Forum

Communautarisme et dualité :

réflexions sur la naissance, la persistance et les potentialités d’une particularité acadienne

Joel Belliveau
l’Université Laurentienne

1 IL EXISTE DANS LA PLUPART DES RÉGIONS FRANCOPHONES et diglossiques des Maritimes un discours cohérent et fort qui constitue le « nous » acadien. Ce discours, le plus souvent désigné comme étant « national », présente une identité culturelle ainsi qu’une mémoire bien définies. Une portion substantielle de la population s’identifie consciemment à ce discours, et encore plus de gens l’ont intériorisé sans s’en rendre compte. L’Acadie « va de soi » pour des centaines de milliers de personnes; « on » a réussi à la constituer en « communauté imaginée 1 ».

2 Les signes de cette identité partagée sont très présents dans les régions francophones des Maritimes. Le territoire est tapissé de décorations aux motifs du drapeau acadien. Les calendriers sont pleins de manifestations culturelles distinctement acadiennes. L’actualité est réfractée par un prisme acadien doublant le discours médiatique de la majorité. Des institutions communautaires créent des espaces francophones. Le bilinguisme officiel et le principe de la «  dualité linguistique  » sont défendus bec et ongles. La foisonnante production musicale acadienne chante l’Acadie sur les ondes.

3 Oui, l’Acadie va de soi pour plusieurs. Et pourtant, une telle situation ne va pas du tout de soi pour un groupe linguistique minoritaire. J’ose même dire qu’elle est unique au sein des francophonies minoritaires du Canada, voire des minorités nationales en Amérique du Nord 2 .

4 Le communautarisme acadien se différencie certainement sur le plan quantitatif. Si l’on reprend un à un les signes que j’ai énumérés ci-dessus et qu’on les recherche à Sudbury ou dans le Nord ontarien, par exemple, on n’arrive pas aux mêmes résultats  : les drapeaux se font plus discrets; les festivals ont tendance à être bilingues; les médias francophones couvrent surtout l’actualité spécifiquement « francophone »; les espaces où le français est dominant sont moins nombreux, et la langue est conséquemment minorisée presque à tout moment.

5 Mais cette accumulation de différences quantitatives finit aussi par avoir un effet qualitatif sur le plan identitaire. En effet, «  l’Ontario français  » comme réalité sociale ou « les Franco-Ontariens » comme groupe culturel, cela ne va pas de soi pour la majorité des parlants français de la région. Ces derniers ont toutes les chances de considérer la culture canadienne-française comme un héritage qu’ils valorisent certes de manière variable, mais qui ne définit pas leur personne. Le français est souvent perçu comme une « langue patrimoniale » qu’on voudrait certes transmettre, mais sans nécessairement aller jusqu’à lui donner un statut d’exception. On se définit généralement avant tout comme des Nord-Ontariens, ou Sudburois, ou Canadiens, et les artistes francophones du Nord chantent davantage « le Nord » que l’Ontario français. Et pourtant, on se retrouve dans une région et une ville où plus du quart de la population est de langue maternelle française, les seules qui se comparent, sur le plan démolinguistique, au Nouveau-Brunswick et à Moncton. Ailleurs au pays, la dynamique ressemble beaucoup plus à la « nouvel-ontarienne » qu’à l’acadienne, selon mon expérience 3 .

6 Il y a donc une « différence acadienne », qui se résume, pour moi, à ceci : les communautés acadiennes sont caractérisées par un plus haut degré de communautarisme que les autres francophonies minoritaires du Canada. Par « communautarisme », terme que j’utilise sans connotation, ni positive ni négative, j’entends une propension des individus à accorder une grande importance à l’appartenance communautaire dans la définition de leur identité personnelle.

7 Dans cet essai, je retracerai d’abord les conditions et les moyens de l’invention et de la réinvention de ce communautarisme acadien. Puis, je lancerai des interrogations sur les « coûts-avantages » de cette vision du monde et de soi.

