Présentation de la co-rédactrice invitée

Natalie Alvarez
University of Toronto

1 Organiser une conférence à Toronto qui se voulait être une célébration du théâtre du Canada atlantique, cela peut sembler bizarre, sinon déplacé. C’est peut-être dans un souci d’estomper l’éventuelle impression de dispersion et de Toronto-centrisme que j’ai voulu, en entamant la planification de la conférence, persuader mes collègues à embaucher un joueur de cornemuse qui divertirait les participants entre les séances, décorer les tables avec des homards en plastique au dîner, et prévoir des petits verres de Screech pour les présentateurs nerveux. Heureusement, Bruce a réussi à m’en dissuader doucement.

2 D’une certaine façon, la distance du « chez-soi » d’origine de cette conférence a entretenu une distance pensive et critique et une nostalgie à laquelle Ric Knowles fait allusion dans sa conclusion à ce numéro. Si la nostalgie peut, dans son sens conventionnel, être conçue comme un état de rêverie dépourvu de critique, alors la nostalgie tangible s’est avérée être un mode d’enquête productif. Les observations sur le passé du théâtre du Canada atlantique issues d’enquêtes sur son présent ont mené à des réflexions sur son avenir qui englobaient l’aspect temporel qu’interpellait le titre de la conférence. L’activité critique et performative produite autour du concept de théâtre du Canada atlantique a servi à reconstituer un sentiment de ce lieu-là, ici à Toronto qui reflétait la façon dont la notion de lieu et de culture peut être engendrée dans l’imaginaire collectif. Quand nous laissons de côté les réflexions critiques sur la notion de « communauté », il est difficile de ne pas épouser cette idée après avoir joué à la corde à danser — parfois même à deux cordes — avec des gens qui, quelques heures plus tôt, étaient nos co-panélistes. C’est d’ailleurs ce que nous avons fait en atelier avec la compagnie Artistic Fraud. La conférence a réussi à créer un sentiment de collectivité, de communauté peut-être, voire même de second « chez-soi ». Et ce, même en l’absence du joueur de cornemuse.