Éditorial
Culture visuelle et matérielle:
Contributions au récit du patrimoine national en contexte mondial

Jennifer Way
Guest Editor, University of North Texas

1 Les auteurs des sept articles présentés dans ce volume ont en commun la préoccupation d’examiner le thème du patrimoine national en contexte mondial. Ils sont conscients que « les histoires et les historiens ne jouent qu’un petit rôle dans le processus de réinterprétation continue des passés nationaux. Une grande variété d’autres médias et de genres jouent un rôle bien plus important dans la mise en forme des discours nationaux » (Berger 2008 : 71). Ils admettent également que d’autres genres et médias « prennent la place des valeurs essentielles [de la nation] et les symbolisent. Leur sens se construit au sein de la représentation, et non au-dessus ou en dehors  » (Hall 2005 : 25). Ce dernier concept a conduit à relâcher ce que Riello (2009 : 29) appelle « les strictes limites au sein desquelles les historiens lisent des documents dans des archives poussiéreuses, tandis que les historiens de l’art analysent les peintures et que les conservateurs de musées et les archéologues se penchent sur les objets ». La remarque de Belting (2005 : 314), à savoir qu’il est faux de concevoir que les médias interviennent d’eux-mêmes, mais plutôt qu’ils « coexistent à des niveaux dont les caractéristiques varient en fonction de leur position dans l’histoire », corrobore l’idée que les médias autres que les documents, les peintures et les objets archéologiques peuvent symboliser les valeurs d’une nation. Tout cela fait qu’il est possible d’envisager que la culture matérielle mérite d’être examinée sur le plan de sa contribution au tourisme culturel et au récit du patrimoine national. De plus, nonobstant que les «  autres genres et médias  » en dehors des textes donnent forme aux discours nationaux, les universitaires, dans leur ensemble, font preuve d’assez peu de zèle à étudier l’impact du tourisme culturel sur le patrimoine national en contexte mondial. Pour remédier à cette situation, en portant attention aux objets et aux boutiques d’artisanat, aux musées d’histoire locale, aux expositions artistiques, aux expositions nationales et patrimoniales, aux trésors familiaux, aux affiches, à la télévision, au cinéma, à l’espace public, à l’espace domestique, aux médias d’information, aux brochures, aux campagnes, aux sites, aux bâtiments, à la photographie et au montage patrimoniaux, les articles de ce volume de Material Culture Review/Revue de la culture matérielle examinent non seulement la culture matérielle, mais aussi la culture visuelle qui relie le proche au lointain, la nation et le souvenir, la nation et l’avenir, et les contextes nationaux, internationaux, transnationaux et mondiaux.

2 Il peut paraître évident d’étudier ensemble la culture matérielle et la culture visuelle, parce que le thème du récit de la nation et de son patrimoine en contexte mondial est « trop large ou trop complexe pour être convenablement abordé par une seule discipline » (Repko 2008 : 12). Inversement, nous réalisons peut-être que l’étude des interactions de la culture visuelle et de la culture matérielle nous amènera à mieux prendre en considération leur « intégration » et que cela produira des travaux qui seront « tout à la fois nouveaux, particuliers, distinctifs, et allant au-delà des limites de toute discipline et qui, donc, ajouteront à la connaissance » (6). De fait, un bon nombre des articles éclairent les circonstances dans lesquelles la culture matérielle et la culture visuelle se fondent nécessairement pour accomplir une tâche ou répondre à un besoin. Ainsi que le remarquent Watson et Waterton (2010 : 2), « nos connexions avec le passé sont dans une large mesure concrètes, ou détiennent une matérialité dont elles dépendent, qui fait d’elles des objets du patrimoine, et c’est la culture visuelle qui donne à ces objets les moyens de la représentation et la réalisation du sens ». En corollaire, la reconstitution de la matérialité peut impliquer de « traiter les photos comme des objets » et de « placer les photographies dans des lieux géographiques particuliers et dans leurs contextes sociaux et culturels » (Rose 2007 : 219) afin de saisir « comment les qualités matérielles d’une image interviennent dans le monde, en particulier le monde des gens » (220), et d’apprécier « de voir l’histoire par les yeux plutôt que d’essayer de comprendre les aspects olfactifs, tactiles, auditifs ou gustatifs du passé » (Smith 2008 : 20), alors que le présent méconnaît la matérialité de ses formes culturelles. À l’inverse, les articles de ce volume s’interrogent aussi sur la manière dont les aspects visuels de la culture, y compris le fait de regarder, de voir et d’être vu, non seulement découlent des formes matérielles qui les véhiculent, mais peuvent également les contredire.

