dramatique au collège Ste-Anne »,L'Évangéline 24 déc 1896 p 3
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5 ANONYME, « Société Historique et Littéraire Acadienne », L'Évangéline 21 mars 1929 p 7
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6 Le tapuscrit de cette pièce écrite par le R.P. ALEXANDRE BRAUD se trouve au Centre d'études acadiennes (Moncton). Cette pièce a été montée le 20 avril 1902 au Collège Sainte-Anne à Pointe de l'Église,
Nouvelle-Écosse
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7 JAMES BRANCH, L'Émigrant acadien, Drame social en 3 actes (Moncton: L'Évangéline Ltée 1929); 2e éd. revue, corrigée et augmentée (Moncton: L'Évangéline Ltée s.d.); 3e éd.
(Gravelbourg: L'Imprimerie Amateur 1937). La citation provient de la lère éd. p 14
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8 JEAN-BAPTISTE JÉGO, Le Drame du peuple acadien, Reconstitution historique en neuf tableaux et une pose plastique de la dispersion des Acadiens, d'après La Tragédie d'un peuple d'ÉMILE LAUVRIERE (Paris: Imprimerie Oberthur 1932) p 27
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9 JAMES BRANCH, Vivent nos écoles catholiques! ou la Résistance de Caraquet,Drame historique acadien (Moncton: l'Évangéline Ltée 1929); 2e éd. (Gravelbourg: L'Imprimerie des scouts catholiques s d). La citation est tirée de la lère éd. p 8
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10 HALSALL p 152
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11 PASCAL POIRIER, « Un poème acadien », L'Évangéline 21 août 1902 p 2
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12 ANONYME, «La fête du Révérend Père Supérieur au collège Sainte-Anne» L'Évangéline ler
mai 1930 p 3
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13 UN TÉMOIN, « le 20 avril au collége Sainte-Anne » L'Évangéline ler mai 1902
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14 ANONYME, « La fête du Révérend Père Supérieur au collège Sainte-Anne » loc cit
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15 OBSERVATEUR, « Collège Ste-Anne, Church Point » L'Évangéline 24 avril 1902 p 3
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16 ANONYME, «La séance de Paquetville un triomphe» L'Évangéline 10 août 1932 p 5
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17 Ibid
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18 ANONYME, «La fête du Révérend Père Supérieur au collége Sainte-Anne» loc cit
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19 A.E., « Une belle leçon de foi et de patriotisme: 'Le Drame du peuple acadien', L'Évangéline 9 juin 1932 p 3
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20 ANONYME, « La fête du Révérend Père Supérieur au collège Sainte-Anne », loc cit
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21 LAURENT LAVOIE, « Le théâtre de langue française au Nouveau-Brunswick », Le théâtre canadien -français, in Archives des lettres canadiennes V (Montréal: Fides 1976) p 453
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22 Ibid p 457
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23 ROGER LACERTE, « La tradition théâtrale en Acadie, » Revue de l'Université de Moncton 11 2 (mai 1978) p 127
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24 MARGUERITE MAILLET, Histoire de la littérature acadienne (Moncton: Éditions d'Acadie 1983) p 137
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25 LAVOIE, p 456
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26 JEAN-CLAUDE MARCUS, « Les fondements d'une tradition théâtrale en Acadie », Les Acadiens des Maritimes I (Moncton: Centre d'études acadiennes 1980) p 645
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27 L'intertexte du théâtre contemporain se situe plutôt dans l'histoire populaire et dans le discours social. Entre autres, dans Tête d'eau (Moncton: Éditions d'Acadie 1974) et Le Djibou (Moncton: Éditions d'Acadie 1975), LAVAL GOUPIL parle du mal de vivre « in Acadialand »,d'aliénation, de solidarité et d'émancipation. JULES BOUDREAU, dans Cochu et le soleil (Moncton: Éditions d'Acadie 1979) reprend l'épisode de la Déportation pour la démystifier,pour donner à l'Acadien déserteur et traître la place qui lui revient dans l'histoire. Et, plus
récemment, la scène acadienne fait place au théâtre pour jeune public. On traite du thème de la vie et de la mort, du bonheur et des différences (GRACIA COUTURIER, Enfantômes suroulettes (Moncton: Michel Henry 1989), on aborde les problèmes reliés au divorce et à la séparation (CHRISTIANE ST-PIERRE, Mon coeur a mal aux dents (Moncton: Éditions d'Acadie 1991). La nouvelle dramaturgie parle du quotidien des héros ordinaires et de leur façon de composer avec la société du XXe siècle. On redonne parfois à l'Acadien son accent, et on lui permet de jouer avec ses mythes et ses croyances.
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