Le texte qui suit est adapté d’une allocution que j’ai prononcée devant la Commission sur la réforme électorale du Nouveau-Brunswick le 27 janvier 2017. Mon intervention portait sur l’âge minimum pour voter au Nouveau-Brunswick, et résumait les raisons pour lesquelles la Fédération des jeunes francophones du Nouveau-Brunswick souhaite que cet âge soit abaissé à 16 ans.
1 La Fédération des jeunes francophones du Nouveau-Brunswick (FJFNB) est un organisme à but non lucratif dont la mission est de promouvoir et de défendre les intérêts de la jeunesse acadienne et francophone de la province. Elle a été créée en 1971 et célèbre en 2017 son 45e anniversaire. La Fédération opère selon un mode de fonctionnement par et pour les jeunes, et souhaite contribuer à un avenir où la jeunesse acadienne et francophone s’affirme fièrement dans sa langue et sa culture au sein de la société.
2 La FJFNB compte cette année environ 8700 membres, regroupant les élèves des 22 écoles secondaires francophones de la province.
3 En tant que jeune engagée et à titre de présidente de la FJFNB, je veux me pencher sur une question chère à nos membres, soit l’accès au vote à partir de l’âge de 16 ans.
4 La réduction de l’âge minimum du vote à 16 ans, question à l’étude par la présente commission, est un moyen efficace pour éliminer les obstacles à l’entrée en politique pour les jeunes, un groupe actuellement sous-représenté en politique, tout en permettant d’accroitre la participation à la démocratie, un des objectifs mentionnés dans son mandat.
5 J’espère donc que notre présentation saura convaincre la commission de revoir l’âge minimum du vote. J’attire également l’attention sur la prise de position aujourd’hui, notamment sur les médias sociaux, de douze organismes acadiens qui appuient nos démarches ce mouvement.
6 Par ailleurs, ce dossier se trouve parmi les préoccupations de la FJFNB depuis quelques années, car le mandat de travailler sur l’abaissement de l’âge du vote à 16 ans a été suggéré à notre assemblée générale annuelle de 2014 lorsque les jeunes de la province nous ont fait la proposition suivante : « Que la FJFNB fasse pression pour diminuer l’âge du vote à 16 ans et qu’il y ait une formation obligatoire au secondaire dans le processus électoral. »
7 Depuis 2014, notre travail a avancé en ce sens. Nous avons travaillé sans relâche afin de faire connaître cette revendication sur la place publique. D’ailleurs, un projet de loi a été présenté à l’Assemblée législative par le chef du Parti vert, David Coon, mais il est malheureusement mort au feuilleton. Cela dit, la question n’est pas morte pour autant, puisqu’elle figure au mandat de la présente commission.
8 De plus, sachez que nous ne travaillons pas seulement sur ce dossier au niveau provincial. La Fédération de la jeunesse canadienne française, la FJCF s’affaire également à faire abaisser l’âge du vote à 16 ans sur la scène fédérale.
9 Suite à nos recherches, nous sommes convaincus qu’abaisser l’âge du vote à 16 ans serait bénéfique pour le système électoral néo-brunswickois et canadien.
10 Voter est une question d’habitude. Des études tendent à prouver qu’une personne qui vote une fois sera portée à continuer à le faire tout au long de sa vie. De ce fait, les jeunes de 16 ans qui sont encore dans le système scolaire et qui, pour la plupart, habitent dans le foyer familial, auraient accès à un encadrement qui les pousseraient à voter ne serait-ce qu’une première fois.
11 D’ailleurs comme les membres de la commission l’ont peut-être remarqué dans la proposition reçue de nos membres, ceux-ci revendiquent non seulement d’abaisser l’âge, mais ils veulent également que des cours obligatoires d’éducation civique soient ajoutés au cursus scolaire. Ces cours sont d’une grande importance afin de créer des générations d’électeurs qui comprennent pleinement le système électoral. Donc, il serait important que le gouvernement provincial voie, par l’entremise du ministère de l’Éducation et du Développement de la petite enfance, à une éducation civique adéquate en salle de classe.
