La FJFNB a participé aux délibérations qui ont mené à la création des Jeux de la francophonie canadienne (JeuxFC) et elle organise la délégation du Nouveau-Brunswick pour ce plus grand rassemblement de la jeunesse francophone au Canada. Ce texte propose d’abord un retour sur la genèse des JeuxFC. Quoique le but des Jeux faisait et fait encore l’unanimité, différentes formules ont été mises de l’avant pour y arriver. La stratégie privilégiée par la FJFNB, qui mise sur l’excellence, représente l’un des pôles dans ce débat qui a abouti à une formule inédite pour les JeuxFC assurant leur succès continu tout en permettant aux associations jeunesse provinciales d’y participer selon des approches distinctes. Le but ici est de documenter les choix de la FJFNB dans ces délibérations comparativement à d’autres délégations aux JeuxFC et dans le contexte des prises de position qui orientent d’autres jeux francophones. L’étude de la stratégie néobrunswickoise en 2008 et en 2017, axée sur la performance tout en favorisant la sociabilité, souligne dans un deuxième temps quelques variations dans la continuité des principes qui guident la délégation vers ses objectifs. Le texte aborde, dans un troisième temps, l’expérience des participants du Nouveau-Brunswick aux JeuxFC de 2008 et de 2017. Ces adolescents ont manifestement profité de ces deux éditions pour raviver et itérer leur fierté francophone, pour se démarquer sur la scène sportive, artistique et du leadership, de même que pour échanger avec de jeunes francophones d’un bout à l’autre du pays.
The FJFNB participated in the deliberations that led to the creation of the Jeux de la francophonie canadienne (JeuxFC) and continues to organize the New Brunswick delegation for this largest gathering of Francophone youths in Canada. This text first provides a look back at the genesis of the JeuxFC. Although the goal of the games was and still is agreed upon, different formulas have been put forward to achieve it. The strategy favoured by the FJFNB, which focuses on excellence, represents one of the poles in this debate, which has led to a new formula for the JeuxFC that ensures their continued success while allowing provincial youth associations to participate with distinct approaches. The purpose here is to document the FJFNB’s choices in these discussions in comparison to other delegations to the games and in the context of the positions that guide other Francophone games. The study of New Brunswick’s strategy in 2008 and 2017, which focuses on performance while promoting sociability, then highlights some variations in the continuity of the principles that guide the delegation towards its objectives. The text then looks at the experience of New Brunswick participants in the 2008 and 2017 JeuxFC. These teenagers clearly took advantage of these two editions to rekindle and express their Francophone pride, to stand out on the sports, arts, and leadership scene, and to interact with young Francophones from across the country.
1 À titre de représentante de la jeunesse francophone du Nouveau-Brunswick au sein de la Fédération de la jeunesse canadienne-française (FJCF), la FJFNB a participé aux délibérations des années 1990 qui ont mené à la création des Jeux de la francophonie canadienne (JeuxFC). Dès leur première édition en 1999, elle se charge de l’organisation de la délégation du Nouveau-Brunswick pour ce plus grand rassemblement de la jeunesse francophone au Canada. De portée empirique, le présent texte propose d’abord un retour sur la genèse des JeuxFC, pour comprendre le contexte qui a incité les associations jeunesse en milieu francophone minoritaire à se doter d’un événement pancanadien pour promouvoir l’appartenance francophone, renforcer les liens entre les jeunes d’expression française dans l’ensemble du pays et mettre leurs talents en valeur. Quoique le but des Jeux faisait et fait encore l’unanimité, différentes formules ont été mises de l’avant pour y arriver. La stratégie privilégiée par la FJFNB, qui mise sur l’excellence, représente l’un des pôles dans ce débat qui a abouti à une formule inédite pour les JeuxFC assurant leur succès continu tout en permettant aux associations jeunesse provinciales d’y participer selon des approches distinctes. Mes travaux antécédents ont souligné les manifestations de cette opposition entre la reproduction du modèle sportif compétitif normatif et l’adaptation du sport organisé pour réaliser des objectifs identitaires dans la mise en œuvre de jeux francophones en milieu minoritaire (Dallaire, 2003b, 2007) de même qu’évoqué comment elle émerge dans la mise en œuvre des JeuxFC (Dallaire, 2010). Ce défi n’est pas particulier à la francophonie, mais relève plutôt de son statut minoritaire. En effet, des débats semblables ont émergé dans l’organisation d’autres jeux à vocation identitaire au Canada (Davidson, 2007; Paraschak, 1997). Le but ici est de documenter les choix de la FJFNB dans ces délibérations, comparativement à d’autres délégations aux JeuxFC et dans le contexte des prises de position qui orientent d’autres jeux francophones. L’étude de la stratégie néo-brunswickoise en 2008 et en 2017, axée sur la performance tout en favorisant la sociabilité, souligne dans un deuxième temps quelques variations dans la continuité des principes qui guident la délégation vers ses objectifs. Le texte aborde, dans un troisième temps, l’expérience des participants du Nouveau-Brunswick aux JeuxFC de 2008 et de 2017. Ces adolescents ont manifestement profité de ces deux éditions pour raviver et itérer leur fierté francophone, pour se démarquer sur la scène sportive, artistique et du leadership, de même que pour échanger avec de jeunes francophones d’un bout à l’autre du pays. Finalement, ce retour sur l’expérience de la délégation du Nouveau-Brunswick aux JeuxFC démontre que la FJFNB maintient un équilibre fragile, mais nécessaire, entre la compétition d’élite et la rencontre de l’autre pour mettre en place un milieu agréable et favorable à l’épanouissement des participants.
