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L’importance de planifier en vue du vieillissement de la population :

Notre ville est-elle amie des aînés?

Suzanne Dupuis-Blanchard
Centre d’études du vieillissement & École de science infirmière, Université de Moncton
Odette N. Gould
Department of Psychology, Mount Allison University
Ilisha French
Department of Psychology, Mount Allison University

Résumé

Le présent article poursuit deux objectifs : déterminer dans quelle mesure les personnes âgées jugent que leur collectivité répond aux besoins de la population vieillissante et proposer une réflexion critique sur les avantages et les défis de mener une recherche avec un partenaire communautaire composé à majorité d’aînés. Deux cent quatre-vingt-neuf personnes âgées, habitant la ville de Moncton, au Nouveau-Brunswick (Canada), ont rempli et renvoyé un questionnaire dans le cadre d’un projet de recherche à méthode mixte. Nous avons procédé à une analyse statistique, une analyse du contenu et une identification qualitative par thèmes. Les résultats du sondage révèlent que la présence de glace et de neige sur les trottoirs est l’obstacle grave le plus fréquemment relevé en ce qui a trait à la création d’une collectivité amie des aînés, suivi de l’accès par téléphone aux bureaux municipaux et aux bureaux des gouvernements. La principale conclusion qui se dégage de l’étude est que les aînés ont besoin de pouvoir se déplacer à l’extérieur de leur domicile pour participer pleinement à la vie communautaire.

Abstract

This article has two objectives: to determine to what extent seniors feel that their community meets the needs of an aging population, and to provide a critical reflection on the benefits and challenges of conducting research with a community partner comprised mainly of seniors. Two hundred and eighty-nine seniors who live in the city of Moncton, New Brunswick (Canada) completed and returned a questionnaire as part of this mixed methodology research project. The resulting data was subjected to a statistical analysis, a content analysis, as well as a qualitative identification by theme. Survey results indicate that the presence of ice and snow on sidewalks is the most serious obstacle to the creation of an age friendly community, followed by telephone access to municipal and governmental offices. The main finding of the study is that seniors need to be able to leave their homes to participate fully in community life.

1 La population vieillit, tant au Canada qu’ailleurs dans le monde. À l’échelle mondiale, le nombre de personnes âgées aura au moins doublé au cours des 40 prochaines années (Nations Unies 9). Le vieillissement de la population est particulièrement frappant dans les pays développés. Au Canada, par exemple, les personnes de plus de 65 ans représentaient 16,1 % de la population totale en 2015; cette proportion devrait passer à 20,1 % au cours des dix prochaines années (Statistique Canada, Canada’s population estimates 4). En 2015, il a été déterminé que le Nouveau-Brunswick, dont 19 % de la population est composé de personnes âgées, est la province ayant la plus forte proportion d’aînés au pays. Devant ces changements démographiques, il est essentiel d’établir des collectivités qui répondent aux besoins de leurs adultes vieillissants.

2 Le concept des collectivités amies des aînés a été introduit en 2007 par l’Organisation mondiale de la santé (OMS 7). Une collectivité amie des aînés reconnaît que les aînés ont des compétences et des habiletés, respecte leurs décisions et leurs choix de mode de vie, protège les plus vulnérables et reconnaît l’importance d’inclure les aînés dans tous les aspects de la vie communautaire (OMS 5). Dans le court laps de temps écoulé depuis l’introduction du concept, les chercheurs ont commencé à s’intéresser à son importance et à l’incidence de la collectivité sur la santé des personnes âgées. Cependant, ce n’est que récemment que le secteur public, en particulier les comités de planification municipaux, ont commencé à s’intéresser au concept de collectivités amies des aînés (Institut urbain du Canada 5). Le concept commence à prendre de l’importance depuis que les personnes âgées veulent vieillir chez elles en autonomie. Pour ce faire toutefois, les obstacles qui limitent leurs activités doivent être abordés dans les politiques municipales et l’aménagement de l’environnement (Lui et coll. 116).

3 Malgré l’intérêt accru pour les collectivités amies des aînés, les études scientifiques portant sur le sujet demeurent rares. La présente communication poursuit deux objectifs. En premier lieu, nous présentons les résultats d’un sondage mené pour déterminer dans quelle mesure les aînés jugent que leur collectivité répond aux besoins de la population vieillissante et nous analysons les réponses à quelques questions ouvertes sur le sujet. En deuxième lieu, nous discutons des défis et des avantages à ce qu’un tel projet de recherche ait été mené par une équipe composée de chercheurs universitaires et d’un groupe de citoyens, en l’occurrence des personnes âgées siégeant au Comité consultatif des aînés de la municipalité.

Contexte

4 La majorité des publications existantes évaluées par les pairs font une conceptualisation des collectivités amies des aînés (Lui et coll. 116; Menec et coll. 480), ou elles se limitent à l’étude de domaines précis liés au milieu, dont l’engagement productif (Gonzales et Morrow-Howell 51), la diffusion de renseignements (Everingham et coll. 80), la qualité de vie et du milieu de vie (Bookman 423; Gilroy 149), ou le concept du vieillissement chez soi (Bookman 424; Harper 27; Kennedy 71). Très peu d’études parlent de la concrétisation d’une collectivité amie des aînés et des défis à surmonter pour y arriver.

