Front Matter

Editorial / Éditorial

Robin Inglis
North Vancouver Museum and Archives

1 Over the last 20 years Canada has developed a very sophisticated system of state museums in the sense that our institutions have been maintained with funds from one or more levels of government. This high level of funding from essentially one source, the taxpayer, has proven to be far from secure; the increasingly desperate economic climate of the late 1980s has blown the ill wind of "downsizing" and "restructuring" right through our major museums. Indeed, few of our institutions, either large or small, have escaped the major problems associated with funding cutbacks and efforts to maximize earned revenues.

2 In the ensuing struggle and scrutiny, the role of the curator has been much debated. Some have characterized the recent curatorial experience as one in which curators have lost both the responsibility for their collections to collection managers and conservators, and the authority over information and interpretation to project teams in which educators and exhibit designers dominate. This is perhaps an over-simplification, but there has been much consternation about the curator's diminished influence and the lack of appreciation of curatorial values and collection-based scholarship by administrators who "don't understand." Some of this concern is legitimate, but in the face of changing responsibilities and shifting alliances, one might have hoped that a greater number of curators would have grumbled less and engaged more in other activities, for example, some good, solid, collection-based research. But alas this has not been the case. Either through a lack of decisive focus or because of the demands of exhibit work or, more probably, expanded administrative responsibilities that make more "work" than progress, few curators of history have seemingly had the time — or have been able to make the time — to engage in material history research. This suggests that praiseworthy efforts like those of Anne Hayward, reflected in her article in this issue, are few and far between.

3 Important as this kind of research is, however, the sparseness of such work coming from museums need not be the cause of complete despair. While we often use the terms material history and material culture interchangeably, the latter implies a much wider field of endeavour than the former. Driven in the 1960s by the interests of social historians in particular, material history grew out of a long traditionof object-based study pioneered by archaeology and decorative arts connoisseurship. For a generation now, one of the central preoccupations of material historians has been the development of an academically convincing and acceptable methodology for drawing information out of artifacts. The study of material culture, however, aspires to much more than a somewhat limited concern with academic conformity; specifically, it addresses a whole range of issues and ideas beyond simple historical narrative.

4 If curators of history cannot be researchers, perhaps with renewed focus, they can find time to be facilitators, to seek out and be available to students and scholars of many disciplines and to share with them a sensitivity to, and a way of looking at, objects. Not only historians, but architects and designers, anthropologists, geographers and folklorists, as well as an increasing number of people involved in ethnic, gender and environmental studies, cry out for collaboration. The time commitment of history curators need not be overwhelming to be effective and rewarding. What seems clear is that researchers working in these other fields need to interact with people who understand not only the discipline of material history, but also the potential it has for material culture. Material culture studies will only grow in recognition and importance if they break the bounds of "history" and challenge disciplinary boundaries to reflect, in the words of Cary Carson of Colonial Williamsburg, "the story of people's growing dependence on inanimate objects to communicate their relationships with one another and to mediate their daily progress through the social worlds they inhabit."

5 Meeting in the fall of 1993, the Board members of Material History Review tried to identify a number of themes — "Women and Technology," "Housing," "War" — that might benefit from a multidisciplinary approach. Working with museum curators of history, of decorative arts, of anthropology and researchers in complementary fields may bring contributions to the journal that are both inventive and inspirational.

Robin Inglis,
Editor in Chief

6 Au cours des vingt dernières années, le Canada s'est doté d'un réseau de musées nationaux fort complexe en ce sens que ces établissements ont été financés par un ou plusieurs paliers de gouvernement. Ce degré élevé de financement puisant essentiellement dans une seule source, la poche des contribuables, s'est révélé loin d'être sûr. Le climat économique, qui n'a cessé de se détériorer à la fin des années 80, a engendré la compression des services et effectifs et une restructuration dans nos principaux musées. En fait, rares sont les établissements, grands ou petits, qui ont échappé aux graves problèmes associés aux coupures budgétaires et aux efforts déployés pour maximiser les recettes.