2 Quelques informations méthodologiques s’imposent avant de présenter les aspirations de la FJFNB et de la délégation du Nouveau-Brunswick dans le cadre des JeuxFC. L’analyse puise parmi les données émanant de diverses études menées depuis le début des années 1990. Elle s’appuie principalement sur les quatre sources suivantes : 1) la recherche ethnographique sur les Jeux de la francophonie canadienne de 2008 à Edmonton, incluant : l’analyse des documents de la FJCF, du comité organisateur et des délégations; 2) les entrevues1 avec des représentants de la FJCF et de la Commission d’enquête Vision d’avenir, les organisateurs des JeuxFC et les responsables des délégations; 3) les réponses de 82 des 89 participants du Nouveau-Brunswick à l’enquête par questionnaire; et 4) les entrevues avec 11 jeunes participants de cette même province. Les données recueillies lors de l’étude des JeuxFC de 2017, conduite sous l’égide de l’Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques2, sont aussi mises à profit, notamment les réponses de 44 des 99 participants du Nouveau-Brunswick à l’enquête tenue pendant les JeuxFC, de même que les réponses de 39 participants de la province au questionnaire administré six mois après les Jeux. Enfin, le dépouillement des archives de la FJFNB3 a aussi permis de dénicher des documents utiles pour mieux comprendre les objectifs, les stratégies et la composition des délégations du Nouveau-Brunswick en 2008 et en 2017.4
3 L’idée de mettre en place des jeux sportifs pour rassembler les jeunes francophones d’un océan à l’autre a émergé lors des travaux de la Commission nationale d’enquête sur l’assimilation, Vision d’avenir, menée par la Fédération de la jeunesse canadienne-française5 (FJCF) entre 1990 et 1992 (Dallaire, 2014; FJCF, 1992; Gervais, 1994). Préoccupés par les statistiques du recensement de 1986 démontrant des transferts linguistiques croissants vers l’anglais, les associations jeunesse provinciales vouées au développement des jeunes francophones en milieu minoritaire et regroupées au sein de la FJCF instituaient Vision d’avenir pour trouver des solutions afin de renforcer l’appartenance chez les jeunes, dynamiser la vie sociale et culturelle en français et assurer la survie des communautés francophones. Les JeuxFC sont l’aboutissement d’une des recommandations clés de Vision d’avenir qui connait encore un succès retentissant. Un jeune représentant au conseil de représentation de la FESFO ayant collaboré aux travaux de Vision d’avenir, plus tard devenu directeur général de la FJCF aux JeuxFC de 2008 témoigne :
4 Certes, les JeuxFC s’avèrent un projet phare de la FJCF qui réunit près de 1 000 adolescents tous les trois ans depuis 1999 pour des compétitions sportives, artistiques et de leadership. Cependant, quand l’idée a d’abord germé, il s’agissait plutôt d’instituer des jeux sportifs à l’image du modèle des Jeux de l’Acadie, tels qu’ils se déployaient au début des années 1990. Les jeunes commissaires de Vision d’avenir ayant été enthousiasmés par la présentation de la Société des Jeux de l’Acadie, et les membres du Conseil d’administration de la FJCF ayant été profondément touchés par leur expérience aux cérémonies d’ouverture de la Finale des Jeux de l’Acadie, des démarches ont rapidement été mises en place dans l’espoir de reproduire des jeux semblables dans les autres régions du pays pour culminer en une finale pancanadienne. C’est ainsi qu’une délégation de l’Ouest organisée par les associations jeunesse de l’Alberta, du Manitoba, de la Saskatchewan et de la Colombie-Britannique a pris part à la Finale des Jeux de l’Acadie en 1991 (Dallaire, 2003a). À leur tour, deux délégués de l’Ontario (un représentant de la FESFO et le directeur consultant de Franc-O-Forme6) y ont assisté en 1993.
5 Alors que les jeunes de l’Ouest canadien sont revenus enchantés de leur expérience et ont copié le modèle élite multisports des Jeux de l’Acadie pour mettre sur pied les Jeux francophones de l’Alberta en 1992 et les premiers Jeux francophones de l’Ouest en 1995, la FESFO a développé une formule alternative pour ses Jeux franco-ontariens établis en 1994. Ressemblant davantage à un festival jeunesse, ils regroupent des adolescents qui participent à l’un de plusieurs volets incluant le sport, les arts visuels, la musique, le cirque/amuseur public, l’improvisation et le leadership/quizz franco-ontarien. Les participants profitent d’une formation au début de la rencontre de quatre jours qui s’achève par des compétitions et une production sur scène qui déterminent les équipes qui seront décorées. La constitution des équipes s’éloigne également du modèle sportif dominant. Au lieu d’inviter des équipes représentant les écoles secondaires francophones dans un contexte de rivalité, la FESFO recrute un garçon et une fille de ces écoles pour chacun des volets et forme les équipes sur place, au début des Jeux, s’assurant de mélanger des jeunes provenant de chaque coin de la province. Ainsi, les équipes ne s’entraînent pas ensemble en préparation pour les Jeux franco-ontariens comme le font celles qui participent aux Jeux de l’Acadie, qui doivent d’abord remporter les jeux régionaux pour accéder à la Finale.