5 Déjà en 1973, Lawton affirmait qu’une collectivité ou un milieu peut soutenir le vieillissement. Depuis ce temps, de nombreux auteurs ont parlé de l’influence de l’environnement social, physique ou bâti sur la santé et le bien-être des personnes âgées. Mais il manque dans ces travaux un élément important, soit des études mobilisant les citoyens et d’autres intervenants à militer pour l’élaboration de politiques publiques et l’aménagement du milieu (Hunter et coll. 364). Décrivant les débuts de la mise en œuvre de politiques sur les collectivités amies des aînés au Canada, Plouffe et ses collaborateurs (27) concluent que les interventions les plus efficaces sont celles qui s’opèrent à l’échelle municipale. De toute évidence, le concept des collectivités amies des aînés exige une concertation des représentants élus, des personnes âgées et d’autres acteurs clés afin d’offrir à la population vieillissante la collectivité désirée.

6 Malgré l’intérêt pour les collectivités amies des aînés, il persiste une certaine disjonction entre les besoins des personnes âgées et les infrastructures communautaires (Hudson 1). Alors pourquoi ne travaillons-nous pas ensemble à la création d’une collectivité amie des aînés idéale? Les défis sont nombreux, notamment l’approche descendante (Lui et coll. 117), les visées individuelles des divers organismes (Kennedy 74), la difficulté à travailler avec des groupes de citoyens, quels qu’ils soient, et ce qui est plus important encore, les démarches à court terme qu’entraîne le changement d’élus à quelques années d’intervalle.

7 La plupart des recherches visant les politiques sociales et le vieillissement en santé dans sa collectivité portent sur la marche et l’activité physique, les problèmes de sécurité et l’accessibilité du milieu de vie (Hunter et coll. 356). Afin d’adopter le concept des collectivités amies des aînés, les municipalités doivent élargir la portée de leurs politiques, s’engager à fond dans l’amélioration de leur planification (Kennedy 73), et mieux comprendre les enjeux opérationnels (Phillipson 1). En fait, les notions et les éléments de collectivités amies des aînés ont des répercussions locales, nationales et mondiales qui ont été reconnues par l’Agence de la santé publique du Canada, l’Agence des États-Unis pour la protection de l’environnement, l’American Association for Retired Persons (AARP), et plus particulièrement l’OMS.

8 La plupart des études visant les collectivités amies des aînés se sont concentrées sur de grandes agglomérations urbaines, et très peu ont abordé les réalités de villes plus petites (Lui et coll. 117). Une exception est l’étude menée au Manitoba par Menec et son collaborateur (Spina et Menec 445), qui mettait l’accent sur de petites collectivités rurales isolées. La présente étude dépasse donc le cadre des travaux existants en abordant la création de collectivités amies des aînés dans un petit centre urbain aux conditions climatiques variées, où la neige et la glace sont présentes pendant plusieurs mois par année. Nous croyons que l’approche de la méthode mixte, assortie à une approche de recherche communautaire, a permis de faire ressortir des données nouvelles qui font avancer le concept des collectivités amies des aînés.

9 La question de recherche posée était Quels sont les besoins des aînés dans la ville de Moncton? Les trois objectifs précis étaient les suivants : 1) cerner les besoins des adultes âgés de plus de 60 ans; 2) cerner comment la ville de Moncton peut devenir plus conviviale pour les aînés; 3) découvrir les meilleurs moyens d’informer les aînés des activités et des services offerts dans la collectivité. Dans une perspective plus large, la présente étude visait également à proposer une réflexion critique sur l’exécution d’une recherche empirique quantitative (soit un sondage), tout en travaillant de près avec un partenaire communautaire, en l’occurrence un comité d’aînés qui s’intéresse aux affaires municipales. Enfin, l’approche de la méthode mixte que nous avons utilisée nous a permis de déterminer si les domaines des collectivités amies des aînés cernés par l’OMS (9) correspondent aux opinions exprimées par les aînés qui ont participé à la présente étude, au sujet d’une collectivité conviviale aux aînés. Le concept des collectivités amies des aînés et ses domaines, proposé par l’OMS (9), forme le cadre de la présente étude. Plus précisément, nous avons jugé que sept des huit domaines sont directement liés aux champs de responsabilité de la municipalité et ils ont servi à orienter notre étude : les espaces extérieurs et les bâtiments; les transports; le logement; la participation au tissu social; le respect et l’inclusion sociale; la participation citoyenne et l’emploi, et la communication et l’information. Comme nous travaillions avec un comité municipal et qu’au Canada, les services de santé relèvent des administrations provinciales, le domaine du soutien communautaire et des services de santé n’a pas été inclus dans la présente étude.

Méthodologie

Échantillon

10 Au total, 390 questionnaires ont été distribués, et 289 aînés y ont répondu, ce qui a donné un taux de réponse de 74,1 %. De ce chiffre, 96 répondants étaient des hommes et 184 étaient des femmes. Chaque questionnaire a été remis en mains propres aux répondants, soit par un membre du Comité consultatif des aînés, soit par l’assistante à la recherche. Les répondants devaient ensuite remettre le questionnaire rempli à la même personne. Les participants devaient déclarer leur âge selon des tranches de cinq ans : 40 % des répondants étaient âgés dans la soixantaine, 33 % étaient âgés de 70 ans à 79 ans; 22 % avaient entre 80 et 89 ans et 3 % des répondants avaient plus de 90 ans. Trois personnes n’ont pas donné leur âge. En moyenne, les répondants habitent Moncton depuis 41,7 ans (l’étendue étant de 1 à 90 ans). En outre, 34 % des répondants y demeurent depuis 50 ans ou plus. Dans l’ensemble, 56,7 % des répondants ont dit qu’ils demeuraient dans une maison unifamiliale; 35,3 % habitaient un appartement et 8 % ont mentionné d’autres formes de logement (p. ex. un condo, un duplex). Les participants à l’étude sont pleinement engagés dans la collectivité : 143 répondants (49 %) ont dit participer à des activités associées à l’église, 71 répondants (25 %) ont parlé d’activités liées au théâtre, à la musique et aux arts de la scène, 70 répondants (24 %) ont dit fréquenter un club d’âge d’or et 63 répondants (22 %) ont fait état d’activités d’apprentissage en groupe (p. ex. à l’Université du troisième âge) au moins une fois par mois. Enfin, nous avons demandé aux aînés à quelle fréquence ils offraient de l’aide ou des services à d’autres. Voici leurs réponses : 127 répondants (44 %) offrent de l’aide à des amis ou des parents de moins de 55 ans; 151 (52 %) offrent de l’aide à des amis ou des parents de plus de 55 ans, et 159 d’entre eux (55 %) donnent de leur temps pour des activités ou des groupes, au moins une fois par mois.

