Obituary / Nécrologie

Garth Wilson, 1960-2010

Sharon Babaian
Historienne, SMSTC

1 Le 13 novembre 2010, le monde muséal a perdu l’un de ses avocats les plus passionnés avec la mort prématurée – après deux ans de combat contre le cancer – de Garth Wilson, conservateur de la section des transports maritimes et terrestres de la Société des musées de sciences et technologies du Canada.

2 Garth Wilson était profondément soucieux des musées et de leurs collections. Il savait que les collections sont le cœur et l’âme des musées et il a consacré une grande partie de sa vie à étudier, comprendre et expliquer les artefacts. Il savait à quel point ils sont importants et, par son travail, cherchait à persuader les autres de leur importance. C’était une lutte constante, à laquelle il a toujours refusé de renoncer.

3 Garth associait son intérêt pour la culture matérielle à son amour de l’histoire de la technologie, en particulier celle des transports. Entre ses mains créatives, ces deux domaines n’en firent plus qu’un et le résultat fut vraiment remarquable. En tant que conservateur, tout d’abord de la section des transports maritimes (1989), puis de celle des transports terrestres et maritimes (2003) au Musée des sciences et de la technologie du Canada, Garth entreprit d’améliorer les collections nationales, de les étudier, de les interpréter et de produire des expositions et des publications qui interpellaient le public (et certains de ses collègues muséologues) en montrant la technologie sous un angle nouveau et étonnant.

4 Garth apportait son imagination, son intelligence et sa discipline à la collecte. Il évaluait soigneusement les mérites d’un objet avant d’en faire l’acquisition et résistait aux tentations d’acquérir quoi que ce soit pour des raisons de simple commodité. Ses efforts eurent pour résultat d’accroître la collection des transports en y incluant davantage d’exemples de véhicules de transport (la barge de drave, le doris de Shelburne, la yole pour la pêche au saumon), davantage de contenu canadien (bicyclettes CCM, voiture Mercury Montcalm) et davantage d’instruments de précision (comme le système de navigation intégré). Il était particulièrement fier d’être parvenu à acquérir la collection de la compagnie Rice Lake Canoe.

5 Dans ses expositions, le travail de Garth était tout aussi remarquable. Qu’il réalise une petite installation temporaire ou une exposition majeure, il prenait ce défi très au sérieux et y consacrait toutes ses facultés. Ses expositions se remarquaient par le choix méticuleux des objets, la pertinence du texte et des intitulés et leur cohérence thématique. Ses deux réalisations les plus importantes ont également été les plus récentes : Le canot. Un succès renversant (2000) et À la recherche de la voiture canadienne (2010). Dans ces deux expositions, Garth explorait des questions d’identité et, ce faisant, jetait à bas nos préjugés en nous montrant ce que pouvait être une exposition sur le thème des transports.

6 Les publications de Garth étaient également novatrices et interpellaient le lecteur en se concentrant toujours sur les objets et leurs significations. Qu’il écrivît pour le public dans Le conservateur raconte, revue du musée, ou pour une audience professionnelle, dans la Revue d’histoire de la culture matérielle, il découvrait sans cesse des manières inédites et intéressantes de poser une question et d’y répondre par une approche nouvelle. Le dernier article qu’il ait publié constitue un excellent exemple de la manière dont fonctionnait son esprit. Dans « Designing Meaning : Streamlining, National Identity and the Case of CN 6400 », Garth explorait une fois encore les questions de l’identité en consacrant son attention à une locomotive qui était depuis longtemps un élément inamovible, quoique silencieux, sur le sol du musée. Sa recherche avait mis en lumière l’histoire fascinante à l’arrière-plan de ce remarquable produit de l’ingénierie.

7 La communauté muséale a considérablement bénéficié de l’engagement de Garth envers la muséologie, les études en culture matérielle, l’histoire des transports et l’histoire publique. Au cours de sa carrière, il a contribué à la recherche dans ces domaines en publiant dans un grand nombre de revues. Il a dirigé, de 1991 à 2006, la section des comptes rendus anglais de la Revue d’histoire de la culture matérielle et, dans ce rôle, a contribué à étendre et améliorer le lectorat et la réputation de la revue dans le monde. Garth a également enseigné et organisé des séminaires et des ateliers dans le domaine des études en culture matérielle pour différents groupes. En 2004-2005, il a joué un rôle majeur dans l’organisation du Sommet de la recherche muséale de la Fondation des musées du Canada, qui a rassemblé des chercheurs des musées de tout le pays pour répondre aux défis auxquels est confrontée la recherche sur les collections. Ce fut un gigantesque succès. Garth a également organisé des conférences au Musée des sciences et des technologies du Canada, dont Le corps et la technologie (2004) et Transports et environnement (2008) – lors de la réunion annuelle de l’International Association for the History of Transport, Traffic and Mobility, T2M (Association internationale de l’histoire des transports, du commerce et de la mobilité).

8 Au cours de sa carrière, Garth fut un membre actif de plusieurs organisations qui ont toutes bénéficié de son intelligence, de sa créativité, de son dévouement et de sa droiture. Il fut conseiller de la Société canadienne pour la recherche nautique (SCRN) et membre des conseils d’administration de la Museum Small Craft Association (Association pour l’artisanat dans les musées) et de l’association canadienne Atlantic Challenge. Il fut également conseiller externe pour l’Adirondack Museum. Ces dernières années, il s’était beaucoup impliqué dans l’Association T2M, car il pensait que cette organisation pouvait apporter un élargissement des perspectives qui aurait été le bienvenu dans le domaine des collections liées aux transports. Au moment de sa mort, il était le vice-président de cette organisation.

9 L’engagement sans faille de Garth envers les musées et leurs collections était partagé par beaucoup de personnes, mais c’est la combinaison particulière de ses aptitudes et de ses intérêts qui était unique, et son absence nous pèsera cruellement. Son honnêteté, son intégrité, sa créativité et son intelligence sont irremplaçables. L’héritage qu’il nous a laissé est durable et sera un exemple pour les nombreuses personnes qu’il saura inspirer, en plus de nous rappeler tout ce que l’on peut accomplir lorsque l’on se consacre à atteindre les standards les plus élevés de la recherche muséale.

Reference
Wilson, Garth. 2008. Designing Meaning. Journal of Design History 21 (3): 237-57.