6 Alors que la FJFNB, Francophonie jeunesse de l’Alberta et d’autres associations jeunesse misaient sur le modèle, à deux paliers, axé sur l’élite sportive des Jeux de l’Acadie pour la création des JeuxFC, la FESFO luttait, au contraire, pour un rassemblement multidisciplinaire participatif favorisant la rencontre de l’autre et la coopération. Notons que chacune de ces options avait fait ses preuves comme formule aidant à mousser l’appartenance francophone et le développement de la jeunesse, que ce soit dans le cadre des Jeux de l’Acadie (Allain, 2007) ou des Jeux franco-ontariens (Asselin, 1995). Les jeunes au sein de la FJCF étaient confrontés à deux pôles divergents qui pouvaient, l’un et l’autre, mener au succès de l’entreprise. Force est de constater, cependant, que le modèle se rapprochant de la compétition d’élite présente des défis en milieu minoritaire (Dallaire, 2003b). Néanmoins, les organisateurs des Jeux de l’Acadie ont su les relever, année après année, de manière à établir une ambiance de sociabilité qui célèbre véritablement la jeunesse et la francophonie (Dallaire, 2007).
7 En outre, les fondateurs ont, au départ, refusé de distribuer des médailles individuelles, inventant plutôt des prix décernés aux délégations. Les organisateurs qui leur ont succédé ont éventuellement ajouté des reconnaissances individuelles, comme stratégie pour accroître les commandites et non pas pour se conformer aux normes du sport organisé, et demeurent vigilants dans leur souci de développement culturel des jeunes, plutôt que de tomber dans les pièges de la compétition à outrance. C’est ce qui les démarque des championnats sportifs réguliers et d’autres jeux de la jeunesse (Hanstad, Parent et Kristiansen, 2013; Kristiansen, 2015) et qui les distingue aussi d’autres jeux francophones n’ayant pas le même bassin démographique (Dallaire, 2020, 2003b).
8 Au bout du compte, les délibérations au sein de la FJCF ont abouti au compromis selon lequel les JeuxFC, d’une part, recrutent la majorité des participants pour concourir dans des disciplines sportives, mais s’ouvrent aussi à d’autres adolescents pour des compétitions artistiques et de leadership, deux domaines d’intervention usuels des associations jeunesse. Le vice-président du conseil de représentation de la FESFO, fondateur des Jeux franco-ontariens en 1992–1993, et directeur général de la FJCF au moment de la mise en œuvre des premiers JeuxFC en 1999 explique :
9 En effet, avant Vision d’avenir, les associations jeunesse n’étaient pas actives dans le domaine du sport, lequel relevait plutôt des écoles ou d’organisations dirigées par des adultes au service du sport et/ou des jeunes. Intégrer des activités sportives à leur programmation permettait aux associations jeunesse de partout au pays d’attirer une nouvelle catégorie d’adolescents et d’intervenir auprès d’eux. L’inclusion de jeux coopératifs pour favoriser le mélange de jeunes et la rencontre de l’autre est une deuxième caractéristique qui a été défendue par la FESFO et retenue pour les JeuxFC. Cette caractéristique a pris une place encore plus importante lors de l’édition 2008 des JeuxFC. La chef de mission du Manitoba en 2008, ayant d’abord vécu les JeuxFC en tant qu’employée de la FJCF au tournant des années 2000, puis comme chef de mission adjointe à l’édition de 2005, se souvient des efforts continus pour incorporer l’élément coopératif à la formule des JeuxFC :
Établir un espace qui encourage l’essor de nouvelles amitiés entre les jeunes de différentes régions du Canada est un objectif partagé par toutes les délégations, incluant celle du Nouveau-Brunswick.
10 D’autre part, les caractéristiques qui se rapprochent davantage des Jeux de l’Acadie sont la dimension compétitive des volets où les délégations s’affrontent de même que la reprise de la formule des prix de délégations pour atténuer les effets nocifs d’une rivalité exagérée. Le compromis entre la compétition sportive d’élite et le modèle multidisciplinaire participatif a été possible en raison des buts qu’avaient en commun les associations jeunesse. En effet, la FJCF incite ses membres à collaborer pour le bien de la jeunesse francophone. Comme l’expliquait le vice-président de la FJFNB, représentant au conseil d’administration de la FJCF en 2008 :
Cette collaboration entre les associations jeunesse s’avérait des plus nécessaires selon lui, étant donné l’ampleur de la mission de la FJCF :
Ainsi, malgré les approches divergentes, la collaboration a mené à une formule, d’abord unique aux JeuxFC, qui s’est révélée gagnante pour assurer non seulement le développement identitaire et culturel des participants, mais aussi la mise en valeur de leurs talents (Dallaire, 2010; Forgues, Thompson, Dallaire et Doucet, 2018). Des éléments de cette formule ont depuis été repris, notamment aux Jeux de l’Acadie et aux Jeux francophones de l’Alberta, qui ont ajouté non seulement des concours artistiques à leur programmation, mais aussi des jeux coopératifs.