11 Un des objectifs du projet était de recruter un échantillon diversifié d’aînés représentatifs de la collectivité. Nous avons donc cerné 16 catégories différentes d’aînés pour notre population cible. Les recruteurs ne devaient pas demander aux participants éventuels s’ils correspondaient à une catégorie particulière. Ils devaient plutôt tenter de recruter des participants des diverses catégories en tenant compte de leur connaissance personnelle de la personne, de son lieu de résidence ou de son appartenance à divers groupes. Voici la liste de catégories utilisées, de même que le nombre de répondants de l’échantillon final composant chaque catégorie : a) jeunes aînés (de 60 à 74 ans, n = 160); b) aînés plus âgés (75+, n = 126); c) personnes parlant habituellement l’anglais (n = 204); d) personnes parlant habituellement le français (n = 45); e) aînés d’origine multiculturelle (personnes dont la langue maternelle est ni le français ni l’anglais (n = 4); f) aînés à faible revenu (moins de 20 000 $ par année, n = 38); g) aînés de faible scolarité (12e année ou moins, n = 116); h) aînés de forte scolarité (études postsecondaires, n = 165); i) aînés actifs (participant à au moins une activité sociale par semaine), n = 186); j) aînés isolés (participant à moins d’une activité sociale par semaine, n = 103); k) aînés habitant leur propre maison (n = 164); l) aînés vivant dans un appartement ou un logement pour aînés (n = 111); m) aînés qui conduisent leur voiture (n = 226); n) aînés qui ne conduisent pas leur voiture (n = 57); o) aînés mariés (ou demeurant avec un partenaire romantique du même sexe), n = 148), et p) aînés célibataires, veufs, séparés ou divorcés (n = 137).

Mesures

12 Dans un premier temps, nous avons distribué un questionnaire basé sur le cadre de l’OMS (2007) et inspiré par une étude semblable de Ryser, Halseth et Hanlon (36). Les questions posées portaient essentiellement sur des éléments relevant de l’administration municipale. À chacune des questions du sondage, nous présentions aux répondants un élément assorti d’une série d’obstacles à leur engagement envers cet élément. Les répondants devaient cocher une case allant de 1 (pas un problème du tout pour moi) à 5 (un problème majeur pour moi) pour décrire dans quelle mesure l’obstacle en question était problématique. Ces réponses ont été utilisées dans l’analyse quantitative. Après chaque question, on demandait aux participants : « Qu’est-ce que la ville de Moncton pourrait faire face à ces éléments? », et on leur fournissait un espace où consigner leurs suggestions. Ces réponses ont servi à l’analyse de contenu. Puis à la fin de la partie principale du questionnaire, on leur a demandé s’ils avaient des recommandations d’améliorations à apporter pour vivre le mieux possible dans la ville de Moncton. Les réponses ont été utilisées dans l’analyse qualitative.

13 Les enjeux suivants ont été abordés dans le questionnaire : a) obstacles dans les espaces extérieurs et bâtiments (p. ex., inquiétude envers la sécurité reliée aux crimes, glace et neige, distances, stationnement, manque d’endroits pour s’asseoir); b) obstacles à l’utilisation du transport public, en particulier les autobus, les taxis, le transport adapté (p. ex., le coût, les horaires, la sécurité, l’amabilité du conducteur); c) obstacles à demeurer chez soi (p. ex., entretien, impôt foncier, santé, coûts de travaux d’adaptation); d) obstacles à la participation à des activités sociales et culturelles (p. ex., coût, transport, intérêt personnel, responsabilité de personne soignante); e) obstacles à l’inclusion sociale dans les magasins au détail, les bureaux gouvernementaux et les bureaux municipaux (p. ex., personnel non courtois, accès par téléphone compliqué, accès impossible sans ordinateur, et autres); f) obstacles au bénévolat (p.ex., santé, manque d’occasions, manque d’intérêt). Enfin, nous avons interrogé les participants sur leur fréquence d’utilisation de diverses façons d’accéder aux renseignements sur leur collectivité, y compris les journaux, la télévision, Internet, le courriel, les sites Web, Facebook, les bulletins paroissiaux et les bulletins publiés par la Municipalité. Dans la deuxième partie du sondage, nous avons recueilli des renseignements démographiques de base sur chaque répondant, notamment l’âge, le genre, le revenu, la langue, l’état civil et le niveau d’éducation.

Procédure

14 En 2007, le Comité consultatif des aînés créé par le maire a mis sur pied le sous-comité pour une collectivité amie des aînés. Composé d’aînés de la communauté, ce sous-comité a lancé plusieurs projets, notamment celui de collaborer avec les détaillants locaux afin d’améliorer le service aux aînés. Au printemps 2011, le sous-comité a communiqué avec la première auteure de la présente étude, en sa qualité de directrice du centre d’études sur le vieillissement d’une université locale, pour lui demander de l’aider à préparer un sondage auprès des aînés de Moncton. La première auteure a alors invité la deuxième auteure à participer au projet et, au bout de quelques réunions entre les chercheuses et le sous-comité, une proposition voyait le jour. Les deux universités engagées dans l’étude ont donné leur approbation sur le plan éthique; les membres du sous-comité ont accepté d’aider à distribuer le questionnaire; et les chercheuses ont convenu d’élaborer le questionnaire, de le faire traduire et d’en analyser les résultats. Les chercheuses ont collaboré étroitement avec le comité des aînés afin de préparer le sondage et d’élaborer le mode de recrutement des participants. La Municipalité a assumé les dépenses d’imprimerie et une partie des coûts d’affranchissement pour la diffusion du questionnaire, et elle a offert le soutien organisationnel de son personnel. Ultérieurement, une étudiante de l’université d’attache de la deuxième auteure a obtenu une bourse de recherche d’été, ce qui lui a permis de travailler à plein temps au projet.