L’invention du communautarisme acadien à l’ère des nationalités

8 S’il se trouvait déjà des ingrédients propices au communautarisme en Acadie coloniale, on doit admettre que c’est lors de la dite « Renaissance » acadienne que celui-ci épouse les contours d’une communauté imaginée de grande ampleur, à la fois trans-maritimienne et diasporique. Le récit est bien connu : à partir des années 1860, une « élite définitrice 4 » émergente se mit à véhiculer un discours servant à faire sens de la survie du groupe, mais aussi à monter des projets d’avenir collectifs. Elle le fit notamment par l’entremise du Collège Saint-Joseph, du journal Le Moniteur acadien5 et des premières « conventions nationales », à Memramcook et à Miscouche, en 1881 et en 1884, où des milliers de personnes se réunirent puis adoptèrent une pléthore de symboles nationaux 6 . Désormais, les Acadiens s’affirmeraient comme étant distincts à la fois de leurs voisins anglophones et des Canadiens français, et partageraient des aspirations et des plans pour le relèvement de leur nationalité.

9 Toutefois, il reste à expliquer le pourquoi de ce succès en matière de nation-building. Car rien ne prédestinait les « Acadiens » à s’identifier comme une nation 7 . Il a très probablement des causes multiples. On pourrait citer la concentration géographique relative des Acadiens, par exemple 8 , ainsi que le caractère dramatique de l’histoire de la déportation acadienne de 1755-1758, qui s’est bien prêtée aux efforts de nation-builders de tout acabit 9 . Cela dit, les discours particularisants entourant l’acadianité ont quand même dû être diffusés et popularisés avec succès, ce qui, en milieu nord-américain, est loin d’avoir été une évidence, peu importe le nombre de conditions favorables.

10 J’avance, dans un article paru à l’automne 2017 dans le Bulletin d’histoire politique10 , que des facteurs conjoncturels ont favorisé la première diffusion de cette identité collective et l’adhésion des masses à celle-ci. Puisant dans une thèse du sociologue espagnol Juan Linz, je soutiens que la propension acadienne au communautarisme tient, en partie, à la chronologie et au timing du développement du discours national acadien. Linz, se basant sur ses observations et analyses des nationalismes périphériques en Europe, fait remarquer que les nationalismes périphériques ont eu le plus de succès dans les régions où l’État a tardé à propager efficacement sa variante de l’identité nationale ou, plutôt, là où les élites intellectuelles et politiques régionales ont été les premières à véhiculer une identité nationale cohérente.

11 Or, nous savons déjà que la Renaissance acadienne décrite plus haut représente la tentative d’autodéfinition et d’adoption de symboles « nationaux » la plus précoce au Canada francophone, en dehors du Québec. J’ai donc voulu vérifier si ce développement hâtif d’une identité collective pourrait être l’une des sources de cette propension acadienne au communautarisme.

12 Pour le confirmer, j’ai d’abord examiné attentivement l’évolution des représentations qu’on se faisait de l’Amérique du Nord britannique afin de voir si l’environnement identitaire et culturel canadien a subi des modifications importantes à un certain moment entre la « Renaissance acadienne », d’une part, et les épisodes d’affirmation collective des autres francophonies, d’autre part. Or, l’historiographie établit clairement qu’à partir de 1885 un changement substantiel s’opère bel et bien dans les représentations du Canada entretenues par les majorités anglophones : vu d’abord comme un espace réunissant plusieurs communautés ou « nationalities », uni avant tout par la couronne et les institutions britanniques, le jeune dominion sera de plus en plus présenté comme un pays où les mœurs, la culture et la langue dominantes doivent être anglaises 11 .

13 Puis, je procède à une analyse comparée des discours de la «  Convention nationale » acadienne de 1881 et du Congrès d’éducation des Canadiens français de l’Ontario de 1910. J’arrive à la conclusion que la conception communautariste de soi des Acadiens tient effectivement en bonne partie au fait que, dans son cas, le discours établissant la « communauté imaginée » a été diffusé avant l’arrivée de la première vague de nationalisme pancanadien. Il sera impossible, quelques décennies plus tard, pour les Franco-Ontariens et les francophones de l’Ouest d’afficher une loyauté analogue à une « nationalité » sub-étatique, tellement la frénésie impérialiste des années 1890 et 1900 aura changé l’environnement politique et culturel.

La réinvention du communautarisme acadien lors du « moment 68 »

14 Si la création et la diffusion réussie d’un discours communautariste n’allaient pas de soi pour les francophones des Maritimes, l’adhésion des masses à celui-ci tout au long du 20 e siècle n’était pas assurée non plus. Après tout, tant de choses ont changé au cours de ce siècle. Pendant l’après-guerre, en particulier, les populations occidentales ont de manière générale eu l’impression qu’un nouveau monde voyait le jour, et que les anciennes idéologies et philosophies étaient à jeter 12 . N’était-ce pas celles-ci qui avaient poussé le monde vers la dépression et la guerre? Parmi les victimes de cet élan de renouveau, on retrouve les nationalismes, majoritaires comme minoritaires, qui ont été stigmatisés comme étant traditionnalistes, conservateurs et figés.