11 L’abandon du projet de structure basée sur des jeux régionaux intégrant les événements existants comme les Jeux de l’Acadie pour aboutir à une finale pancanadienne a permis aux associations jeunesse provinciales et territoriales de créer les JeuxFC selon leurs intérêts, sans avoir à négocier par exemple, avec la Société des Jeux de l’Acadie. Elles ont par ailleurs entièrement pris en charge les délégations. Elles considèrent donc que c’est une entreprise « par et pour » les jeunes. Néanmoins, la mise en œuvre des JeuxFC s’appuie sur l’expertise d’individus qui ont fait leurs armes aux Jeux de l’Acadie, aux Jeux du Québec ou d’autres manifestations sportives ou artistiques. Dès la préparation de leur première édition à Memramcook au Nouveau-Brunswick, les organisateurs ont dû répondre à des attentes élevées en matière de professionnalisation visant à établir des critères rigoureux sur les plans organisationnel et technique. On voulait établir dès le départ une réputation enviable quant à la qualité du cadre des compétitions et du rassemblement jeunesse. Ces préoccupations étaient soulevées par le comité de sages (des experts du contenu des trois volets : sports, arts et leadership), par des partenaires potentiels comme des bailleurs de fonds et les fédérations sportives, de même que par des chefs de mission (nommés par les associations jeunesse). Selon le directeur général de la FJCF au moment de la mise en œuvre des premiers JeuxFC en 1999, ceux-ci ont rapporté que les jeunes souhaitaient un certain niveau d’expertise dans l’exécution des jeux (8 février 2001). Soulignons qu’un certain nombre de ces acteurs avaient vécu les Jeux de l’Acadie.
12 Ce souci de « bien faire les choses » qui oriente depuis 1999 le comité organisateur de chaque édition des JeuxFC se décline cependant différemment d’une association jeunesse à l’autre, en fonction des principes distincts qui guident la composition de l’équipe de mission et le recrutement des participants pour sa délégation. Ainsi, comme l’a souligné la directrice générale de la FESFO aux premiers JeuxFC (12 juin 2001), de même qu’une employée de la FESFO, membre de l’équipe de mission pour la délégation de l’Ontario en 2002 et 2005, puis chef de mission en 2008 (5 août 2008), l’Ontario accorde la priorité depuis 1999 à la coopération, et dans certains cas à l’initiation des adolescents à la discipline à laquelle ils prennent part, et elle fait une sélection parmi ses employés et les membres de son réseau d’animateurs pour former l’équipe de mission. À l’opposé, le Nouveau-Brunswick espère des victoires. Pour ce faire, la FJFNB recrute des entraîneurs experts de la discipline ainsi que des athlètes, artistes et leaders chevronnés, ce qui lui a mérité le Prix du Drapeau à la première édition des JeuxFC. Ce prix célèbre la délégation ayant accumulé le plus haut pointage au classement général, au-delà du nombre de médailles.
13 D’autres délégations de la francophonie minoritaire, comme celle du Manitoba, se situent quelque part entre ces deux pôles, favorisant le dépassement de soi du participant, sans établir d’objectif de médailles (ancienne employée de la FJCF, chef de mission adjointe pour le Manitoba en 2005, chef de mission de la délégation du Manitoba en 2008, 27 juillet 2008).
14 La prochaine section se penche sur le déploiement de l’orientation privilégiée par le Nouveau-Brunswick, qui a de nouveau remporté le prix du Drapeau en 2008 ainsi qu’en 2017.
15 C’est dans sa lettre de mise en candidature que le chef de mission proposait pour la délégation de 2008, une vision mariant la dimension compétitive avec une dimension d’échanges et de sociabilité qui réduit la propension à la rivalité. Ancien directeur général de l’association jeunesse, membre de l’équipe de mission en 1999 et chef de mission aux deux éditions suivantes, il profitait d’une longue expérience à la FJFNB et aux JeuxFC et maintenait le cap sur l’approche adoptée par le Nouveau-Brunswick dès 1999. Celle-ci favorisait la performance tout en tirant parti de la « chance inouïe de fraterniser avec des jeunes de partout au Canada », et de manifester la fierté acadienne et francophone.
16 Cependant, pour la première fois, on planifiait la délégation près de deux ans à l’avance, avec la nomination du chef de mission et l’affichage pour les postes d’adjoints dès octobre 2006, afin de mettre en place un recrutement devancé et plus structuré ainsi qu’un programme de développement prolongé des participants. Puis, en janvier 2007, la FJFNB embauchait un consultant pour concevoir le plan stratégique et développer de nouveaux partenariats avec les associations sportives provinciales, dont la Fondation des Jeux de l’Acadie, Athlétisme Nouveau-Brunswick, Volley-ball Nouveau-Brunswick, l’Association des sports en chaise roulante du Nouveau-Brunswick, le Centre d’excellence des entraîneurs du Nouveau-Brunswick et Badminton Nouveau-Brunswick. À ces intervenants s’ajoutaient le département d’arts visuels de l’Université de Moncton et l’Association acadienne des artistes professionnel.le.s du Nouveau-Brunswick (AAAPNB).