15 Nous avions attaché une lettre explicative à chaque questionnaire, expliquant que le sondage était une initiative du Comité consultatif des aînés créé par le maire, de concert avec le personnel municipal et les chercheuses. La lettre donnait les coordonnées des deux chercheuses, pour toute question sur le contenu, et les répondants étaient invités à renvoyer le questionnaire au recruteur, dans l’enveloppe fournie. On demandait également aux répondants de ne pas inscrire leur nom sur le questionnaire.

16 Les membres du sous-comité ont distribué environ 120 questionnaires à des amis ou connaissances dans le cadre de leurs propres activités de bénévolat. L’adjointe à la recherche a distribué le reste des questionnaires (environ 270) en montant un kiosque dans le cadre de certaines activités pour aînés au YMCA et à d’autres clubs d’aînés.

17 L’étudiante a saisi toutes les données reçues, de même que tous les commentaires et suggestions. Le tout a été transcrit textuellement dans la langue utilisée par chaque répondant. L’étudiante a fait les premières analyses, qui ont été présentées à une conférence universitaire regroupant les travaux de tous les titulaires de bourses de recherche d’été. Par la suite, les chercheuses ont rédigé un rapport de synthèse et ont présenté un sommaire des résultats de l’étude au sous-comité pour une collectivité amie des aînés, au Comité consultatif des aînés et au conseil municipal. On peut consulter le rapport sur le site Web de la Ville.

Résultats

Analyses quantitatives

18 Comme première étape de l’analyse, nous avons codé chaque obstacle comme variable distincte, et nous avons calculé la fréquence à laquelle les répondants avaient donné 4 ou 5 à chaque obstacle (qui signifie un obstacle grave). Nous avons ainsi déterminé l’obstacle grave le plus fréquemment relevé, pour chaque élément énuméré dans le questionnaire. Le Tableau 1 présente les résultats de cette analyse, de même que le pourcentage de l’échantillon au complet que représentent les chiffres obtenus. Comme on le constate au Tableau 1, seuls deux obstacles ont été qualifiés de graves pour un quart ou plus de l’échantillon. Il s’agit de la présence de glace et de neige sur les trottoirs et de la difficulté d’accéder par téléphone aux bureaux gouvernementaux. À noter cependant que de nombreux participants n’ont pas donné de cote pour toutes les questions. Par exemple, bien que 32 personnes aient déclaré que les temps d’attente étaient un obstacle à prendre l’autobus, seules 160 personnes (sur une possibilité de 289) ont coté cet obstacle. Au fait, le nombre de répondants ayant fourni une évaluation des obstacles qui les empêchent de prendre l’autobus allait de 157 à 165. Nous présumons donc que de nombreux répondants ont omis de répondre aux questions qu’ils ne jugeaient pas pertinentes à leur situation. Étant donné que de nombreuses personnes ont déclaré qu’elles conduisaient encore leur voiture, cette omission était d’autant plus flagrante pour les questions sur le transport public.

Tableau 1. Obstacles le plus souvent relevés comme graves
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19 D’un point de vue pratique, le partenaire communautaire était particulièrement intéressé à connaître les moyens les plus efficaces de communiquer avec les aînés de la collectivité. Nous avons donc demandé aux répondants quels étaient les moyens par lesquels ils étaient le plus susceptibles d’avoir obtenu l’information dont ils avaient eu besoin au sujet de leur collectivité au cours de la dernière année. Il ressort des résultats que les moyens de communication les plus fréquemment utilisés (au moins une fois par mois) sont les journaux (67 %), la télévision (66 %) et les bulletins paroissiaux (45 %). Fait intéressant, les médias électroniques tels que le courriel (29 %), Internet (20 %), les sites Web (19 %) et Facebook (10 %) étaient utilisés relativement plus souvent que des publications sur support papier expressément destinées aux aînés (12 %).

Comparaisons entre sous-groupes

20 Étant donné la diversité de l’échantillon, nous avons voulu déterminer s’il y avait des différences dans la façon que les divers sous-groupes vivent dans leur collectivité. Pour les besoins de ces analyses, nous avons utilisé le test t de Student pour comparer les moyennes de scores (de 1 à 5) donnés à chacun des obstacles énumérés pour chaque question. Afin de compenser pour la possibilité que la probabilité d’erreur de première espèce α soit exagérée, la règle de décision p < 0,01 a été appliquée pour la signification statistique.

21 Dans une première série d’analyses, nous avons comparé le groupe d’aînés plus jeunes (de 60 à 74 ans) au groupe d’aînés plus âgés (75 ans et plus). Les deux sous-groupes présentaient de nombreuses similitudes, notamment dans la répartition hommes-femmes, le revenu du ménage et la fréquence du bénévolat ou de l’offre d’aide aux autres. Cependant, les comparaisons à l’aide du test de chi carré (p < 0,01) révèlent que les aînés plus âgés (12 %) étaient plus nombreux que les aînés plus jeunes (5 %) à ne pas avoir terminé leurs études secondaires. En outre, un plus grand nombre d’aînés plus jeunes (89 %) que d’aînés plus âgés (67 %) ont déclaré qu’ils conduisaient encore une voiture.