7 Durant la période de difficultés et de remises en question qui a suivi, le rôle des conservateurs a fait l'objet de bien des discussions. Certains estiment qu'au terme de l'expérience, les conservateurs ont perdu à la fois la responsabilité de leurs collections au bénéfice des gestionnaires et des restaurateurs, et l'autorité en matière d'information et d'interprétation au bénéfice d'équipes de projets dominées par des éducateurs et des concepteurs d'expositions. Il s'agit peut-être d'une simplification à outrance, mais cette perte d'influence et le fait que radministration « qui ne comprend pas » n'apprécie pas suffisamment les valeurs de conservation d'une collection et l'érudition fondée sur la collection sèment vraiment la consternation. Certaines de ces préoccupations sont justifiées. Mais, face à l'évolution des responsabilités et au nouveau jeu d'alliances, on aurait pu espérer qu'un plus grand nombre de conservateurs auraient fait contre mauvaise fortune bon cœur et réorienté davantage leurs activités, par exemple vers des recherches judicieuses et solides sur les collections. Malheureusement, cela n'a pas été le cas. Par manque d'esprit de décision, à cause des exigences des expositions ou encore, plus vraisemblablement, des tâches administratives accrues qui occasionnent plus de «travail » qu'elles ne font avancer les choses, peu de conservateurs d'histoire semblent avoir eu ou trouvé le temps d'entreprendre des recherches sur l'histoire de la culture matérielle. On peut donc supposer que les efforts louables, comme ceux d'Anne Hayward manifestes dans son article dans ce numéro, sont rares et espacés.

8 Toutefois, la rareté de ces recherches, si importantes soient-elles, ne doit pas nécessairement pousser au désespoir. Bien que nous utilisions souvent sans distinction les expressions histoire de la culture matérielle et culture matérielle, la deuxième renvoie à un secteur d'activités beaucoup plus vaste que la première. Pendant les années 60, sous l'impulsion des spécialistes de l'histoire sociale, l'histoire de la culture matérielle est née de la longue tradition d'études fondées sur les objets façonnés amorcée par l'archéologie et le travail des connaisseurs en arts décoratifs. Depuis une génération, les spécialistes de l'histoire de la culture matérielle s'efforcent de mettre au point une méthode acceptable et scientifiquement convaincante pour tirer des renseignements des objets de collection. Cependant, l'étude de la culture matérielle est loin de se limiter à un quelconque intérêt pour ce qui est universitairement conforme; elle englobe une gamme complète de sujets et d'idées qui dépassent le simple exposé des faits historiques.

9 Si les conservateurs d'histoire ne peuvent être des chercheurs, en se réorientant, ils pourraient devenir des facilitateurs, chercher des étudiants et des spécialistes dans de nombreuses disciplines, se mettre à leur disposition et leur inculquer une sensibilité aux objets, une manière particulière de les percevoir. Ce ne sont pas seulement les historiens qui réclament à grands cris la collaboration, mais aussi les architectes et concepteurs, les anthropologues, les géographes et les spécialistes du folklore ainsi qu'un nombre croissant de personnes engagées dans des études sur les groupes ethniques, sur les femmes et les hommes, et sur l'environnement. Les conservateurs d'histoire ne doivent pas nécessairement lui consacrer beaucoup de temps pour que leur travail soit efficace et gratifiant. Ce qui semble ressortir, c'est que les chercheurs dans ces domaines doivent entretenir des rapports avec les personnes qui comprennent non seulement l'histoire de la culture matérielle, mais aussi les possibilités que celle-ci présente pour la culture matérielle. L'étude de la culture matérielle sera vraiment reconnue et gagnera de l'importance seulement si elle sort du cadre de l'« histoire » et fait éclater les limites de cette discipline pour illustrer, comme l'écrivait Cary Carson de la Colonial Williamsburg Foundation, « la façon dont les gens sont de plus en plus dépendants des objets pour communiquer les liens qu'ils entretiennent entre eux et favoriser leurs progrès quotidiens au sein de leurs univers sociaux ».

10 Lors d'une réunion tenue à l'automne de 1993, les membres du comité de rédaction de la Revue d'histoire de la culture matérielle ont tenté de déterminer des thèmes qui pourraient bénéficier d'une approche pluridisciplinaire, par exemple « les femmes et la technologie », « l'habitation » et « la guerre ». Notre collaboration avec des conservateurs de musées d'histoire, d'arts décoratifs et d'anthropologie ainsi qu'avec des chercheurs travaillant dans les domaines complémentaires pourrait déboucher sur des articles aussi innovateurs que source d'inspiration.

Le rédacteur en chef,
Robin Inglis