17 De toute évidence, on tissait des liens avec les spécialistes afin de mettre en place les stratégies nécessaires pour réaliser les ambitions de performance dans tous les volets de compétition. D’ailleurs, on profitait de ces réseaux associatifs, sportifs et scolaires pour diffuser les divers affichages et pourvoir les postes au sein de la délégation avec des individus ayant acquis l’expérience convoitée. Par exemple, le chef de mission adjoint responsable du volet sports en 2008 avait œuvré plusieurs années à la Société des Jeux de l’Acadie, portant notamment le dossier de la programmation sportive des Jeux ainsi que le dossier du développement des comités régionaux. De plus, le plan stratégique proposait de mettre l’accent sur le réseau du sport scolaire francophone pour recruter des entraîneurs ayant non seulement de l’expérience, mais aussi les certifications sportives nécessaires. Ainsi, l’entraîneur de badminton revenait au sein de l’équipe de mission pour une deuxième édition des JeuxFC et il avait dirigé des équipes aux Jeux de l’Acadie pendant une dizaine d’années. On prévoyait aussi établir des partenariats avec les associations sportives dans les disciplines ayant peu d’entraîneurs francophones certifiés, afin d’offrir les formations nécessaires, notamment en basket-ball.
18 En mai 2007, la FJFNB assignait une coordonnatrice à temps plein à l’encadrement de la délégation, et en juin 2007, la nomination des entraîneurs était terminée. Une première réunion de l’équipe de mission et d’entraîneurs avait lieu en août, durant laquelle s’est fait un retour sur l’historique des JeuxFC et la mission de la délégation, de même que sur la planification des activités de sélection des participants. Le recrutement rigoureux des athlètes débutait à l’automne 2017, en partenariat avec les associations sportives, et comprenait non seulement un recrutement lors de tournois et de manifestations sportives, mais aussi des camps de sélection, des entraînements et des tournois de préparation avant les JeuxFC. La délégation et la FJFNB ont été confrontées durant cette phase à un dilemme récurrent dans le sport compétitif qui se manifeste de façon prégnante en milieu minoritaire, c’est-à-dire la nécessité de choisir soit le « meilleur athlète », soit celui qui rencontre tous les critères de sélection, incluant les exigences relatives à l’objectif de développement communautaire (Dallaire, 2003b). Un entraîneur demandait, en effet, d’inclure un athlète francophone talentueux évoluant dans le système scolaire anglophone, alors que la politique de sélection de la FJFNB ciblait les adolescents inscrits dans le réseau scolaire francophone. Les Jeux de l’Acadie avaient aussi, des années plus tôt, fait face à des procédures intentées devant la Commission des droits de la personne par un parent du Nouveau-Brunswick, qui revendiquait l’accès pour son enfant « acadien » à ce mouvement sportif même s’il fréquentait une école anglophone. Dans les deux cas, l’objectif d’appui aux institutions de la communauté a eu préséance, et la participation a été limitée aux élèves fréquentant l’école de la minorité. Le directeur général de la FJFNB de l’époque explique :
D’autres délégations ne profitant pas d’un réseau scolaire francophone aussi étendu se trouvaient devant un dilemme différent : le choix entre l’adolescent qui peut le mieux s’exprimer en français et l’athlète le plus talentueux qui n’a pas les capacités linguistiques nécessaires pour profiter du rassemblement jeunesse francophone. Certaines délégations recrutent à la fois dans les écoles d’immersion et les écoles francophones afin d’assurer une pleine délégation.
19 Le recrutement de jeunes leaders et de participants en arts visuels était complété en janvier 2008, ce qui s’est fait en mettant aussi l’accent sur l’excellence démontrée par les jeunes, tout en respectant l’insertion scolaire francophone. Les jeunes en arts visuels avaient au préalable soumis un portfolio évalué par des artistes professionnels ainsi que des professeurs du Département d’arts visuels de l’Université de Moncton. Les apprentis artistes retenus recevaient ensuite une formation. Par ailleurs, les gagnants du concours scolaire de musique « Accros de la chanson », organisé par la FJFNB, et les gagnants de la Gougoune Dorée, compétition scolaire provinciale d’improvisation, méritaient automatiquement leur place dans la délégation et profitaient d’un encadrement offert par Musique Nouveau-Brunswick pour les premiers, et par des joueurs de la Ligue d’improvisation du Centre universitaire de Moncton (LICUM) pour les seconds. Enfin, les troupes de danse formées de jeunes francophones étaient invitées à prendre part à une compétition, et la troupe gagnante intégrait la délégation.
20 Ce virage de la FJFNB visant à professionnaliser la préparation de la délégation coïncide d’une part avec des efforts semblables à la FJCF, qui embauchait en 2007 une coordonnatrice nationale pour les JeuxFC afin d’appuyer le comité organisateur (CO) et de faciliter la communication avec les délégations et la FJCF. Cette expansion de l’équipe d’employés permanents de la FJCF, par l’intégration d’une spécialiste ayant œuvré dans le milieu associatif sportif et au sein d’équipes de mission (Jeux du Canada, Jeux paralympiques), a favorisé le développement d’une expertise spécifique aux aspects organisationnels et protocolaires des JeuxFC, la conception d’outils tels que des devis techniques, des cartables/guides pour les chefs de mission/délégations et une trousse pour les médias, autant de choses qui ont apporté une cohérence dans la mise en œuvre des jeux depuis l’édition de 2008. D’autre part, les efforts de professionnalisation de la délégation du Nouveau-Brunswick s’arrimaient aussi avec les aspirations du CO d’Edmonton qui planifiait, par exemple, offrir des compétitions sanctionnées par les fédérations sportives nationales.
