LE MUSÉE À L'ÉCOLE:
UNE EXPÉRIENCE DE JEU DRAMATIQUE PAR LES ŒUVRES D'ART

FRANCINE CHAÎNÉ

«La mission de l'art n'est pas de copier la nature, mais de l'exprimer»
(Balzac)

Quand les œuvres entrent à l'école, c'est l'occasion pour les élèves de regarder, d'apprivoiser, de faire connaissance avec les artistes qui les ont produites, d'affirmer ses préférences et de les communiquer aux autres. C'est la réception des œuvres. Quand les œuvres deviennent le point de départ au jeu dramatique, c'est ce que nous nommons l'animation des œuvres. En d'autres mots, il s'agit d'aller à leur rencontre d'un point de vue ludique afin de leur donner une nouvelle vie, celle que chaque joueur découvre en atelier d'art dramatique. Nous avons mis sur pied une exposition de peintures ayant pour thème le paysage; nous les avons choisies dans la collection du Prêt d'œuvres d'art du Musée du Québec. L'exposition a été présentée à l'automne 1998 dans une école primaire de Rimouski. Ce texte porte sur cette expérience singulière; elle vise à analyser entre autres ce que le contact quotidien avec les œuvres figuratives ou abstraites a évoqué chez les élèves tant du point de vue du jeu dramatique que des commentaires et des questionnements qu'elles ont soulevés. À la manière d'Alice, les élèves du préscolaire à la sixième année ont donc été invités à entrer dans l'image afin de se l'approprier et de l'animer dans des activités dramatiques. Bien que cette expérience ait un caractère interdisciplinaire, elle est principalement centrée sur le jeu dramatique avec le support des œuvres d'art qui agissent comme révélateur auprès des joueurs.

When works of art are brought into the school, students are given the opportunity to closely examine these art objects and, as it were, to make them their own; the young people become acquainted with the artists who produced the works of art and can both express their opinions about these creations and communicate their ideas to others. Students thus interact with the works themselves. When art becomes the starting point for dramatic play, the experience has the effect of making art come alive. In other words, students communicate with works of art through play, giving these works a new life, one which each student discovers in the drama workshop. We put together an exhibit of landscape paintings which we chose from among the collection of works on loan from the Musée du Québec. The exhibit took place in the fall of 1998 in an elementary school in Rimouski. My paper will deal with this unique experience: I wish to analyse, among other things, what this daily contact with figurative and abstract works of art evoked within the students, both from the point of view of dramatic play and as seen in the comments that were made and the questions that were asked. Like Alice in Wonderland, students ranging from pre-school age all the way up to the sixth grade were invited to interact with a work of art, to make it their own and to give it new life through drama activities. Though this experiment is basically of an interdisciplinary nature, it mainly revolves around dramatic play, enhanced by works of art which are meant to open up new horizons for the students involved.

INTRODUCTION

Dans une pratique de jeu dramatique avec des élèves du primaire, le point de départ d'un atelier peut être un thème, un objet, un lieu, l'élément de costume d'un personnage, un conte ou une situation comportant un problème à résoudre, etc. Il peut aussi s'agir d'une reproduction ou d'une œuvre originale comme une peinture, un dessin ou une sculpture, par exemple.

Des œuvres habituellement exposées dans des galeries ou des musées sont parfois présentées dans d'autres lieux. C'est le cas de celles de la collection de Prêt d'œuvres d'art du Musée du Québec, qui circulent dans les différents bureaux ministériels, dans les délégations du Québec et dans les institutions pédagogiques. Nous avons sélectionné des œuvres de cette collection que nous avons fait voyager jusqu'à Rimouski, à l'école primaire Du Rocher. Elles ont fait l'objet d'une exposition intitulée Autour du paysage, présentée à l'automne, 1998. Ces œuvres ont été pendant un mois une occasion de rencontre par le jeu dramatique pour les élèves et leurs enseignants.

Notre projet à caractère interdisciplinaire visait à lier des œuvres à une pratique d'art dramatique. Toutefois, bien que celles-ci aient été explorées pour elles-mêmes, elles sont demeurées le point de départ essentiel à une pratique ludique. Mais il est clair qu'il doit d'abord y avoir réception des œuvres pour que le jeu ait lieu. Les œuvres ainsi fréquentées ont marqué l'espace quotidien de l'école; en d'autres mots, elles ont fait l'objet d'une attention toute particulière de chacun pour ensuite être investies dans le jeu dramatique.