22 Les aînés plus âgés (43 %) étaient aussi moins susceptibles de vivre dans une maison unifamiliale que les plus jeunes, et ils étaient plus nombreux à dire qu’ils chercheraient un logement avec assistance (36 %) ou un foyer de soins (11 %) s’ils devaient quitter leur domicile actuel. Enfin, une série de tests t de Student (p < 0,01) a démontré que les aînés plus jeunes étaient plus portés à obtenir de l’information sur la collectivité par les médias numériques (Facebook, divers sites Web), tandis que les aînés plus âgés avaient plutôt recours à la télévision, aux bulletins municipaux ou aux bulletins paroissiaux. De même, en ce qui concerne les activités sociales, les aînés plus âgés participent plus souvent aux activités associées à l’église.

23 Le Tableau 2 permet de constater que les deux sous-groupes d’âge présentent des différences au niveau des obstacles rencontrés, selon deux aspects importants. D’abord, en ce qui concerne les espaces extérieurs et la participation sociale, les aînés plus âgés sont plus préoccupés par la mobilité. Leurs obstacles sont davantage liés à la peur des chutes, aux escaliers, aux portes lourdes, à la mobilité et aux handicaps sensoriels. Pour leur part, les aînés plus jeunes ont fait davantage état d’expériences négatives associées aux interactions sociales avec le personnel dans les magasins de vente au détail et les bureaux des gouvernements.

24 Dans une deuxième série d’analyses, nous avons utilisé la méthode de la bipartition approximative pour répartir l’échantillon entre deux catégories : aînés ayant un revenu du ménage plus élevé (50 000 $ ou plus, n = 121) et aînés ayant un revenu du ménage moins élevé (49 000 $ ou moins, n = 75). Des comparaisons effectuées à l’aide du test de chi carré (p < 0,01) font ressortir des différences nettes au niveau de certaines caractéristiques démographiques. Alors que les hommes étaient répartis équitablement entre les deux sous-groupes associés au revenu, les femmes étaient plus nombreuses dans le groupe à revenu moins élevé (70 %) que dans celui à revenu plus élevé (30 %). Ces écarts dans le revenu du ménage sont plus probablement liés à l’état civil, qui différait également d’un sous-groupe à l’autre. Les personnes ayant un revenu moins élevé étaient plus susceptibles de ne pas être mariées. Cependant, l’état civil n’explique pas entièrement les différences de niveau de revenu entre les participants, car 22 % des personnes touchant un revenu plus élevé n’étaient pas mariées, et 35 % des personnes ayant déclaré un revenu du ménage inférieur à 50 000 $ par année l’étaient. Pour ce qui est du domicile actuel, la majorité des répondants à revenu plus élevé demeuraient dans une maison unifamiliale (75 %). Les personnes à revenu moins élevé étaient réparties également entre les types de logement suivants : appartement, maison unifamiliale et « autre » (p. ex., duplex). Par contre, les répondants des deux sous-groupes présentaient très peu de différences quant à leur préférence future en logement. Les deux groupes ont dit qu’ils choisiraient probablement un appartement. Les personnes touchant un revenu plus faible étaient également moins instruites et moins susceptibles de conduire une voiture. Il n’y avait pas de différence entre les deux sous-groupes pour ce qui est de la fréquence de participation à divers types d’activités sociales, de leur façon d’accéder à l’information communautaire et de la fréquence à laquelle elles rendaient services à d’autres, officiellement ou officieusement.

Tableau 2. Obstacles pour lesquels on remarque un écart important (p < 0,01) entre les aînés plus jeunes et les aînés plus âgés
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25 Comme l’illustre le Tableau 3, nous avons observé une grande différence entre les répondants des deux sous-groupes de revenu pour ce qui est des obstacles à leur pleine participation à la vie communautaire. La faiblesse du revenu avait une incidence sur la facilité de mobilité dans les espaces extérieurs, l’entrave à la liberté de mouvement en raison du transport et la facilité d’accès aux services en ligne.

Tableau 3. Obstacles pour lesquels on remarque un écart important (p < 0,01) entre les aînés dont le revenu du ménage est faible et les aînés dont le revenu du ménage est élevé
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26 Enfin, pour pouvoir étudier l’importance relative de diverses variables démographiques dans l’évaluation de la gravité des obstacles pour chaque élément, nous avons mené une série d’analyses exploratoires par régression hiérarchique. En premier lieu, nous avons déterminé que les obstacles proposés pour chaque élément formaient des échelles raisonnables (l’alpha de Cronbach variait entre 0,69 et 0,93). En deuxième lieu, nous avons calculé un score pour chaque élément en utilisant le score moyen pour les obstacles. Enfin, pour chaque question, nous avons effectué une analyse à l’aide de régressions hiérarchiques par blocs selon l’ordre suivant d’introduction dans le modèle : a) l’âge, allant de 1 (60-64) à 8 (95-100), b) le genre (codé comme suit : 1 désignant les hommes, 2 désignant les femmes), et l’état civil (1 désignant les répondants mariés, 2 désignant les célibataires), c) le niveau de scolarité, allant de 1 (études primaires) à 6 (études universitaires) et la tranche de revenus, allant de 1 (< 20 000 $) à 6 (> 120 000 $), d) la conduite automobile (codée comme suit : 1 pour conducteur, 2 pour non-conducteur). Par conséquent, le modèle examinait d’abord les variables démographiques saisies, suivies des indicateurs de la situation socioéconomique, suivis enfin de la conduite automobile. Il faut noter ici que ces analyses n’ont été possibles que pour le sous-échantillon de personnes qui n’avaient omis aucune donnée dans tout le questionnaire. Les tailles des échantillons pour chaque régression sont présentées au Tableau 4. Comme on le constate dans ce tableau, même quand nous intégrons l’âge et le genre dans le modèle dès le début, ils ne sont pertinents que pour les obstacles liés à la possibilité de demeurer dans son domicile actuel et à l’utilisation des espaces extérieurs et des bâtiments. Le fait d’être marié ou non était relié à la perception accrue de l’obstacle en rapport avec la possibilité de demeurer chez soi et au bénévolat. La constatation la plus frappante est l’importance accordée à la conduite automobile. Pour quatre des six éléments examinés, la non-conduite automobile expliquait les scores plus élevés au niveau des obstacles.