21 Les processus améliorés de sélection et de préparation des membres de la délégation ont permis au Nouveau-Brunswick de monter sur le podium dans toutes les disciplines artistiques et dans la plupart des disciplines sportives. Ses médailles dans 48 des 68 disciplines en compétition lui ont mérité le prix du Drapeau (qui se nommait, à l’époque, le prix du Flambeau). Ayant remporté le prix de la Francophonie aux JeuxFC de 2005, la délégation s’était aussi engagée à « défendre notre titre avec succès » à Edmonton. Lors d’une réunion de l’équipe de mission, on expliquait que ce prix s’apparente au Prix de l’amitié des Jeux de l’Acadie et qu’il s’agissait donc de manifester sa fierté francophone tout en démontrant un esprit de camaraderie afin d’instaurer une ambiance unique et agréable. Cette reconnaissance lui a toutefois échappé, au profit de l’Ontario. Néanmoins, le fait de sensibiliser les entraîneurs à la signification de ce prix, de même qu’à l’importance de faire preuve d’un esprit sportif exemplaire dénote que les espoirs de remporter des médailles de la délégation ne devaient pas nuire aux objectifs de sociabilité et de célébration de la jeunesse et de la francophonie. Comme le spécifiait le code d’éthique de la délégation, il ne s’agissait pas de gagner à tout prix :
22 Comparativement à la délégation du Nouveau-Brunswick de 2008, celle de 2017 se distingue, d’une part, par le fait que l’équipe de mission et d’entraîneurs est en renouvellement, et, d’autre part, par le fait qu’elle est dirigée par de jeunes adultes qui ont d’abord vécu les JeuxFC à titre de participants, la plupart lors de l’édition 2008, à Edmonton. Leurs parcours biographiques témoignent de ce nouveau regard, de même que leur familiarité avec les particularités de ce rassemblement jeunesse. Notons d’abord que le directeur général de la FJFNB en 2017 avait participé dans la discipline des médias du volet leadership à Edmonton, agissant à titre de rédacteur des Mots de jeux en 2008, en plus de prendre part à diverses activités de la FJFNB, dont le Parlement jeunesse. Alors qu’il poursuivait des études universitaires en communication, il est devenu chef de mission adjoint en leadership pour la délégation de 2014, pour prendre ensuite la direction de l’association jeunesse en 2016. De son côté, le chef de mission en 2017 était un ancien membre du conseil de direction de la FJFNB et du conseil d’administration de la FJCF. En 2008, il participait à ses premiers JeuxFC et remportait une médaille d’or en improvisation. Adepte aussi de sport compétitif, il avait ensuite évolué comme capitaine de l’équipe d’athlétisme de l’Université de Moncton et continuait d’intervenir comme entraîneur d’athlétisme au moment d’intégrer l’équipe de mission pour les JeuxFC de 2011 à titre d’employé de la FJFNB. Par la suite, il est devenu chef de mission pour l’édition 2014, à Gatineau. Les chefs de mission adjoints étaient nouveaux, mais le responsable du volet sports avait pris part aux JeuxFC de 2008 en improvisation. Une courte biographie le décrit comme un joueur de hockey, de squash et de soccer, sans faire de lien avec les Jeux de l’Acadie, ce qui le démarque de son prédécesseur de la délégation de 2008. La plupart des entraîneurs joignaient la délégation de 2017 pour la première fois dans ce rôle, mais quelques-uns avaient vécu les JeuxFC comme participants, et plusieurs avaient acquis de l’expérience comme entraîneurs aux Jeux de l’Acadie. Par exemple, l’entraîneur de badminton, un athlète médaillé (argent et bronze) aux JeuxFC de 2008, comptait plus de cinq années d’expérience comme entraîneur aux Jeux de l’Acadie et dans un club de badminton, en plus d’avoir été responsable du tournoi de badminton à la Finale des Jeux de l’Acadie en 2016. L’un des trois entraîneurs d’athlétisme avait pris part aux Jeux de l’Acadie et aux JeuxFC comme compétiteur avant d’évoluer au sein de l’équipe compétitive universitaire comme capitaine, tandis qu’un deuxième avait en plus pris part aux Jeux du Canada et aux championnats canadiens après avoir remporté une médaille d’argent aux JeuxFC de 2011. Le troisième œuvrait comme entraîneur d’athlétisme au niveau universitaire et avait participé comme athlète aux JeuxFC de 2005 à Winnipeg, aux Jeux du Canada et aux Jeux de la francophonie internationale. L’entraîneure en arts visuels, artiste compétente par sa formation, ses prix remportés et ses vernissages, avait remporté des médailles d’or et d’argent à Edmonton en 2008. Enfin, un des entraîneurs de volley-ball comptait plusieurs années d’expérience dans le réseau scolaire de même que dans les clubs, en plus de contribuer au programme élite de Volley-ball Nouveau-Brunswick, tandis que son adjointe était une ancienne athlète au niveau universitaire, membre de l’équipe nationale et entraîneure dans des clubs, en plus d’agir comme arbitre dans des championnats et aux JeuxFC de 2011.