Dans les pages qui suivent, nous traiterons de l'origine du projet, du partenariat entre le musée et l'école, du choix des œuvres, de la mise en place du projet auprès des enseignants ou de la réception des œuvres ainsi que de l'espace des œuvres et l'espace de jeu (animation des œuvres) dont nous présenterons quelques aspects de la pratique.

ORIGINE DU PROJET

L'événement Autour du paysage à l'école Du Rocher de Rimouski a été précédé d'un projet réalisé auprès des élèves du préscolaire l'année précédente, en collaboration avec deux enseignantes impliquées depuis de nombreuses années en art dramatique, Muriel Lagacé et Cécile Thériault. Ce projet a porté sur l'exploration de reproductions d'œuvres en atelier d'art dramatique. Dans cette perspective, nous avons utilisé des reproductions d'Images de l'art (1989), qui se trouvent dans la plupart des écoles primaires, ainsi que celles d'Imagine et moi (1990), matériel pédagogique pour le préscolaire qui comprend aussi des reproductions d'œuvres.

En introduisant ce matériel culturel à l'intérieur d'activités dramatiques, nous souhaitions observer comment les enfants de cinq ans à la maternelle pouvaient les accueillir et les intégrer à leur jeu. Cette recherche exploratoire nous a amenée à créer une quinzaine d'ateliers que nous avons animés en partie et qui, par ailleurs, ont été expérimentés par les deux enseignantes. Lors de rencontres mensuelles, nous discutions avec celles-ci du déroulement des ateliers mettant en perspective les difficultés rencontrées par les élèves en regard des œuvres et du jeu, mais aussi des découvertes qu'ils avaient faites et qui élargissaient nos propositions. Les discussions sur les ateliers avaient lieu immédiatement après ceux-ci quand cela était possible, mais le plus souvent, elles avaient lieu en différé, par courriel, par exemple. Après un an, certaines observations on pu être dégagées à propos des élèves qui en étaient à leur première expérience en art dramatique:

Bref, les enfants de cinq ans accueillaient avec enthousiasme les œuvres qu'ils animaient par le jeu. Cela nous a amenée à développer une rencontre plus directe avec des œuvres originales: c'est ainsi qu'a démarré, de concert avec le Musée du Québec, le projet Autour du paysage. Comme celui-ci était assez ambitieux, nous l'avons étendu aux élèves de toute l'école, du préscolaire à la sixième année.

PARTENARIAT MUSÉE-ÉCOLE

C'est une chose de proposer des œuvres originales, mais encore faut-il les trouver sans que l'entreprise soit trop complexe ou trop onéreuse. Le Musée du Québec a, depuis près de vingt ans, mis sur pied la collection de Prêt d'œuvres d'art. Des «peintures, sculptures, photographies, dessins, gravures et objets d'art décoratif réalisés au cours des quinze dernières années par près de 650 artistes qui travaillent au Québec»1 composent cette collection d'œuvres contemporaines qui, chaque année, s'enrichit de nouvelles acquisitions.

Par ailleurs, dans le programme Expositions didactiques de la collection Prêt d'œuvres d'art, «le Musée du Québec s'associe aux institutions d'enseignement afin de présenter les réalisations d'artistes québécois contemporains ».2 Nous avons inscrit notre projet dans cette structure. Ce partenariat, exceptionnel par la qualité des œuvres mises en circulation, nous a amenée à faire une sélection parmi les quelque 1500 de la collection.3 Pour avoir accès à ce programme, il faut proposer un projet pédagogique où les œuvres sont mises en valeur par des activités artistiques animées par des enseignants en art ou par des titulaires de classe encadrés par un spécialiste.4 Devant l'ampleur du projet Autour du paysage et la volonté des enseignants de s'y engager, la direction a décidé d'en faire son «projet-école» pour l'année 1998-1999.