15 L’Acadie a elle aussi vécu cette «  fatigue culturelle  », pour reprendre l’expression de Hubert Aquin. Au cours des années 1950 et 1960, le nationalisme a été délaissé par les masses, remis en question par l’élite et carrément contesté par les étudiants de la jeune Université de Moncton 13 . Les mots d’ordre du moment étaient «  modernisation  » des institutions, «  participation  » aux affaires publiques et «  collaboration  » avec la majorité anglophone. On pourrait ajouter « départicularisation », car plusieurs ont flirté avec des labels identitaires alternatifs – tels que « francophones » – qui étaient prétendument plus ouverts sur le monde. Ils ont aussi sérieusement entretenu l’idée d’une éventuelle union des Provinces maritimes, et la jeunesse acadienne, lors d’un important ralliement à Memramcook, a voulu remiser les symboles nationaux au musée. L’idée dominante du moment en matière d’identité était la suivante  : si le nationalisme, l’isolement et l’autarcie avaient été nécessaires autrefois, c’est que dans l’ancien monde – le monde d’avant 1945 – les préjugés auraient empêché les Acadiens de prendre leur juste place au pays; toutefois, dans le monde prometteur de l’après-guerre, où tout était possible, de telles précautions étaient inutiles et même néfastes. Les Acadiens seraient maintenant libres d’intégrer le monde moderne et d’y participer pleinement, sans garde-fou.

16 Loin de vivre ce changement comme un deuil, la plupart des Acadiens l’ont ressenti comme une libération. Cela était d’autant plus facile que la province était, pour la première fois de l’histoire, dirigée par un gouvernement élu sous la direction d’un Acadien, le premier ministre Louis Robichaud. Dans ces conditions, on n’était que trop heureux de se délivrer du fardeau de la lutte nationale. Suivant le sociologue Ricky Richard, j’ai appelé ce moment, et ce discours, ceux de la « participation modernisatrice 14 ». Ils auraient bien pu annoncer la fin du haut degré de communautarisme en Acadie.

17 Mais un moment historique très particulier, porteur des espoirs mais aussi de la colère de la première cohorte des baby-boomers à l’échelle occidentale, est venu changer la donne. Les progrès graduels des Acadiens sous la gouverne de Louis Robichaud – pourtant substantiels – apparurent soudain nettement insuffisants aux membres du mouvement étudiant acadien. Et surtout, une série d’irritants sociaux locaux 15 convainquirent les étudiants universitaires militants que le modèle de l’intégration indifférenciée ne mènerait pas à l’égalité tant souhaitée. Au contraire, des mesures particulières seraient nécessaires pour relever les Acadiens – non, l’Acadie! – de la domination historique qu’elle a subie et dont elle ressent encore les effets. Les «  chances égales pour tous  » ne suffisaient plus, il fallait aussi décoloniser le pays grâce à un fonds de rattrapage pour la jeune université, à des fonds de développement régional pour le hinterland acadien, à un plus grand contrôle sur le territoire, à des districts scolaires linguistiquement homogènes, entre autres choses.

18 Ce qui a été esquissé lors du «  moment 68  » acadien, c’est la trame et le vocabulaire du néonationalisme, qui seraient redéployés tout au long des années 1970 16 et dont d’importants principes persistent dans les discours politiques acadiens d’aujourd’hui. Pendant ce « moment », l’Acadie a renoué avec le communautarisme, mais non sans en changer la forme et le ton. Comme tant d’autres nations minoritaires 17 , elle a troqué un communautarisme de conservation, proche de la tradition, pour un communautarisme de contestation, ancré dans la logique de la décolonisation et des droits.

Le communautarisme acadien depuis les années 1980

19 Depuis les années 1980, le monde a à nouveau bien changé. Le néolibéralisme a battu en brèche les tendances les plus généreuses de l’État providence, le communisme a perdu l’essentiel de son éclat et la gauche progressiste s’est fractionnée entre de multiples causes, perdant une certaine unité jadis procurée par les paradigmes de la décolonisation et du marxisme.