23 Ces exemples confirment que, comme en 2008, la FJFNB privilégiait sans aucun doute le recrutement d’experts dans les diverses disciplines. Par ailleurs, le calendrier des activités de la délégation démontre qu’on planifiait encore une fois la sélection des entraîneurs et des participants des mois à l’avance afin d’assurer une formation adéquate des participants, car la délégation de 2017 s’était donné comme objectif de hausser son classement par rapport au pointage. Elle a dépassé ses aspirations en remportant le prix du Drapeau pour une troisième fois avec des médailles dans 45 des 77 disciplines, y compris cette fois des médailles dans le volet leadership. Comme en 2008, le Nouveau-Brunswick ne misait pas uniquement sur l’excellence, mais valorisait aussi le développement des amitiés et la célébration des cultures acadienne et francophone, avec comme deuxième objectif de décrocher le prix de la Francophonie, décerné plutôt au Manitoba. Cela étant dit, le compte rendu de la première rencontre de l’équipe de mission et des entraîneurs est révélateur de l’approche de la FJFNB, qui n’avait pas oublié sa mission première :
24 La délégation valorisait non seulement le développement d’amitiés entre les jeunes, mais aussi la mission francophone de l’entreprise. Contrairement au rapport de la délégation de 2008, qui se disait satisfaite des efforts du CO d’Edmonton pour trouver des arbitres francophones dans un contexte budgétaire difficile ayant débouché sur l’inclusion d’officiels ne parlant pas français, le rapport final de la délégation de 2017 déplore le manque d’arbitres francophones dans certaines disciplines sportives. Alors que tous les membres de la FJCF s’entendent sur la capacité de s’exprimer en français comme critère crucial et non négociable du recrutement des participants, les pressions pour combler les postes d’arbitres par des officiels certifiés, conjuguées au contexte démographique de la francophonie canadienne, font que cet enjeu demeure le tendon d’Achille des JeuxFC d’une édition à l’autre, mettant carrément en opposition les normes du sport d’élite (Donnelly, 1996) et les objectifs de développement de la francophonie. C’est ce qui les différencie aussi des Jeux de l’Acadie (Dallaire, 2007, 2010). Le renouvellement de l’équipe de mission et des entraîneurs avec l’arrivée d’anciens participants des Jeux FC a permis à la délégation de la FJFNB de 2017 de maintenir le cap sur ses aspirations d’excellence jumelée à une ambiance francophone et amicale tout en poursuivant les améliorations aux pratiques organisationnelles initiées en 2008 pour rehausser le recrutement et la formation des participants.
25 Un survol des données recueillies auprès des jeunes de la délégation aux JeuxFC de 2008 et de 2017 révèle que la FJFNB a réussi à jumeler l’excellence de la performance dans les différents volets et la rencontre de l’autre, pour offrir un cadre garantissant le plaisir des participants. Comme le rapportait le chef de mission de la délégation de 2008 lors d’un exercice de réflexion sur les JeuxFC l’automne suivant l’édition d’Edmonton, « il ne faut pas oublier et on ne peut pas mettre assez d’accent : les jeunes ont eu le fun de leur vie ! » (notes d’observation, Comité consultatif des Jeux de la francophonie canadienne, 6 octobre 2008). C’est du moins ce que les participants répétaient à l’équipe de mission durant le voyage de retour.
26 Leurs réponses à l’enquête pendant l’événement soulignent effectivement le plaisir qu’ils en ont retiré. Notons toutefois, que le taux de 14,2 % pour les répondants de la délégation du Nouveau-Brunswick à la question sur ce qu’ils aiment le plus des JeuxFC est semblable à la moyenne de l’ensemble des répondants (16 %) (voir le Tableau 1 et Dallaire, 2010). Leur appréciation du caractère francophone des JeuxFC, établie à 32 %7, est inférieure à la moyenne de tous les répondants (37 %), alors que leur appréciation des volets, établie à 35 %8, est supérieure à la moyenne (30 %), mais inférieure aux résultats de la délégation du Québec (40 %). Ces statistiques descriptives indiquent que les réponses des participants de la délégation de la FJFNB se situent d’un côté, entre celles des jeunes provenant des autres délégations où la francophonie est en situation minoritaire et qui valorisent davantage de façon explicite la dimension francophone des JeuxFC et, de l’autre côté, les réponses des participants québécois qui sont attirés surtout par la chance de déployer leurs talents dans leur volet respectif.
