Book Reviews / Comptes rendus de livres

Les jardins des Amériques : éden, home et maison. Le Canada et les Amériques.

Yves Laberge
l’Université d’Ottawa
Compte rendu de Patrick Imbert (dir.). 2007. Les jardins des Amériques : éden, home et maison. Le Canada et les Amériques. Ottawa : Université d’Ottawa.

246 pp.

1 Cet ouvrage interdisciplinaire, publié en français par la Chaire de recherche «  Canada  : enjeux sociaux et culturels dans une société du savoir », regroupe sept textes inédits. Ces recherches ne portent évidemment pas sur le jardinage, mais bien sur les représentations symboliques des lieux et des jardins comme révélateurs d’appartenance, de mémoire et d’identité collective.

2 En guise d’ouverture, le professeur Patrick Imbert montre comment l’étude et la compréhension du paysage canadien à travers diverses médiations (comme les écrits, littéraires ou autres) et par le truchement de la création artistique (surtout par les œuvres picturales) peuvent participer, au-delà de leur évidente dimension esthétique, à une véritable construction sociale de l’identité collective, voire de l’État nation (44). Parmi les exemples cités, pensons à La Flore laurentienne (1935) du frère Marie-Victorin ou encore aux toiles du Groupe des Sept. L’intérêt de ce livre résulte d’une étude attentive de la dimension esthétique qui dépasse une simple affirmation identitaire et qui n’est pas exclusive au Canada ; en plus de l’exemple des peintres du Groupe des Sept, Patrick Imbert mentionne pour les États-Unis le cas de George Alsop, qui idéalisa les paysages du Maryland pour y projeter la vision « d’un nouveau paradis terrestre » (24). Cet « attachement émotionnel au territoire » se manifeste et se transpose de diverses manières, comme l’indique le titre de l’ouvrage ; lieu transcendé ou idéalisé, lieu d’appartenance, point de départ (25). Toutefois, des variantes peuvent exister dans cette classification, passant du nomadisme à la sédentarisation ; par exemple, « le concept de home comme maison en mouvement appartenant surtout à la culture anglo-saxonne » s’oppose à l’idée du jardin qui implique au contraire l’idée d’un enracinement (55). Plus loin, d’autres exemples touchent l’Amérique latine. Dans un monde où les distances sont abolies par les nouvelles technologies, Internet, les migrations, on peut se demander comment nos repères identitaires d’hier connaissent de nouvelles limites et des mutations.

3 Tout ce livre invite à la réflexion et à l’analyse du lieu et de ses significations, voire de ses extrapolations dans la création littéraire et audiovisuelle. Les auteurs touchent autant aux études littéraires qu̕ aux approches culturelles centrées sur la symbolique des espaces (195). À première vue, ces lieux sembleraient peut-être banals sur le plan urbanistique, mais ils sont pourtant riches sur le plan culturel et historique : par exemple l’aéroport, ou encore le quartier de la Petite Italie à Montréal (88). De plus, ces analyses provoquent aussi des ricochets qui renvoient tour à tour à plusieurs conceptions théoriques (sémiologie, postmodernité) et ouvertures transdisciplinaires, par exemple à propos de la transculturation (189). On en apprécie la richesse quant aux auteurs consultés dans différents corpus et les correspondances qui y sont créées sur le plan théorique. Les étudiants à la maîtrise et au doctorat apprécieront particulièrement cet ouvrage concis et imaginatif.