1 Même si la publication de ce livre nous arrive avec beaucoup de retard (la recherche a été effectuée à la fin des années 60), on ne peut que féliciter l'auteur et la maison d'édition pour une telle publication. En connaissant l'importance de la pêche dans l'histoire du Québec, on constate que l'auteur vient d'offrir au grand public un ouvrage concernant les divers types d'exploitation des ressources animales offertes par le fleuve Saint-Laurent.
2 Le fait d'avoir concentré son étude sur un aspect bien précis de la technologie de la pêche, "l'acquisition ou plus précisément la capture des poissons et autres animaux aquatiques" (p. 6), s'avère un choix judicieux car une étude générale de la pêche sur le Saint-Laurent constitue une tâche difficile et de très longue haleine.
3 Le premier chapitre intitulé "Qu'est-ce que la pêche" sert d'introduction en nous donnant une définition générale de la pêche comme technologie d'acquisition et en nous présentant les facteurs - géophysiques, écologiques et socio-culturels - qui déterminent les formes de techniques utilsées.
4 Le deuxième chapitre "Classification des engins" s'avère très important du point de vue méthodologique car le reste du livre suit exactement la classification proposée. L'auteur nous fait une présentation critique des diverses classifications déjà existantes (Monod 1928, Kesteven 1949, Leroi-Gourhan 1943-1945, Morgan 1956) et finit par nous présenter la classification qui englobe à la fois les méthodes et les engins employés. L'auteur distingue deux méthodes: celle par attaque directe et celle par attaque indirecte. A l'intérieur de ces deux grandes catégories, il tient compte des divers types d'engins utilisés.
5 Les chapitres suivants - 3 à 6 - constituent le répertoire proprement dit. Chaque classe est présentée dans une perspective historique qui débute avec les Amérindiens et qui continue avec les engins utilisés par les Euro-québécois depuis le début de la colonisation à nos jours.
6 Pour réaliser ce mode de présentation, l'auteur emploie deux types de sources. D'autre part, il a étudié les sources écrites ethno-historiques les plus connues pour les XVI, XVII, XVIII et XIX siècles et les publications plus récentes se rapportant à la pêche. D'autre part, il a effectué une courte enquête ethnographique (deux mois et demi) en essayant de couvrir le plus possible le territoire a 1 etude - de Montréal aux Iles-de-la-Madelaine. Même si la démarche méthodologique n'est pas complète à cause de la courte période de temps, elle s'avère très intéressante à cause de la vue globale qui en résulte.
7 Au niveau des relations concernant les emprunts technologiques entre les Autochtones et les Euro-québécois, l'auteur reste au niveau des hypothèses vu le manque de sources qui se réfèrent à cet aspect. Un éclairage important pourrait être apporté par l'existence d'un bon inventaire des engins de pêche employés sur les côtes européennes, spécialement dans les pays d'origine de ces pêcheurs ou colonistes. Une comparaison entre les techniques et les engins développés sur place par les Amérindiens et ceux employés par les nouveaux arrivés peut apporter de nouvelles données.
8 Concernant la présence de certains engins de pêche chez les Amérindiens, l'explication diffusioniste nous semble assez simpliste car il existe la possibilité d'avoir un développement d'engins semblables dans des régions différentes sans nécessairement parler d'une diffusion à partir des centres principaux. On doit aussi souligner le fait que l'auteur utilise peu les données archéologiques. L'apport de l'archéologie peut s'avérer très important cour ce type d'étude.
9 Une remarque générale qu'on se permet de faire sans connaître les conditions dans lesquelles l'ouvrage a été publié: il nous semble que même si l'ouvrage a été rédigé dans les années 60, une mise à jour de la documentation aurait pu se faire avant la publication. Dans ce sens, je mentionnerais seulement l'article de Pierre Beaucage "Technologie de la pêche au loup-marin sur la côte Nord du Saint-Laurent" publié en 1968, et les données archéologiques et ethnologiques accumulées dans les années 1968-1976.
10 En conclusion, on peut dire que le livre de Marcel Moussette constitue un ouvrage de base pour la recherche en culture matérielle, un livre de référence pour les diverses catégories de chercheurs-archéologues, ethnologues, historiens, etc. En remarquant la bonne qualité des nombreuses illustrations et l'ampleur de la bibliographie, on peut dire que l'ouvrage doit constituer le point de départ pour une recherche multidisciplinaire qui devra aboutir à une compréhension globale du phénomène et du rôle important occupé par la pêche dans l'histoire du Québec.