3 En outre, nous devons également envisager la possibilité que le tourisme culturel et d’autres pratiques qui évoquent les nations peuvent intensifier ou affaiblir les connexions avec le passé alimentées par les images et les objets. Reste aussi la question de ce qu’apporte la narration aux relations entre la culture visuelle et la culture matérielle. Comme le dit Riello (2009 : 30), « les artefacts sont des entités multiples dont la nature et la valeur heuristique sont souvent déterminées par les divers niveaux de récits véhiculés par les historiens ». L’intérêt des auteurs se porte sur la manière dont les objets et les images contribuent au récit du patrimoine national. Les lecteurs, eux, s’intéresseront à un thème supplémentaire, à savoir la manière dont les auteurs détectent et traduisent la façon dont la culture matérielle et la culture visuelle contribuent à la narration.

4 L’objectif premier de ce volume est de remédier au peu d’attention que portent les chercheurs à la question de ce que la culture matérielle et la culture visuelle apportent au récit du patrimoine national en contexte mondial, et de susciter davantage de questions pour de futures recherches. Quels types de travail culturel et social les images et les objets, en relation les uns avec les autres, produisentils ? Comment la culture matérielle et la culture visuelle œuvrent-elles ensemble pour instaurer « les stratégies complexes de l’identification culturelle et de l’aptitude discursive qui fonctionnent au nom du "peuple" ou de la "nation" et qui en font les sujets et les objets immanents d’une grande variété de récits sociaux et littéraires ? » (Bhabha 1990 : 292). D’autres types d’intégration méritent aussi notre attention. Selon Edensor (2002 : 106), « dans l’insistance sur l’ubiquité sociale des relations être humain/objet, on avance qu’une partie de ce que signifie être un être humain est d’interagir avec des choses dans des mondes d’objets distincts ». Donc, qu’on la définisse comme un territoire géographique ou comme un état d’esprit, la nation, telle qu’elle est associée à la société, est impliquée dans la relation prégnante des « humains et des objets qui se combinent pour constituer des hybrides » (106). De plus, « les objets émergent en tant que médiateurs des relations sociales » (104). De même, la société « se fonde partiellement et se caractérise par les objets qui se transmettent entre les gens dans les transactions matérielles ordinaires de la vie quotidienne » (103).

5 Bien que chaque article détaille à sa manière la façon dont interagissent la culture matérielle et la culture visuelle, pris dans leur ensemble, ils dressent la topographie de l’activité culturelle marquée par l’interaction d’individus et de groupes qui utilisent la culture matérielle et la culture visuelle pour créer, modifier, détruire ou contribuer à soutenir, reconstituer ou se remémorer le patrimoine national dans son ensemble. Ils examinent la manière dont la culture visuelle et la culture matérielle créent des zones de contact dans lesquelles se connectent les sujets nationaux et les patrimoines, au sein des frontières nationales ou à l’extérieur de celles-ci. Ils réfléchissent aux façons dont la culture matérielle et la culture visuelle facilitent la mobilité du patrimoine national et alimentent, brouillent ou reformulent la mémoire nationale, l’identité, l’histoire et la tradition le long de sentiers mondiaux – si ce n’est transnationaux – tracés par l’exil, la migration ou le voyage, y compris pour les anciens émigrés et les communautés diasporiques. Sur n’importe lequel de ces points, les individus ou les groupes peuvent qualifier « les relations être humain/objet » de « formes d’expertise centrées sur l’objet… pratiques qui se transmettent à travers le temps au point que certaines aptitudes particulières se trouvent sédimentées dans des cultures particulières » (Edensor 2002 : 105), et dans les sociétés. De même, « les relations être humain/objet » et les types d’expertise associées aux objets peuvent connoter « des notions de valeurs [variant] considérablement entre les contextes culturels, notamment au sein des pays et entre eux » (110). Il est important de retenir que ces variations peuvent provoquer des tensions dans « les relations être humain/objet », lorsque « les marchandises mondiales sont domestiquées mais… qu’elles rivalisent également avec les productions locales » (112), ou lorsque les objets deviennent « "déplacés", à l’instar des gens » (114), ou lorsque « certains modes officiels d’organisation des choses en fonction de leur signification nationale… sont quelque peu décentrés, et sont complétés par des formes plus individuelles, affectives et sensuelles de relation avec les objets pour alimenter les mémoires » (117).