12 Grâce à l’ajout d’un cours dans les écoles et de campagnes de promotion sur l’importance de participer au processus électoral durant la période des élections, il serait possible d’imaginer que l’abaissement de l’âge du vote pourrait aider à combattre le faible taux de participation aux élections, une réalité qui est présente dans toutes les provinces canadiennes. Rappelons qu’aux élections provinciales de 2014, la participation des électeurs néo-brunswickois a été la plus faible de l’histoire avec seulement 64,7% des électeurs inscrits qui ont exercé leur droit de vote.
13 Soulignons aussi que certains d’obstacles se dressent sur le chemin des personnes qui participent pour une première fois au système électoral à 18 ans. Pour la plupart, ces jeunes ne sont plus dans le foyer familial et sont inscrits dans des programmes d’études postsecondaires, souvent à l’extérieur de leur circonscription.
14 Comme on le sait, il faut entreprendre des démarches spécifiques afin de voter lorsque l’on ne peut se rendre physiquement dans la circonscription de notre demeure officielle. Cela pose un autre obstacle à ce « premier vote ». De plus, les spécialistes s’entendent pour dire que le vote est un acte social, c’est-à-dire qu’il est influencé par l’entourage. Ces jeunes qui n’habitent plus à la maison et ne fréquentent plus le système scolaire public manquent d’encadrement, et ainsi, doivent surmonter ce nouvel obstacle.
15 Les jeunes sont intéressés, ou du moins veulent s’intéresser à la politique. Nous le voyons tous les jours et je rappelle que ce sont nos membres, les jeunes francophones de la province, qui nous ont demandé formellement de travailler sur l’abaissement de l’âge du vote à 16 ans.
16 Cependant, puisqu’ils et elles ne peuvent pas participer au processus électoral avant l’âge de 18 ans, la plupart se sentent désabusés par ce système, qui pourtant les concerne directement. Les élus prennent des décisions qui influencent et continueront d’influencer ces jeunes tout au long de leur vie et, pourtant, ces derniers n’ont pas un mot à dire.
17 Plusieurs pays ont déjà abordé la question et certains ont déjà abaissé l’âge du vote afin de permettre aux jeunes de 16 et de 17 ans de participer au processus électoral en tant qu’électeurs. Que l’on pense à l’Autriche, au Brésil et à bien d’autres pays, des retombées très positives ont suivi ce changement de mentalité et ce changement législatif. En Écosse, les jeunes de 16 et de 17 ans ont eu la chance de voter lors du référendum sur l’indépendance de 2014.
18 Au Canada, ce changement idéologique commence à faire son chemin. Par exemple, la question a été directement adressée au niveau provincial à l’Île-du-Prince-Édouard lors du plébiscite portant sur le mode de scrutin. Les jeunes de 16 et de 17 ans avaient d’ailleurs obtenu le droit de vote afin de se prononcer sur ce changement important au système électoral de la province insulaire.
19 Sur la scène fédérale, on reconnaît qu’un projet de loi, soit le projet C-213 du député Don Davies du Nouveau Parti démocratique, est présentement au feuilleton, en attente de sa deuxième lecture. Nous espérons que le gouvernement permettra à ce projet de loi privé de continuer son chemin.
20 D’ailleurs il faut rappeler que déjà, à 16 ans, on donne le droit aux jeunes de travailler, de conduire, de s’émanciper et même de s’engager dans les forces armées, mais pas celui de voter. Je suis donc de l’avis que l’âge du vote devrait être à l’image de ces autres normes sociales.
21 En somme, je propose que l’idée de voter à partir de 16 ans et d’offrir des cours d’éducation civique obligatoires dans les écoles sont des solutions intéressantes qui pourraient aussi contribuer à un meilleur processus démocratique au Canada et, notamment, au Nouveau-Brunswick.