PROJET Autour du paysage ET LE PARTENARIAT MUSÉE-ÉCOLE

Si nous avons arrêté notre choix sur le paysage comme thématique de l'exposition, c'est qu'il y avait eu à la même Commission scolaire, deux autres événements qui abordaient la thématique des animaux et l'autoportrait. Il nous fallait donc trouver une nouvelle avenue pour la nôtre: nous avons retenu le paysage. Comme nous l'avions déjà observé l'année précédente, les plus jeunes élèves de l'école avaient accueilli très favorablement des œuvres non figuratives, c'est pourquoi notre choix s'est arrêté sur des œuvres évoquant le paysage plutôt que l'illustrant. Notons que le titre même de l'exposition, Autour du paysage, est un indice de nos choix: le spectateur peut s'attendre à entrevoir un paysage plutôt qu'à le voir dans tous ses détails. De même que les œuvres sont évocation de paysages, la pratique d'art dramatique n'est pas illustrative des œuvres présentées: elle relève davantage du contrepoint.

L'idée du paysage nous est aussi venue par l'observation de Rimouski, ville qui longe le fleuve St-Laurent, là où il est si large qu'on voit à peine l'autre rive. Les marées y sont imposantes et l'eau est salée: les autochtones parlent de la mer plutôt que du fleuve à cet endroit. Nous avons été fascinée par l'environnement autour de l'école Du Rocher, d'où il y a vue sur la mer. Les personnes qui vivent quotidiennement dans ce lieu voient-elles le paysage d'un «regard inattentif», comme en fait éloge Dubuffet qui l'aborde «obliquement, sans y prendre garde» (Chiron, 1995, 30)? En d'autres mots, à force d'avoir la mer devant les yeux, ils en arrivent parfois à ne plus la voir. Ils font plutôt partie de ce «paysage flottant» et en sont imprégnées contrairement au regard de l'étranger qui se laisse impressionner par la nouveauté.

Il faut préciser que le paysage est un lieu de connaissance pour les enfants de tous âges. À ce sujet, Anne Cauquelin précise «que le paysage préexiste à notre conscience, ou tout au moins qu'il est donné «avant» toute culture» (Cauquelin 20). Les enfants font donc partie du paysage: ils en ont l'expérience lorsqu'ils jouent dehors, regardent la neige tomber par la fenêtre, marchent et sautent dans les flaques d'eau, nagent dans un lac ou dans la mer, pêchent à la ligne dans un ruisseau, construisent un fort l'hiver ou des châteaux de sable l'été. Et même lorsqu'ils prennent l'autobus de la maison à l'école, les enfants voient quotidiennement des paysages. Le passage entre le paysage comme environnement naturel en regard de l'objet culturel qu'est la peinture se fait donc facilement. Quant à l'écart qui pourrait exister entre la réalité des jeunes et l'imaginaire des artistes, il ne semble pas très grand étant donné que la plupart des enfants ont eux aussi eu l'expérience de dessiner des fragments de paysages plus ou moins réalistes. Ne se sont-il pas fait demander à un moment ou l'autre ce que représentait leur dessin? Les explications qu'ils ont données ont toujours éclairé les adultes curieux.

Notre projet vise à présenter des œuvres originales à l'école, à les laisser sur place pendant un certain temps -l'exposition a duré un mois - mais aussi à amener les enseignants titulaires de classe à faire découvrir des œuvres à leurs élèves par des activités d'art dramatique. Sauf exception, les enseignants rencontrés ne sont pas qualifiés dans cette discipline artistique; ils ont toutefois reçu un perfectionnement du ministère de l'Éducation et de leur Commission scolaire. L'art dramatique fait toutefois partie de la grille horaire à raison d'une période par semaine et cette activité apparaît sur le bulletin des élèves.5

Afin de rester fidèle aux objectifs de notre projet tout en respectant la réalité des enseignants non-spécialistes en art dramatique, nous avons rédigé un guide pédagogique que nous leur avons présenté lors de la visite initiale de l'exposition. Le document présente le projet, les artistes, et il est composé d'une activité de prise de contact avec les œuvres ainsi que de deux ateliers d'art dramatique par deux niveaux.6 Les enseignants avaient toutefois la possibilité d'animer d'autres activités que les leurs en les adaptant pour leurs élèves.

Pendant un mois, les titulaires de l'école Du Rocher ont donc proposé des ateliers à leurs élèves et ils ont conservé les traces de la pratique réalisée lors d'une rétroaction qui portait sur une transposition de l'activité dans une autre discipline. Ces réalisations en arts plastiques ont été présentées près des œuvres auxquelles elles se rattachaient: elles en étaient l'écho. L'accent de la pratique a porté sur la démarche de création. Les ateliers proposés étaient composés de cinq étapes: 1- la perception de l'œuvre; 2- l'exploration du langage dramatique; 3- la dramatisation; 4- la rétroaction verbale; et 5- la rétroaction transposée en arts plastiques. Les ateliers avaient une durée d'une heure environ, mais l'activité d'arts plastiques pouvait être réalisée en différé, c'està- dire plus tard dans la journée ou à un tout autre moment.