6 Tandis que ces articles s’engagent tous dans l’examen du thème du récit du patrimoine national en contexte mondial – décrivant l’artisanat ethnique ciblant le marché des touristes nationaux et internationaux ; l’histoire industrielle en tant que patrimoine post-industriel  ; les expositions muséales parlant de piété et de perte à des publics populaires ou cultivés ; le changement dans les approches de la narration des expériences de la migration ; les médias de masse qui font de l’espace domestique un patrimoine civil et national destiné à un public mondial ; l’autorité du patrimoine national dispersée dans la visualité ; et l’avenir d’une ville de l’ancien Bloc de l’Est par le biais d’une prestigieuse exposition artistique internationale – ils révèlent leur communauté de compréhension du récit de la nation, du patrimoine et du tourisme culturel. En passant en revue les interconnexions entre les concepts communs à ces articles, nous en viendrons à apprécier le sens de l’attention qu’ils portent à la culture matérielle et visuelle.

7 Tous les articles traitent de la narration comme étant ce qui représente ou véhicule quelque chose au sujet des évènements, des situations ou d’autres aspects pertinents du patrimoine national, ou qui en constituent des exemples, ce qui, dans ce cas, se définit comme paysage humain autant que comme environnement social, culturel et naturel, les objets, les images, les idées et les pratiques. En décrivant leurs recherches en Indonésie, au Portugal, au Canada et en Islande, en France, en Italie, en Angleterre et en Pologne – avec une attention particulière pour des régions spécifiques et des groupes ethniquement, socialement ou culturellement définis – les auteurs attestent de la pertinence du récit dans l’étude du patrimoine national, dans la mesure où «  la nation est une narration. Les histoires que nous nous racontons les uns aux autres au sujet de notre être et de notre appartenance nationale constituent la nation  » (Berger 2008  : 1). Les histoires que nous nous racontons au sujet de notre appartenance nationale révèlent que « ce que la nation "signifie" est un projet en cours, en constante reconstruction » (Hall 2005 : 25). De plus, à l’instar de Hall, les auteurs questionnent la nation en tant que « projet en cours » qui implique qu’une « identité nationale partagée… dépend des significations culturelles qui relient tous les membres individuellement à la grande histoire nationale » (24).

8 Les auteurs, en particulier, soulèvent la question de savoir qui, ou quoi, est susceptible de se détacher de la nation, dont ils comprennent que l’unité pourrait « n’être jamais pleinement réalisée, en partie parce que l’existence "des autres" reste nécessaire à la conceptualisation de la nation et en partie parce que l’unité de toute communauté est ébranlée par la présence de récits différents au sujet de la réalité, des traditions culturelles différentes et des identités sexuelles et ethniques différentes » (Kramer 1997 : 538). Cette opposition inclut des « conflits au sujet des récits rivaux qui cherchent à définir une communauté sociale » (537), ainsi que ce que Bhabha (1990 : 300) qualifie de « contre-récits » de la nation, qui « évoquent continuellement, et effacent, ses frontières totalisantes » – à la fois concrètes et conceptuelles – afin de « perturber ces manœuvres idéologiques par lesquelles des "communautés imaginaires" se voient attribuer des identités essentialistes ». Correspondant aux signes du pouvoir et à ce qui les contredit, les conflits et les controverses apparaissent dans ce qu’écrivent les auteurs : des artisans ethniques racontant d’une autre manière les identités locales et mondiales ; des mineurs et des habitants d’un village faussement représentés dans le patrimoine culturel ; une nation ou une région qui devient, dans les récits féminins de la migration et de l’installation dans un nouveau pays, une sublimation des expériences de perte et des traumatismes passés sous silence ; des médias électroniques créant une nouvelle mise en scène de l’histoire civile collective du passé ; la visualité conférant à la nation le pouvoir d’être sélective dans les récits patrimoniaux de son passé ; et la vision d’un avenir mis en spectacle au moyen d’un montage de l’histoire civile et nationale à l’intention d’un public international.