Tableau 4. Régression hiérarchique par blocs
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Analyses qualitatives

27 À la fin du sondage, nous avons invité les participants à inscrire des observations additionnelles d’ordre général. Les chercheuses ont analysé chacune des observations, puis elles ont regroupé le tout en diverses catégories. Plusieurs répondants ont fourni une rétroaction positive au sujet du sondage ou de la Ville de Moncton, tandis que d’autres y allaient de renseignements supplémentaires sur le concept de collectivités amies des aînés. Les chercheuses ont réparti les observations en cinq grandes catégories.

Activités

28 Le thème des activités est celui qui est ressorti le plus souvent dans la section des commentaires généraux du sondage. Les commentaires étaient très variés : on voulait plus d’activités avec des citoyens plus jeunes ou encore plus d’activités à l’extérieur. Une personne a déclaré : « Je ne suis jamais allée dans un club d’âge d’or. J’ai cette impression des personnes âgées qui me dérange. J’aimerais qu’il y ait des activités extérieures pour les jeunes et les moins jeunes, ensemble. Il faut organiser plus d’activités en plein air pour toutes les tranches d’âge. » D’autres répondants voulaient des activités destinées expressément aux adultes plus âgés : « Ce serait bien d’avoir des activités en soirée ainsi que durant toute la journée, peut-être dans un pub, qui répondraient aux besoins précis des aînés. » On a également relevé l’importance de l’activité physique : « Aucune des questions n’a semblé aborder l’importance de la bonne forme et de l’activité physique. Nous marchons beaucoup, nous fréquentons les parcs ainsi que les installations du YMCA, et nous attribuons notre bonne santé mentale et physique à l’activité physique. » Un autre participant a ajouté ce commentaire : « L’activité physique devrait être une priorité; cela dit, la marche exige des trottoirs en bon état. » Plusieurs répondants ont souligné l’importance d’avoir leur propre espace pour la tenue d’activités : « Depuis que je fréquente le centre pour personnes âgées, j’aspire à avoir un centre bien à nous, géré par nous. » Une autre personne a fait cette observation sur le même sujet : « Les aînés ont besoin d’un centre indépendant doté de pièces réservées aux personnes âgées, où l’on se sent en sécurité, notamment l’hiver aux portes d’entrée. » Enfin, un répondant y est allé de ce commentaire : « Davantage de lieux de rencontre au centre-ville. »

Logement

29 Les commentaires généraux à ce sujet ont largement porté sur le logement abordable et le logement avec services de soutien. Une personne âgée a déclaré : « Avoir accès à des appartements décents, pas trop dispendieux. » Une autre a dit : « Nous avons besoin de logements moins dispendieux pour les aînés à faible revenu. » Certains répondants ont mentionné le logement avec services de soutien afin de favoriser le vieillissement chez soi : « Il faut permettre aux gens de demeurer chez eux le plus longtemps possible. Il faut encourager et promouvoir les programmes d’aide à la vie autonome. » Un participant a souligné l’importance d’avoir accès à des logements où l’on accepte les animaux de compagnie : « Offrir davantage de résidences, d’appartements ou de condos où les animaux de compagnie sont acceptés. Certaines personnes âgées aimeraient garder leurs animaux, car ces derniers offrent un réconfort émotionnel et psychologique indéniable aux personnes seules. »

Sécurité

30 Les observations d’ordre général sur la sécurité visaient surtout le crime. Une personne a écrit : « Peut-être avoir en place un système de surveillance mutuelle occasionnelle, entre voisins. » La plupart des observations touchaient à la sécurité dans les rues : « J’aimerais bien, en tant que femme, me sentir en sécurité quand je marche le soir ou tôt le matin. » D’autres ont écrit : « Réduire la vitesse de la circulation » et « Accroître la présence policière au centre-ville, par des patrouilles à pied si possible. » Quelques aînés ont confié qu’ils craignaient les collisions avec des jeunes en skateboard : « Interdire aux jeunes de faire du skateboard ou du vélo dans les cours des appartements destinés aux aînés. »

Transport

31 De nombreux participants ont fait des observations au sujet du transport. La majorité a demandé un service d’autobus gratuit pour les aînés : « Accroître le service d’autobus gratuit. » et « Augmenter le nombre de jours où les aînés ont accès gratuitement au service d’autobus. » D’autres observations visaient l’importance d’arrêts d’autobus accessibles et d’un bon horaire : « Améliorer le déneigement aux arrêts d’autobus et déneiger un passage pour s’y rendre. Doter les abribus de sièges pour éviter d’avoir à s’accoter contre une plaque de métal. » D’autres ont demandé : « Donnez-nous des horaires convenables. » Certaines personnes ont mentionné qu’elles aimeraient bien offrir à des voisins de les conduire au bureau du médecin ou à l’épicerie, mais que les contraintes associées aux assurances les en empêchent.