20 Il n’est donc pas si étonnant que le communautarisme ait fléchi. Les logiques de l’individualisme et du cosmopolitisme s’infiltrent dans les pratiques et les discours. Parmi les signes de cette tendance : l’exode de plus en plus courant de jeunes bien formés vers des postes payants à l’extérieur des régions acadiennes; l’engagement de la jeunesse dans des causes sociales variées qui se soucient peu de se dire « acadiennes », et l’accent mis, dans les médias, sur les réalisations d’individus que l’on peut identifier comme acadiens, faute de trouver suffisamment de dossiers proprement acadiens.

21 Les Acadiens demeurent toutefois plus communautaristes que la plupart, comme nous l’avons établi plus tôt. Cela est partiellement grâce à une persistance des dynamiques établies lors des « années 1968 ». En effet, le discours dominant sur l’Acadie, particulièrement dans les médias, est demeuré en bonne partie ancré dans la logique des droits, du néonationalisme et de la dualité. L’Acadie à laquelle tant de gens continuent de s’identifier est conçue comme un peuple qui prend la place qui lui a longtemps été niée lorsqu’elle était dominée. Les luttes récentes en faveur du français comme langue de gestion dans la régie de santé Vitalité et en faveur du français comme langue d’affichage à Dieppe et à Moncton sont des héritières directes du néonationalisme des années 1970.

22 Ce « communautarisme des droits » a aussi été appuyé, depuis les années 1990, par la réémergence, sous de nouvelles formes, d’idées romantiques sur l’Acadie qui se retrouvaient dans le discours national acadien du 19 e siècle. L’Acadie diasporique, «  sans frontières  », généalogique, «  du cœur  » interpelle à nouveau depuis le premier « Congrès mondial acadien », tenu en 1994 18 . Ces idées, qui sont aussi véhiculées par la musique populaire et la presse populaire, sont souvent diamétralement opposées au discours plus civique tenu par la société civile acadienne. Elles contribuent néanmoins à renforcer l’identification de plusieurs personnes à la communauté.

Conclusion

23 Que conclure de ce tour d’horizon portant sur le communautarisme acadien? Si les Acadiens et Acadiennes sont plus communautaristes que la plupart des autres minoritaires en terre d’Amérique, qu’est-ce que cela veut dire?

24 D’abord, cela veut dire que Jean-Paul Hautecœur avait tort 19 : un discours cohérent, palpable et partagé sur la communauté, ce n’est pas rien. Ce n’est peut-être pas suffisant pour assurer l’épanouissement culturel, mais il s’agit d’une réalisation sine qua non allant dans ce sens, que peu de minorités sub-étatiques peuvent affirmer avoir réussie.

25 Est-ce à dire que cela est intrinsèquement bon? Non, pas plus que ce n’est éminemment mauvais. Comme plusieurs autres caractéristiques, cela a des avantages et des inconvénients. Je serais prêt à soutenir qu’un tel sentiment communautaire aide probablement les gens, tout bien considéré  , à atténuer les sentiments d’aliénation générés par notre monde hyper-individualiste. J’ai aussi souvent l’impression que les manifestations de solidarité à l’intérieur de la communauté peuvent en être facilitées; les Acadiens savent se mobiliser quand ça compte. Il est probable, par ailleurs, que l’assimilation linguistique – qui demeure un défi – soit ralentie par le communautarisme acadien. Dans la mesure où l’appartenance à la communauté importe beaucoup aux gens, et que la langue partagée définit largement celle-ci, cette appartenance définie linguistiquement agit comme frein à l’adoption de l’anglais jusque dans les sphères intimes de la vie. Elle se traduit aussi par un soutien important aux artistes locaux. Tous ces avantages sont appréciables.

26 En même temps, le communautarisme comporte des risques et des coûts. Tout ce temps passé à parler d’identité et à protéger la culture n’est pas consacré à relever les nombreux autres défis de l’ère contemporaine. La valorisation de la culture verse parfois dans le nombrilisme culturel et linguistique, voire dans la méfiance des produits culturels venus d’ailleurs, même ceux de langue française. Par ailleurs, la solidarité intra-groupe entrave-t-elle parfois des projets qui pourraient et devraient être menés en commun avec les voisins anglophones?

27 En somme, ce communautarisme entretenu contre vents et marées vaudra la peine s’il sert à mener de véritables projets de sociétés. Reste aux Acadiennes et Acadiens d’aujourd’hui d’avoir l’imagination, l’intelligence et l’ambition nécessaires pour ce faire.

