1 Dans cet ouvrage paru en 2007, l’auteur Guy Samson aborde la vie et la carrière de l’ingénieur et entrepreneur Bernard Lamarre. Né en 1931 à Chicoutimi, ce dernier est un personnage important de l’histoire québécoise de la seconde moitié du XXe siècle. Après des études à l’École Polytechnique de Montréal de 1948 à 1952 puis à l’Imperial College of Science and Technology de 1952 à 1955, Lamarre entreprend sa carrière au sein du bureau de génie-conseil Lalonde Valois à Montréal. Gravissant rapidement les échelons, il est nommé président-directeur général de l’entreprise en 1962. Cette firme devient le groupe Lavalin durant les années 1960. Lavalin est l’un des plus importants groupes de génie-conseil au cours des années 1960, 1970 et 1980, jusqu’à sa faillite en 1991 et son acquisition par SNC. Au sein de Lalonde Valois puis de Lavalin, Lamarre est impliqué dans plusieurs grands chantiers québécois de la seconde moitié du XXe siècle, parmi lesquels le pont-tunnel Louis-Hippolyte-Lafontaine, la Baie James et le Stade olympique. Il est en outre connu pour sa participation à plusieurs conseils d’administration, dont ceux de la Société du Vieux-Port de Montréal et du Musée des Beaux-Arts de Montréal. Nous lui devons également la mise sur pied de la collection Lavalin (aujourd’hui propriété du Musée d’art contemporain de Montréal).
2 Guy Samson n’est pas un biographe, un historien ou un historien du génie civil. Il a un parcours singulier, ayant œuvré dans plusieurs domaines, dont la fonction publique, le journalisme, l’édition et la photographie. Plus récemment, il s’est fait connaître comme auteur. En effet, Samson a publié plus de 20 ouvrages depuis 1996. Il aborde des sujets (psychologie populaire, technologie) et genres (essai, fiction, guide pratique, biographie) variés sous son nom ou sous des pseudonymes (Sybil Martin, Agatha Miller, Sean MacNeil, Henri Millaire, Philippe E. Dantès).
3 L’auteur ne prétend pas rédiger un ouvrage définitif sur Bernard Lamarre. Il présente plutôt, de manière brève et sans prétention, la vie et de la carrière de l’ancien président-directeur général de Lavalin, comme l’indique son préambule (page IV). Samson n’est pas le premier à traiter de Lamarre ou de Lavalin. En effet, l’entreprise a fait paraître, en 1986, l’ouvrage Lavalin : 50 ans (Montréal, Lavalin inc., 1987, 88), puis Carole-Marie Allard a publié, en 1990, le livre Lavalin : les ficelles du pouvoir (Chicoutimi, Éditions JCL, 1990, 317). Il existe également deux documentaires portant sur Bernard Lamarre. La plupart de ces sources traitent toutefois de la période antérieure à 1991, soit avant la faillite de Lavalin, laissant dans l’ombre les années 1990 et 2000. Samson actualise donc le sujet.
4 L’ouvrage Bernard Lamarre. Le génie d’une vie s’adresse à un public non spécialisé, comme l’indique son auteur. Bernard Lamarre et les entreprises qu’il a dirigées font partie de l’histoire récente du Québec. Lamarre et Lavalin ont souvent fait la une des journaux au cours de cette période. Ce livre est davantage un survol du sujet, aussi l’historien et l’historien du génie civil n’y trouveront-ils pas leur compte.
5 Samson travaille à partir d’un nombre limité de sources. Aucune source primaire ni publication d’époque (journaux, revues) n’ont été employées. Les principales sources secondaires utilisées semblent être Lavalin : 50 ans et Lavalin : les ficelles du pouvoir. L’auteur complète sa recherche par trois entretiens avec Bernard Lamarre réalisés en 2004. L’information recueillie est présentée de manière chronologique, et le volume traite autant de la vie professionnelle que personnelle de Lamarre. Certains passages sont franchement anecdotiques (Lamarre de garde pas un bon souvenir de devoir tuer les poulets durant son enfance, 13). L’auteur divise son ouvrage en neuf chapitres, qui couvrent la vie de Lamarre de sa naissance à ses activités des années 2000. Ces chapitres sont ensuite fragmentés en une infinité de points brefs dépassant rarement une page. Cette multiplication de sujets donne au livre une facture « question-réponse », un peu à la manière d’une entrevue dans un magazine.
6 Malgré plusieurs faiblesses, l’ouvrage Bernard Lamarre. Le génie d’une vie est la seule publication récente sur Bernard Lamarre. Il lève le voile sur les années qui suivent la faillite de Lavalin. En contrepartie, le livre apporte peu d’informations vraiment nouvelles sur la période antérieure à 1991. Il aurait mieux valu soit se concentrer exclusivement sur les années non couvertes par les publications précédentes, soit faire une recherche approfondie afin de livrer une analyse documentée de la période 1956-1990, soit encore dévoiler des aspects inédits. Force est de constater que la biographie définitive de Bernard Lamarre reste à faire.
7 L’approche chronologique et biographique de Samson ne favorise par ailleurs guère l’analyse et la synthèse. Des bribes d’informations sont présentées dans les multiples points, mais sans traitement ou lien entre elles. L’auteur ne suit d’ailleurs pas de manière très rigoureuse son approche, car les chapitres contiennent plusieurs allers-retour srompant la chronologie, voire quelques digressions. À titre d’exemple, dans le chapitre traitant des études de Lamarre à l’École Polytechnique puis en Angleterre, l’auteur reproduit une allocution de Lamarre prononcée en 1988 abordant, notamment, la question du suicide (48). Signalons en terminant que l’absence d’un index, les références incomplètes (la date de consultation des sites Internet ne figure pas), l’absence de sources pour appuyer plusieurs idées importantes et les différents points des chapitres qui ne sont pas présentés à la table des matières nuisent à la consultation rapide de l’ouvrage.