CHOIX DES ŒUVRES

Les œuvres de la collection de Prêt d'œuvres d'art se trouvent dans les voûtes du Musée du Québec, une vraie caverne d'Ali Baba. Avant d'y pénétrer, il est essentiel d'avoir ciblé certains critères de sélection afin de faire un choix éclairé. Outre le thème retenu, nos critères ont porté sur l'espace d'exposition comme la grandeur de la salle, le type d'œuvres (peinture, sculpture, photo, etc.), les dimensions des œuvres et le style ainsi que certains aspects d'ordre moral qui nous ont porté à mettre à l'écart des œuvres comportant des scènes violentes ou à caractère sexuel qu'il aurait été difficile d'exposer à l'école.

Comme l'école n'a pas de salle polyvalente assez grande pour accueillir des sculptures, nous avons convenu de présenter des œuvres en deux dimensions (2D) à la bibliothèque ainsi que dans les corridors adjacents. Pour que le spectateur ait un certain recul, elles ne devaient pas excéder 1,50m environ. Le thème du paysage nous a permis d'arrêter nos choix sur des œuvres évoquant des éléments de la nature (Linda M. Bruce), des éléments marins (Sylvain Cousineau, Lauréat Marois). D'autres œuvres, plus abstraites mais qui, placées en relation avec les autres, «faisaient paysage» (Gilles 19) en suggérant une ligne d'horizon (Lucio De Heusch), un personnage (La Huronne de Mario Mérola) ou encore évoquant une cartographie d'une région vue des airs (Serge Lemoyne).

Voici quelques caractéristiques des œuvres de l'exposition: parmi les sept œuvres retenues, une seule a été réalisée par une artiste. Tous les artistes ont étudié à l'université ou dans des écoles d'art et ont à leur actif de nombreuses expositions. On retrouve six peintures (acrylique ou huile) et une estampe qui ont été réalisées entre 1981 et 1991. Elles ont toutes un titre et aucune n'est signée, à l'exception de celle de Linda M. Bruce qui a mis ses initiales tandis que l'estampe de Lauréat Marois est signée et numérotée. Ce sont des œuvres de format moyen: la plus petite mesure de 27cm par 32cm (Mario Mérola), la plus grande, de 137cm. x 162cm, a été peinte par Peter Raymond.7 Une fois le montage de l'exposition terminé, il fallait mettre en place la structure d'animation afin que les enseignants puissent, dans leur classe, donner une vie nouvelle aux œuvres en compagnie de leurs élèves.

MISE EN PLACE DU PROJET AUPRÈS DES ENSEIGNANTS:
RÉCEPTION DES ŒUVRES

Sans la présence et la participation des enseignants, notre projet n'aurait pu avoir cette envergure. Les œuvres auraient risqué de rester des éléments esthétiques, voire décoratifs, ce qui aurait été impensable dans le contexte éducatif du Musée du Québec. Ce projet a un caractère didactique: il implique une forme d'enseignement auprès des titulaires qui, à leur tour, animent des ateliers avec leurs élèves. Ainsi, nous avons porté une attention toute particulière aux enseignants lors de l'ouverture de l'exposition où nous avons présenté chacune des œuvres ainsi que le guide pédagogique.

Lors de la présentation de l'exposition aux enseignants, nous avons principalement mis l'accent sur l'appréciation des œuvres à partir de leur propre expérience de l'art, c'est-à-dire à partir du sujet qui regarde une peinture, par exemple, afin «d'établir un dialogue» (Verreault et Pelletier 550) avec celle-ci. Nous avons questionné les enseignants sur leurs perceptions de l'exposition afin d'attirer leur attention et leur curiosité sur l'expérience esthétique. Nous avons aussi informé les enseignants qu'il était possible d'éprouver certaines émotions face à une œuvre: du coup de foudre à l'aversion, sentiments extrêmes qui risquaient parfois de compliquer l'appréciation des œuvres en imposant même une forme de silence. C'est pourquoi les enseignants n'étaient pas tenus d'animer un atelier où une œuvre éveillerait de tels sentiments. Ils étaient encouragés à en choisir une autre dont l'accueil était plus facile. Cette première visite guidée de l'exposition a permis aux enseignants d'affirmer leurs préférences.