Coût

32 Des personnes âgées ont mentionné le coût élevé de plusieurs choses, allant des activités, aux taxes et impôts. Une personne a écrit : « On pourrait réduire les frais d’admission à certaines activités. Les pensionnés ne peuvent pas se permettre de débourser chacun 30 $ ou 40 $ ou même plus pour une sortie. » Une autre personne a mentionné : « Il nous est difficile, à mon mari et à moi, de faire des sorties en couple, car les prix sont trop élevés pour deux. Il ne reste plus grand argent quand on a fini de payer le loyer et les factures. » Un répondant a suggéré que l’on offre aux aînés des « activités subventionnées ». Voici deux autres commentaires reçus : « Réduisez nos impôts fonciers » et « Donnez un crédit d’impôt aux personnes de 70 ans et plus qui vivent dans leur propre maison ».

Discussion

33 Le principal objectif de l’étude était d’évaluer dans quelle mesure Moncton répond aux besoins de ses citoyens aînés. Compte tenu des ressources limitées à notre disposition, nous avons voulu recruter un échantillon diversifié plutôt qu’un large échantillon. Nous avons obtenu un excellent taux de réponse, soit 74,1 %, ce qui est probablement attribuable au fait que chaque questionnaire a été remis en personne à un participant éventuel. Nous avons remporté un certain succès dans le recrutement de personnes âgées à partir de la liste de sous-groupes compilée au départ. Par contre, il y a eu très peu de représentants d’aînés ne parlant ni français ni anglais. Selon Statistique Canada (Census Data), ces gens composent 2 % de la population de la municipalité.

34 La principale conclusion qui se dégage de ces données est l’importance pour les aînés de se déplacer à l’extérieur de leur logement afin de participer pleinement à la vie dans la collectivité. Même si l’étude a été menée dans une province de l’Est du Canada, où le climat varie d’une saison à l’autre, allant de belles et chaudes journées d’été au froid et à la neige de l’hiver, les préoccupations les plus graves soulevées par les participants visaient les obstacles aux sorties dans les espaces extérieurs l’hiver. La présence de neige et de glace sur les trottoirs et autour des parcomètres et abribus a été présentée comme une limitation physique tout comme un risque de chute. Cette constatation correspond à celles d’autres études sur les activités extérieures qui ont été menées dans des régions au climat tempéré (Rosenberg et coll. 273) et des régions du Nord. Par exemple, dans le cadre d’un projet Photovoice, Novek et Menec (1055) ont demandé à des personnes âgées vivant dans des collectivités urbaines, rurales ou très isolées du Manitoba de donner leur opinion sur la convivialité de leur milieu. Dans toutes ces collectivités, les obstacles relevés le plus fréquemment sont le déneigement inadéquat des terrains de stationnement et une sécurité piétonnière réduite à cause de la présence de glace et de neige. Notre étude met en lumière l’importance de pouvoir se déplacer à l’extérieur de son logement en toute sécurité. Nous en avons pour preuve le fait que la capacité de conduire une automobile explique la gravité attribuée aux obstacles pour de nombreux éléments, au-delà des variables liées à la situation démographique et socioéconomique. Fait intéressant, des études antérieures ont démontré que la conduite automobile est un facteur important dans la décision de déménager. C’est surtout parce que c’est une tâche complexe qui exige de nombreuses compétences (Weeks, Keefe et MacDonald 367). De toute évidence, les centres urbains du Nord dont le réseau de transport public laisse à désirer ont un défi de taille à relever s’ils veulent offrir à leurs aînés un service de transport sécuritaire, accessible et pratique, leur permettant de participer pleinement aux activités communautaires tout au long de l’année. Il convient de noter cependant que notre enquête sur la satisfaction des aînés à l’égard du réseau de transport public est arrivée à un mauvais moment, car un lock-out du service d’autobus avait lieu durant les mêmes mois que la collecte des données. De nombreux aînés ont choisi de ne pas répondre à ces questions (ce qui a réduit la taille de l’échantillon pour certaines analyses), ou ils ont commenté le fait que les autobus ne circulaient pas à ce moment-là.

35 En général, les résultats du sondage nous amènent à constater que même si l’on peut tirer certaines conclusions générales pour l’ensemble des collectivités – telle l’importance du réseau de transport – il faut également connaître les caractéristiques précises d’une collectivité (p. ex. son climat, son réseau de transport public) et de ses aînés (p. ex. leur niveau de scolarité, leur diversité culturelle, leurs niveaux de revenu) pour comprendre ce que les aînés veulent et ce dont ils ont besoin pour rester engagés.

36 Un deuxième objectif de ce projet était d’utiliser des questions ouvertes comme façon de recueillir des renseignements supplémentaires sur les préoccupations des personnes âgées. Les problèmes soulevés dans cette partie du sondage sont associés à de nombreux éléments abordés dans le cadre de l’OMS. Selon l’analyse des réponses aux questions ouvertes, il appert que les participants attachent de l’importance aux éléments suivants : la disponibilité de toilettes publiques, la sécurité des rues et trottoirs, la présence de chariots dans les centres commerciaux, l’état des arrêts d’autobus, le coût des activités sociales et l’accès à des activités culturelles variées, ainsi que le manque de publicité entourant les activités. Par exemple, la population en général n’attache peut-être pas une grande importance à la disponibilité de chariots au centre commercial, mais les personnes âgées peuvent y trouver une importante aide à la mobilité.

37 Nous avons trouvé particulièrement intéressants les commentaires sur l’entretien du domicile et le manque de services d’aide à l’entretien. Pour que les aînés puissent demeurer chez eux une fois qu’ils ne peuvent plus s’occuper des tâches d’entretien, ils doivent avoir accès à des services d’aide, aussi modestes soient-ils, offerts par des sources dignes de confiance dans la collectivité. Nos résultats indiquent que la disponibilité de ce genre de services doit être incluse dans les évaluations de la convivialité d’une collectivité envers ses aînés.