9 En associant la nation au patrimoine, ces articles abordent la définition du patrimoine à l’ère moderne, que Graham, Ashworth et Tunbridge (2000 : 2) qualifient « d’usage contemporain du passé ». Ce dernier est utilisé pour « découvrir, délimiter et donc nommer l’entité de base, la nation » ; par conséquent, il a fourni « les moyens permettant de gérer les variantes du récit national » (187). Ces articles portent également attention aux signes du pouvoir implicites dans le récit de la nation au moyen du patrimoine. En outre, leurs recherches démontrent que le patrimoine a « agi en tant que mécanisme de diffusion du nationalisme et d’autres discours chargés d’idéologies » (57), dans la mesure où, « lorsqu’ils s’approprient certaines constructions particulières du passé, certains groupes sociaux se trouvent privilégiés aux dépens des autres » (62). En relation avec ce dernier thème, les articles nous amènent à nous questionner sur la manière dont les États, les organisations et les groupes gèrent leurs histoires de la nation, y compris le « sentiment d’appartenance qui dépend de l’oubli autant que du souvenir, le passé étant reconstruit comme une trajectoire menant au présent national, afin de garantir un avenir commun » (60).

10 Ce volume, qui approche la nation par le biais du patrimoine, présente un autre aspect. Zuelow, Young et Sturm (2007 : 2) écrivent qu’en dépit de ce qu’Eric Hobsbawm et d’autres chercheurs ont affirmé quant à l’affaiblissement des nations, « de nombreux exemples indiquent que les nations, l’identité nationale et le nationalisme se perpétuent » ; de plus, « aucune communauté nationale au monde n’admet la démission de son caractère national distinctif – chacune persistant à se croire unique et à faire valoir des assortiments de caractéristiques nationales, de traditions et de localités exceptionnelles ». Ici, ces articles abordent le fait que ce qui est exceptionnel autant que ce qui est lieu commun au sujet d’une nation s’est instauré « dans la conscience de plus en plus vive que le tourisme et les loisirs étaient des contextes appropriés à la consommation publique du patrimoine » (Harvey 2008 : 30) et qu’il en est resté de même dans les contextes nationaux, alors qu’ils interagissent avec des contextes régionaux et mondiaux. Les chercheurs nous disent qu’il en est ainsi parce que la nation est prédominante dans le patrimoine tel qu’on le représente sur la scène mondiale. Selon Graham, Ashworth et Tunbridge, « la prédominance du national est à présent si totalement prégnante » que « toute discussion portant sur des patrimoines sub-nationaux, au niveau régional ou local, ou aux niveaux supranationaux des patrimoines en contextes continentaux ou mondiaux, doit sans cesse se référer à l’échelle nationale qui les complète ou les contredit » (2000 : 183). Kramer propose une autre voie, à savoir que le fait de raconter la nation au travers du patrimoine lui fait prendre des dimensions mondiales : l’identité nationale se développe en contexte supranational, « en fonction de ses différences avec les autres lieux ou les autres peuples » (1997 : 526). Dans son article, Jennifer Esperanza explore ce thème en partant sur les traces du façonnement de l’identité dans le travail des artisans ou des vendeurs d’objets d’artisanat en Indonésie, depuis le temps où les Hollandais utilisaient cet artisanat pour dominer l’identité de Bali à l’époque coloniale, jusqu’aux récents changements intervenus dans la production et la vente d’objets d’artisanat à Bali ; ces changements traduisent les aspirations des propriétaires de ces boutiques d’artisanat, à savoir atteindre leur propre caractère distinctif dans un cadre mondial ; et ces objets prennent en outre une autre signification pour les touristes qui s’attendent à ce que ceux-ci détiennent des types d’authenticité spécifiques reflétant un caractère national.