Notre démarche pédagogique, centrée sur la personne, avait comme objectif d'habiliter l'enseignant à recevoir les œuvres et à les animer par l'art dramatique auprès de ses élèves. Ces activités artistiques favorisaient une culture des œuvres où le participant arrive à être «attentif aux formes, aux couleurs, aux matières, aux textures, aux supports, aux matériaux, mais aussi au style, à l'organisation de ces indices en champs sémantiques, en champs de signification» (Ardouin 75). Bref, pour les enseignants, la première rencontre avec les œuvres pourrait se traduire ainsi: regarder, voir de plus près, s'éloigner, repérer des éléments qui touchent, faire connaissance avec les artistes, s'interroger sur les manières de faire, affirmer ses préférences, les partager.

ESPACE DES ŒUVRES ET ESPACE DE JEU: ANIMATION DES ŒUVRES

Réparties dans l'école, tout particulièrement à la bibliothèque et dans les corridors près des classes, les œuvres ont occupé les lieux et sont devenues incontournables pendant le temps de l'exposition. Par ailleurs, lors des ateliers en classe, les œuvres sont devenues espace de projection vers lequel les regards ont convergé. Plusieurs auteurs ont écrit sur leur expérience de réception d'une œuvre; nous en avons retenu quelques-uns parmi les plus évocateurs:

Regarder et non plus voir, permettre ainsi à cette vision de se retourner sur elle-même et entrer en interaction avec l'espace de l'Autre. Attendre, entendre, «se laisser approcher par l'inattendu et l'imprévu», faire siens les écarts, les inattentions et ainsi «creuser à tout prix par les mots. Laisser au contraire surgir ce qui nous advient. (Mathieu 123)

Par ailleurs, voici ce que Roland Barthes dit comme spectateur devant une image de Muybridge:«... je décompose, j'agrandis, et, si l'on peut dire: je ralentis, pour avoir le temps de savoir enfin» (Barthes 155).

Voilà l'exemple de deux personnes qui ont l'habitude de la compagnie des œuvres. On y perçoit bien le mouvement d'aller-retour du spectateur face à l'œuvre qu'il essaie de comprendre et avec laquelle il essaie d'instaurer un dialogue. L'espace de l'œuvre, ce «fragment de paysage» (Cauquelin 169), est selon nous une petite scène à partir de laquelle le spectateur peut se projeter, circuler, voyager.

Dans le contexte qui nous occupe, nous n'avons pas voulu faire une analyse formelle des œuvres avec les élèves afin d'en souligner les caractéristiques esthétiques, nous avons préféré mettre l'accent sur certains aspects de celles-ci qui sont mises en jeu et dramatisées. Dans les ateliers, à l'exception de l'étape de perception qui vise à accueillir l'œuvre dans son ensemble, nous avons abordé l'œuvre de façon fragmentée en mettant de l'avant certaines zones qui paraissaient intéressantes pour le jeu .8 Les œuvres, en tout ou en partie, se transforment donc en «lieux dramatiques» (Beauchamp 221) lorsqu'elles sont mises en jeu ou dramatisées dans l'espace.

Dans les pages qui suivent, nous présenterons des exemples de la pratique d'atelier qui illustreront ce que nous venons d'avancer en fonction de la démarche de création que nous avons présentée plus haut: perception, exploration, dramatisation et rétroaction. De plus, nous préciserons certaines particularités de la pratique et de l'intervention pédagogique. Enfin, nous analyserons les données du point de vue de l'interdisciplinarité.