27 Ces réponses n’indiquent pourtant pas que les participants du Nouveau-Brunswick se sont moins amusés que les autres, mais plutôt qu’ils ont davantage profité de leur expérience dans leur volet comparativement aux autres jeunes. Cela n’est pas étonnant dans un contexte où la sélection d’athlètes, d’artistes et de leaders chevronnés et la préparation technique pour leurs compétitions prenaient une aussi grande importance dans la délégation que la célébration de la francophonie et le plaisir de la rencontre. En effet, les jeunes ont précisé que leur motivation première pour prendre part aux JeuxFC était reliée à leur discipline (35 %)9, un taux de réponses inférieur à celui des jeunes du Québec (40 %) mais similaire à celui des autres délégations qui ont des liens avec les Jeux de l’Acadie qui favorisent aussi le développement des talents sportifs, artistiques et de leadership (entre 32 % et 34 % pour les autres jeunes de l’Atlantique) (Dallaire, 2010). Effectivement, une participante en badminton nous a expliqué en entrevue qu’elle voulait participer aux JeuxFC :
Une participante en athlétisme était aussi motivée par le caractère francophone de l’événement :
En effet, les jeunes de la délégation du Nouveau-Brunswick reconnaissaient certainement le caractère distinctif des JeuxFC, qui pour eux représentent, d’abord et avant tout, un rassemblement francophone visant à favoriser les rencontres (57 % des réponses10) dans un cadre tout aussi amusant (plaisir, 14,2 %) qu’unique et spécial (13 %) (voir le Tableau 1). Par exemple, certains décrivaient le but des JeuxFC ainsi :
Un participant au basket-ball en fauteuil roulant a par ailleurs expliqué que les JeuxFC lui apportaient :
Une participante en athlétisme ayant participé cinq fois à la Finale des Jeux de l’Acadie a aussi souligné que l’événement représentait avant tout l’occasion de faire des rencontres et de célébrer sa fierté acadienne :
En d’autres mots, les participants n’insistent pas nécessairement sur la dimension compétitive pour décrire les JeuxFC, bien que ce soit principalement la chance de concourir dans leur volet qui les a attirés à l’événement.
28 Les participants de la délégation du Nouveau-Brunswick aux JeuxFC de 2017 ont vécu des expériences semblables face au caractère francophone du rassemblement qui mise sur les rencontres entre participants et sur une ambiance amicale et festive pour mousser leur appartenance. Les résultats du sondage réalisé pendant l’événement révèlent que 80 % des jeunes répondants du Nouveau-Brunswick avaient établi des liens solides avec des participants d’ailleurs au pays et que 98 % des répondants avaient accru leur fierté francophone. Pour expliquer leur réponse, ces derniers ajoutaient des commentaires comme :
Tous s’étaient sentis libres de s’exprimer en français et n’hésiteraient pas à recommander à un ami de prendre part aux JeuxFC. Comme en 2008, les jeunes du Nouveau-Brunswick en avaient aussi largement profité pour développer et exercer leurs talents (sportifs, artistiques et de leadership) (98 %) avec des réponses récurrentes évoquant les efforts stratégiques de la délégation, telles que :
Bien sûr, leurs réactions à la question de savoir ce que les JeuxFC leur avaient le plus apporté dans leur volet mettent l’accent sur l’apprentissage technique :
Cependant, leurs réponses apportent aussi d’autres dimensions tel que les rencontres, l’appartenance francophone et le contentement :
Les participants répondaient au questionnaire administré six mois après les JeuxFC qu’ils étaient satisfaits de leur participation aux JeuxFC, en faisant principalement référence à la francophonie et aux échanges :
Ils ajoutaient aussi que les Jeux avaient eu un impact sur leur appartenance francophone en expliquant que :
D’autres soulignaient que leur identité francophone était déjà vigoureuse avant de vivre l’événement :
En somme, les participants du Nouveau-Brunswick confirment que l’encadrement offert par la FJFNB, l’équipe de mission et les entraîneurs a contribué à atteindre les buts des JeuxFC en 2008 et en 2017. Le recrutement tôt leur a permis de bénéficier de l’expertise des entraîneurs de même que des activités d’entraînement et de formations pour bien se préparer à exercer leurs talents et ainsi vivre des expériences agréables lors des compétitions, tout en profitant du rassemblement pour renforcer leur identité francophone. C’est la délégation qui réussit peut-être le mieux à marier ces deux objectifs avec autant de succès quant à l’équilibre atteint dans les attentes et les appréciations des jeunes.
29 L’approche privilégiée par la FJFNB n’est pas sans écueils, ceux-ci découlant principalement de l’application des principes du sport d’élite. La délégation du Nouveau-Brunswick a cependant réussi à remporter le prix du Drapeau sans nuire aux qualités uniques des JeuxFC, qui servent à établir une ambiance inclusive, amicale et agréable plutôt qu’une rivalité associée au principe de « gagner à tout prix », nuisible au renforcement des liens entre francophones. Pour ce faire, l’association jeunesse met à profit une situation démographique et géographique relativement avantageuse pour les francophones de la province, ce qui permet de soutenir un niveau plus élevé de complétude institutionnelle et une vitalité communautaire (Forgues, 2014; Landry et Allard, 1994; Langlois et Gilbert, 2010). D’une part, cela favorise les pratiques culturelles et linguistiques qui nourrissent l’appartenance acadienne et francophone (Aunger, 2010; Bourhis et Landry, 2012), notamment chez les jeunes (Allard, Rodrigue et Deveau, 2005; Deveau et Landry, 2006), et d’autre part, cela permet une performance rehaussée grâce à l’expertise développée par les nombreuses personnes qui œuvrent dans ce réseau d’infrastructures communautaires. Toutefois, sa capacité à atteindre les objectifs fixés n’est pas seulement le résultat d’un contexte sociodémographique plus propice que celui des autres délégations en contexte minoritaire. L’analyse des intentions de la délégation du Nouveau-Brunswick en 2008 et en 2017 démontre que son succès découle aussi d’une vigilance et des efforts soutenus de la part de la FJFNB, et ce, depuis la conception des JeuxFC, pour faire en sorte que ses démarches soient conséquentes et qu’elles contribuent à la réalisation de sa vision voulant que « la jeunesse francophone et acadienne s’affirme fièrement dans sa langue et sa culture » (FJFNB, sans date).