38 Un autre objectif de la recherche était de réfléchir aux avantages et aux défis inhérents à la réalisation d’une étude par sondage auprès d’un groupe d’aînés. Les avantages sont évidents : la recherche est intrinsèquement pertinente pour la population visée et il y a une forte motivation pour utiliser les résultats de l’étude à bon escient (Kidd et Kral 191). Qui plus est, le fait de demander aux aînés membres du comité consultatif créé par le maire de participer à la conception du sondage et à la formulation des questions a permis de produire un sondage plus approfondi, plus facile à comprendre et ayant une validité apparente plus élevée. Nous pensons également que l’utilisation du logo de la ville et le fait que le sondage ait été initié par le comité consultatif créé par le maire ont fait augmenter les taux de réponse.

39 Il va sans dire que travailler avec des groupes communautaires comporte également son lot de défis. Au départ, notre partenaire communautaire s’était engagé à distribuer tous les questionnaires. Il ne l’a pas fait, alors nous avons dû faire preuve d’originalité et nous avons communiqué avec d’autres groupes communautaires afin d’obtenir un nombre suffisant de répondants. Il nous a aussi fallu composer avec un dilemme éthique, à savoir si nous devions ou non inclure toutes les réponses qualitatives dans la partie « rapport public » de l’étude. En effet, nous n’avions pas vraiment prévu la difficulté de la protection de la vie privée des répondants par rapport à la présentation d’un rapport intégral (contenant toutes les réponses aux questions ouvertes) à notre partenaire communautaire. Nous avons choisi cette deuxième approche, car nous estimions qu’il était aussi important que chaque répondant puisse constater que sa rétroaction avait été communiquée aux autorités municipales.

40 Autre point intéressant, il a fallu déterminer le meilleur moyen d’informer les aînés de la collectivité des questions communautaires ainsi que des activités sociales et culturelles qui pourraient les intéresser. Les universitaires de l’équipe de recherche estiment que les résultats empiriques ont fait ressortir une divergence fascinante entre les anciens médias et les nouveaux médias. Bien qu’un pourcentage élevé d’aînés comptent sur les journaux, la télévision et les bulletins paroissiaux pour prendre des nouvelles de leur collectivité, un groupe de plus en plus important utilise également les médias numériques. Cela suppose donc, à notre avis, que la meilleure façon de procéder à l’avenir est de faire appel aux journaux et aux postes de télévision pour rejoindre les aînés plus âgés et d’avoir recours aux médias numériques pour communiquer avec les aînés plus jeunes. En revanche, le partenaire communautaire a interprété les conclusions de l’étude comme une preuve qu’il faut investir davantage de ressources dans le bulletin des aînés et dans un bulletin d’information communautaire produit en collaboration avec ce groupe.

41 Il importe toutefois de souligner que, dans l’ensemble, la collaboration avec notre partenaire communautaire a été très positive, et autant les chercheuses que les aînés membres du Comité consultatif des aînés créé par le maire sont bien satisfaits de l’expérience. Comme pour tout projet de collaboration, l’accès aux données a fait l’objet de discussions dès le début, ce qui a fortement contribué à la satisfaction mutuelle des deux parties.

42 En conclusion, la principale force de notre recherche a été l’utilisation de méthodes mixtes dans le cadre de la recherche communautaire. L’approche quantitative nous a permis de sonder un grand nombre d’aînés au sujet de leur collectivité, tout en posant des questions ouvertes afin que les répondants puissent fournir des renseignements additionnels. Malgré quelques difficultés, la recherche communautaire a été un des points forts de l’étude, puisque les membres du Comité consultatif des aînés sont en train de faire avancer leur projet de collectivité amie des aînés, à la lumière des constatations de l’étude.

43 Tout futur projet de recherche devrait tenir compte des effets du climat et du transport sur les collectivités amies des aînés. La diversité des besoins et des attentes est également un point important à examiner : certains aînés ont dit qu’ils aimeraient avoir accès à des activités et à des événements destinés à tous les groupes d’âge tandis que d’autres préféreraient des activités réservées uniquement aux aînés. Certains répondants demandent qu’il y ait davantage d’activités extérieures à l’intention des aînés en bonne condition physique, d’autres aimeraient plutôt avoir des centres sécuritaires et accessibles uniquement aux aînés. Par conséquent, il faudra, dans le cadre de tout futur projet de recherche, tenir compte du fait que le concept d’une collectivité amie des aînés doit être évalué dans le contexte environnemental et socioéconomique propre à la collectivité visée. Comme il a été décrit dans Menec et coll. (489), nous devons opter pour une approche écologique qui prend en considération les interactions personne-environnement. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons concevoir une collectivité amie des aînés qui encourage les personnes âgées à vivre dans leur propre collectivité le plus longtemps possible, dans le confort, la sécurité et l’autonomie.

Financement

Le financement pour l’embauche d’une assistante de recherche fut fourni par le Mount Allison University Summer Undergraduate Research Program. Le projet a aussi bénéficié d’un soutien non-financier de la Ville de Moncton. Ces organismes n’ont eu aucune influence sur la conception, la réalisation ou l’interprétation des données du projet.

Remerciement

Les auteurs tiennent à remercier les membres du Comité Consultatif des Aînés de la Ville de Moncton de nous avoir invités à participer à ce projet. Nous remercions Nicole Poirier à la mairie, et Nora Williams au Centre d’information pour personnes âgées pour leur soutien pendant la collecte des données. En plus, nous voulons remercier chaleureusement les résidents et résidentes de la Ville de Moncton qui ont participé à ce projet de recherche.

Ouvrages cités
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