PERCEPTION

La prise de contact avec l'œuvre de Serge Lemoyne intitulée Hommage à Marcelle Ferron, ou la perception de l'œuvre, a pris la direction que nous allons décrire avec les élèves de 6e année. Ils ont d'abord observé l'œuvre dans son ensemble, puis tout particulièrement l'assemblage des différents éléments. «Qui est Marcelle Ferron?» leur a-t-on demandé et «Quelles pourraient être les raisons qui ont amené l'artiste à rendre hommage à cette femme?» Les élèves ont imaginé que Marcelle Ferron était une amie de l'artiste, sa mère, sa tante ou sa femme. Ils ont ajouté que c'était par amitié ou par amour que Lemoyne avait réalisé cette œuvre. Nous avons évidemment précisé aux élèves qu'il s'agissait bien d'une amie de l'artiste. Nous avons aussi soulevé la question de la peinture en fonction de cette œuvre qui n'est pas peinte sur une toile, comme cela l'est habituellement. Les élèves de 6e ont répondu qu'il pouvait s'agir à la fois d'une peinture parce que l'œuvre était peinte, mais comme elle avait un certain volume et n'était pas réalisée sur un canevas, mais était composée de trois éléments ressemblant à trois petites boîtes attachées les unes aux autres, cela pouvait être autre chose, une sculpture, par exemple. Les élèves ont observé les nœuds qui tenaient les trois éléments de l'œuvre. Nous les avons invités à poursuivre cette perception en proposant un jeu corporel à deux où l'un prenait une position de départ fixe tandis que l'autre l'enveloppait avec son corps afin de le cacher au maximum. Cette activité était suivie d'une observation des formes corporelles en regard des formes de l'œuvre.

La réception de l'œuvre à l'étape de la perception présentée sous forme de questions-réponses a permis de mettre de l'avant la variété des points de vue des élèves en regard de l'œuvre. L'exploration constitue le deuxième temps de l'atelier et a pour but de développer le langage dramatique (corps, voix, espace, objet) tandis que la dramatisation est l'occasion pour les élèves de faire des choix et de «composer» une séquence dramatique. Dans le contexte qui nous occupe, l'exploration et la dramatisation pourraient se traduire ainsi: il s'agit d'un déploiement de l'œuvre (ou de certaines parties de l'œuvre) dans l'espace de jeu, passant de l'aplat (deux dimensions: l'œuvre peinte) à l'espace (trois dimensions: le jeu des élèves).

EXPLORATION

À l'étape d'exploration, nous avons abordé divers aspects du langage dramatique en lien avec l'œuvre qui reste au centre de la pratique. À partir de l'œuvre de Linda M. Bruce intitulé Fenêtre en coin, les élèves de 1ère année ont pris des attitudes fixes en fonction des éléments de l'œuvre. Par exemple, ils ont pris des attitudes fixes représentant la plante et, à partir de ce «personnage », ils ont réagi par des mouvements comme si les rayons du soleil la réchauffaient. Puis, dans un exercice à deux, ils ont fait un jeu de miroir en imaginant que les mouvements ralentis étaient provoqués par un vent doux qu'ils imaginaient provenir de la fenêtre sur la toile.

L'exploration faite à partir de l'œuvre de Mario Mérola avec les élèves de 3e année a pris sa source du côté du bas-relief, forme artistique utilisée dans La Huronne. Les élèves ont donc joué à partir des plans: l'avant-plan et l'arrière- plan. Debout, dos au mur, un groupe d'élèves faisaient avec des parties de corps des formes géométriques. Ils ont ainsi fait apparaître des formes qui avançaient et qui reculaient à la manière d'un bas-relief et ce, dans un mouvement continu. L'exploration du langage dramatique par l'œuvre a permis aux élèves d'entrer en contact avec celle-ci et d'en arriver à développer une improvisation lors de la dramatisation.

DRAMATISATION

Après avoir exploré l'œuvre de Lauréat Marois, Logis nocturne, les élèves de 4e année ont imaginé l'histoire de l'île ou plutôt la vie et les personnages qui se trouvaient dans la demeure lointaine. Ils ont mis en jeu, sans parole mais avec des mouvements et des déplacements dans l'espace, les actions des personnages en imaginant ce que ceux-ci pouvaient voir de leur rive.

RÉTROACTION

L'étape de dramatisation est généralement suivie d'une rétroaction verbale portant sur l'ensemble de l'atelier ou sur un aspect de celui-ci. C'est l'étape d'appropriation qui permet aux élèves de se remémorer ce qu'ils ont fait. Cette rétroaction était suivie d'une autre portant sur une transposition en arts plastiques, ce qui avait comme effet de faire écho aux œuvres visuelles et de conserver des traces de la pratique. Ainsi, les élèves du préscolaire ont réagi à l'œuvre de Lucio De Heusch intitulée Passage 070291, en traçant des formes géométriques faites de lignes multicolores avec des pastels de couleurs. Nous avons observé que les réalisations visuelles des élèves étaient originales, c'est-à-dire exemptes de clichés bien qu'ils n'aient pas eu une démarche complète en arts plastiques, cela est probablement dû au fait qu'ils avaient côtoyé les œuvres par le jeu pendant toute une période. Bref, la pratique dramatique a eu comme effet d'encourager l'originalité de chacun et de mettre de l'avant la variété des points de vue des joueurs.