11 Les opportunités apportées par le tourisme culturel pour les relations entre le monde et la nation dépendent de l’intensification des connexions que Robins (1999 : 23) qualifie de « relocalisations », de « relations nouvelles et complexes entre l’espace mondial et l’espace local ». Dans le contexte du tourisme culturel et du patrimoine national, cellesci peuvent se développer à partir des dimensions économiques, sociales et culturelles des activités centrées sur le patrimoine ou reliées à celui-ci et qui impliquent des marchandises, des informations et des images. En outre, ce que l’on considère comme mondial est en lien avec la nation là où elle est active, représentée ou mise en marché, et avec les anciens émigrés et les immigrants potentiels. À l’inverse, le niveau mondial peut servir d’hôte aux « ambitions modernistes de la culture d’entreprise et de la nostalgie rétrospective de la culture patrimoniale » de la nation (Robin 1999 : 24) et à d’autres initiatives de mise en scène du patrimoine national dans l’arène supranationale. Il est intéressant de constater que plusieurs des articles explorent ces thèmes sous l’angle des expositions muséales et d’art contemporain. Maria João R. P. Silva analyse la réattribution d’une partie de l’histoire des mines industrielles de pyrite au Portugal, celles-ci ayant fourni du minerai de cuivre à la Révolution indus-trielle britannique. Elle analyse en particulier le travail économique, artistique, culturel et social des expositions muséales et artistiques qui présentent le travail dans la mine comme un patrimoine post-industriel destiné à attirer les touristes dans la région appauvrie du sud de l’Alentejo au Portugal.

12 Laurie Bertram, dans le cadre de sa recherche sur la nationalisation des récits des migrants, compare les spectacles du début du XXe siècle sur la différence ethnique des Islandais aux mouvements d’assimilation des Islandais du Canada effectués plus tard par le gouvernement canadien et les institutions culturelles, au moyen d’expositions d’objets patrimoniaux. De son côté, Maura Coughlin démêle les fils entremêlés de la piété, de la perte et du deuil dans les artefacts et les œuvres d’art décrivant l’histoire populaire et la vie quotidienne dans différents types de musées en Bretagne.

13 Selon la charte du tourisme culturel du Conseil international des musées et des sites (ICOMOS), « Le Tourisme culturel est celui qui a pour objet, entre autres objectifs, la découverte des sites et des monuments. Il exerce sur ceux-ci un effet positif considérable dans la mesure où, pour ses propres fins, il concourt à leur maintien en vie et à leur protection ». Cependant, et ce qui constitue peut-être la preuve de gestes d’appropriations de monuments et de sites pour déconstruire les effets positifs attendus d’eux, ainsi que l’observent Aitchison, MacLeod et Shaw (2000 : 24), « parallèlement aux monuments nationaux qui invoquent la mémoire collective depuis le sommet, nous voyons dorénavant une grande variété de monuments et de formes d’art publiques qui célèbrent la mémoire collective localisée et la résistance locale aux formes nationales de mémoire collective ». Plusieurs de ces articles en fournissent des exemples intrigants. Anne Toxey enquête sur les fortunes des récits locaux, imprimés à grande diffusion ou électroniques, au sujet des habitats troglodytes des Sassi di Matera, en Italie, alors qu’ils inscrivent, éludent ou révisent les expériences de ces grottes particulières à chaque génération, classe ou lieu. Alors que Watson et Waterton évaluent la manière dont le patrimoine, en Angleterre, autorise certaines conceptions de la nation, ils démontrent également de quelles manières les critiques sont susceptibles d’exposer, sinon de résister à, l’acceptation des composantes matérielles et visuelles de ces tendances à l’hégémonie. Keminska et Nesselroth-Woyzbun évaluent de manière critique la capacité de Varsovie à apparaître, non seulement comme un espace civil convaincant, mais aussi à prédire un avenir basé sur la longue tradition de réinvention du passé, comme les décrivent le photographe polonais Nicolas Grospierre et l’artiste Kobas Laksa dans leur montage photographique The Afterlife of Buildings, conçu pour la Biennale d’architecture de Venise.

14 Pour conclure, je souhaite exprimer ma gratitude aux rédacteurs pour avoir adopté ce thème pour ce numéro spécial, et adresser mes remerciements chaleureux à Marie MacSween pour son travail éditorial minutieux et l’aide sans faille qu’elle a apportée à ce projet depuis ses débuts, il y a plus de deux ans. Je vous invite à présent à suivre dans leurs explorations ces sept auteurs et leurs recherches fascinantes sur le thème du patrimoine national en contexte mondial.

Jennifer Way, Rédacteur en chef invité University of North Texas

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Note

1 See http://www.icomos.org/tourism/tourism_charter.html (accessed Nov. 12, 2010).