QUELQUES PARTICULARITÉS DE LA PRATIQUE ET DE
L'INTERVENTION PÉDAGOGIQUE

Comme nous venons de le constater dans la démarche de création, sa principale caractéristique consiste à aborder des œuvres d'art par le jeu dramatique. Celles-ci ont servi de support au jeu au même titre qu'un support sonore, par exemple. Elles n'en sont toutefois pas restées là car la pratique dramatique a permis aux élèves d'accueillir les œuvres et de les découvrir. Plutôt que de les aborder de façon formelle par les arts plastiques, nous avons privilégié une approche indirecte et ludique, c'est-à-dire par des personnages et des récits. Cette façon active d'intégrer des œuvres au jeu nous semble plus près de l'univers des enfants du primaire car elle suppose une implication physique des joueurs en mettant de l'avant le corps, la voix, l'espace et les objets. Le jeu dramatique a donc permis aux élèves de découvrir des œuvres qui auraient pu soulever certaines réticences en d'autres circonstances, comme la non-figuration par exemple. L'art dramatique a eu comme effet de rabattre dans l'espace de l'atelier l'œuvre en deux dimensions en la faisant passer à une troisième, celle des «lieux dramatiques» des joueurs.

L'IMPACT DE LA PRATIQUE SUR L'INTERDISCIPLINARITÉ

La pratique que nous avons proposée aux enseignants et à leurs élèves est interdisciplinaire par la présence de l'art dramatique et des arts plastiques mais aussi par la dimension culturelle des œuvres d'art. Au terme interdisciplinaire, nous préférons celui de métissage utilisé en art actuel, cela évoque la croisée des cultures sans toutefois insister sur les effets obtenus.9 En d'autres mots, la pratique dramatique a dynamisé les œuvres et a permis aux élèves, voire à leurs enseignants, de s'y apprivoiser sans trop de réticence. Le jeu dramatique a créé différents niveaux d'interaction: d'abord entre les œuvres et les élèves, entre l'espace de l'œuvre et l'espace de jeu, entre l'enseignant et les joueurs, entre la pratique dramatique et les réalisations en arts plastiques, etc. Cette mise à distance de l'œuvre par le jeu dramatique a donc permis de développer une pratique singulière et métissée par les personnages, les récits, les interactions entre les joueurs, etc., bref par la fiction.

CONCLUSION

L'école primaire Du Rocher de Rimouski a été transformée en lieu d'exposition pendant un mois. Des artistes et quelques-unes de leurs œuvres ont été présentés aux élèves et aux enseignants. Des jeux ont été réalisés en classe avec les œuvres. Les traces de la pratique ont été conservées à la suite des ateliers. Des parents ont été invités à venir voir l'exposition et leurs enfants leur ont fait découvrir Linda M. Bruce, Serge Lemoyne, Lauréat Marois, Mario Mérola, Peter Raymond, Sylvain Cousineau ou Lucio De Heusch.

Un tel projet est impossible sans la participation des enseignants et le risque qu'ils ont accepté de partager avec nous. Nous avons pu observer qu'avec eux, le projet a pris des dimensions inespérées: l'école est devenue pendant un temps un lieu d'art et de jeu dramatique. Plusieurs enseignants, tout comme les élèves, ont semblé éprouver une satisfaction en regard de leur école transformée en «musée», devenu vivant par l'animation des œuvres.

Bien que ce projet soit concluant, nous ne pouvons nous empêcher de nous inquiéter de la situation des arts à l'école. À l'aube des changements de programmes d'études par le ministère de l'Éducation, nous nous questionnons sur l'avenir des arts au primaire et au secondaire. La place occupée par ceuxci semble ravie par des matières plus «sérieuses», plus «importantes», comme les matières de base. Nous nous demandons même si l'art dramatique aura toujours sa place dans le curriculum et ce qui nous en fait douter, c'est l'absence à la fois de l'art dramatique et de la danse dans le document ministériel intitulé Réaffirmer l'école (1997). Sous la rubrique arts plus précisément, on trouve uniquement les arts plastiques et la musique. Malgré les pressions, les demandes de précisions de tous et chacun, rien n'y fit pour faire réapparaître ces deux disciplines artistiques dans les documents officiels. Ne plus les voir en noir sur blanc, n'est-ce pas le début d'une disparition annoncée?

Quant aux élèves, qu'adviendra-t-il de ceux qui ont, par exemple, une impression d'accomplissement en atelier d'art dramatique? Faudra-t-il toujours défendre la présence des arts à l'école? Quitteront-ils le quotidien des classes? C'est dans la classe où le langage artistique se développe au fil du temps, et pas nécessairement dans des projets spéciaux et ponctuels, que l'art prend forme à travers des personnages de plus en plus crédibles et dans des situations fictives de plus en plus développées. Ne perdons jamais de vue qu'il faut lutter toujours pour conserver les arts à l'école et tout particulièrement l'art dramatique, y céder, c'est risquer de passer à l'oubli.

Pour terminer sur une note moins sombre mais surtout pour boucler la boucle du projet qui a fait l'objet de cette présentation, voici une image paysagère qui pourrait agir comme métaphore de notre passage à l'école en compagnie des œuvres:

L'important n'est pas de retrouver la mer mais d'ouvrir le chemin qui en laisse entrevoir les signes. Des signes qui la relient à la terre et au ciel. Parce qu'elle est mythique, flux et reflux, sa perception est de l'ordre de la déception. On ne peut la regarder en face mais par le biais d'apparences trompeuses. Ce sont l'herbe, les froissures d'un mouchoir, des noms de lieux originels sur un drap usagé (que sais-je encore: plus récemment, la figure d'Aphrodite). Le bleu n'est pas tant la couleur de la mer que la teinte à valeur inductive qui nous en éloigne. (Chiron, 1995, 40)

 

Dans l'edition imprimée de cette article, la reproduction des peintures sont inclus:

Raymond, Peter (1982). Poison Ivy. Acrylique sur toile (137 cm x 162 cm).

De Heusch, Lucio (1991). Passage 070291. Acrylique sur papier (57 cm x 76,2).

Lemoyne, Serge (1987). Hommage à Marcelle Feron. Plastique, corde, papier journal et acrylique sur foamcore (49,5 cm x 29,1 cm).

Bruce, Linda M. (1985). Fenêtre en coin. Huile sur toile. (94 cm x 76.5 cm).

Marois, Lauréat (1981). Logis nocturne. Estampe sur papier. (55,9 cm x 76.2 cm).

Merola, Mario (1986). La huronne. Acrylique sur bois. (137 cm x 162 cm).

NOTES

1. Musée du Québec (1999). Documentation sur la Collection de Prêt d'œuvres d'art.
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2. Ibid.
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3. Nous tenons à remercier Mme. Louise Turmel et M. Michel Nadeau, responsables du service éducatif ainsi que M. Michel Martin, conservateur de la collection de Prêt d'œuvres d'art, de leur précieuse collaboration lors de l'élaboration du projet et jusqu'à sa réalisation.
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4. Nous croyons que ce type de projet pourrait être tout à fait percutant dans le cadre des Comités culturels mis en place dans plusieurs commissions scolaires, dont l'un des mandats vise la collaboration entre les milieux culturels et scolaires.
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5. Dans les mêmes conditions, les arts plastiques font aussi partie de l'enseignement par les titulaires de classe et font l'objet d'une évaluation.
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6. Le guide pédagogique comporte donc huit ateliers, du préscolaire à la sixième année.
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7. Voici les titres des œuvres: Linda M. Bruce, « Fenêtre en coin»; Sylvain Cousineau, «3 Mile Island»; Lucio De Heusch, «Passage 070291»; Serge Lemoyne, «Hommage à Marcelle Ferron»; Lauréat Marois, «Logis nocturne»; Mario Mérola, «La Huronne»; Peter Raymond, «Poison Ivy».
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8. Une expérience à l'opposé de la nôtre a été réalisée par John O'Toole qui a utilisé une œuvre de Goya intitulée The third of May. Cette œuvre réaliste représente un événement historique du temps de Napoléon et l'atelier traite de cette historicité et de la scène qui est représentée. (O'Toole 60-74).
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9. Nous empruntons l'expression à Robert Lepage qui a présenté au Musée de la Civilisation de Québec, une exposition ayant pour titre «Métissage»; celle-ci fait preuve de la rencontre des arts. Nous préférons le terme métissage à multidisciplinarité parce qu'il donne une ouverture sur la rencontre des arts et la culture.
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Références

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