1 Benedict Anderson, avec son Imagined Communities: Reflections on the Origin and Spread of Nationalism (Londres, Verso, 2006, 256 p.), a écrit l’ouvrage de référence sur la perspective constructiviste en études du nationalisme, que nous adoptons ici.
2 Il existe malheureusement peu d’études comparatives systématiques sur le sujet. Toutefois, les comparaisons ponctuelles au sein d’articles plus généraux abondent dans de nombreuses disciplines et de nombreux genres : André Magord, The Quest for Autonomy in Acadia, Bruxelles, Peter Lang, 2008, 183 p.; Rodrigue Landry, «  Légitimité et devenir en situation linguistique minoritaire », Minorités linguistiques et société/Linguistic Minorities and Society, n o 5 (2015), p. 58-99; Joel Belliveau, « Acadian New Brunswick’s Ambivalent Leap into the Canadian Liberal Order », dans Magda Fahrni et Robert Rutherdale (dir.), Creating Postwar Canada: Community, Diversity, and Dissent, 1945-1975, Vancouver, UBC Press, 2008, p. 88-128; Marie-France Garcia Raoul-Jourde, « Assimilation and Resistance: The Acadian Experience », Revista Española de Estudios Canadienses, vol. 3, n o 1 (1996), p. 203-214; Annette Boudreau, « La construction des représentations linguistiques  : le cas de l’Acadie  », Canadian Journal of Linguistics/Revue canadienne de linguistique, vol. 54, n o 3 (novembre 2009), p. 439-459; Henri-Dominique Paratte, Jura, Acadie  : deux communautés francophones et leur évolution, Delémont, Rassemblement jurassien/Comité permanent des communautés ethniques de langue française, 1980, 44 p.; Rémi Léger, « Canada’s French Fact – or Facts? », dans Trevor Harrison et Slobodan Drakulic (dir.), Against Orthodoxy: Studies in Nationalism, Vancouver, UBC Press, 2011, p. 133-153; Nicole Gallant, «  Les communautés francophones en milieu minoritaire et les immigrants  : entre ouverture et inclusion », Revue du Nouvel-Ontario, no 35-36 (2010-2011), p. 69-105.
3 Je parle ici bien sûr de la situation en général et des résultats en moyenne, c’est-à-dire des tendances lourdes. Je tiens à souligner qu’il existe certes des centaines d’individus et des dizaines d’organisations qui sont très engagés envers la communauté franco-ontarienne à Sudbury et dans le Nord ontarien. Le communautarisme y existe donc aussi. Il est simplement moins généralisé.
4 Concept de Fernand Dumont, « élite définitrice » renvoie à un groupe qui a une grande influence dans le domaine du symbolique, influence qui découle du fait que le groupe élabore une certaine définition de la situation de la collectivité qu’il prétend représenter, et qu’il a des moyens pour diffuser cette vision. C’est lui qui entame le travail – toujours en langage dumontien – de la construction d’une référence nationale. Il ne constitue pas pour autant nécessairement une classe dominante puisque le plus gros du pouvoir économique peut lui échapper. Voir Fernand Dumont, Genèse de la société québécoise, Montréal, Boréal, 1993, p. 16-17, 147-148, 326.
5 Fondés en 1864 et en 1867 respectivement.
6 Y compris un drapeau, une sainte patronne, une fête nationale, un hymne national, etc. Une troisième convention aura lieu à Pointe-de-l’Église (N.-É.) en 1890, puis sept autres avant la Deuxième Guerre mondiale. Voir Denis Bourque et Chantal Richard, Les Conventions nationales acadiennes, tome I : (1881-1890), Moncton, Institut d’études acadiennes, 2013, p. 372.
7 Joseph Yvon Thériault et Raymond Mailhot avant lui ont bien montré que ces gens auraient très bien pu s’identifier avant tout comme «  catholiques  » de l’Est ou se fondre dans la culture « maritimienne ». Joseph Yvon Thériault, L’identité à l’épreuve de la modernité : écrits politiques sur l’Acadie et les francophonies canadiennes minoritaires, Moncton, Éditions d’Acadie, 1995, p. 227; Raymond Mailhot, « Quelques éléments d’histoire économique de la prise de conscience acadienne, 1850-1891 », Les Cahiers de la Société historique acadienne, vol. 7, no 2 (1976), p. 73.
8 Surtout au Nouveau-Brunswick. Voir Cécyle Trépanier, « Le mythe de “l’Acadie des Maritimes” », Géographie et cultures, vol. 17 (1996), p. 55-74.
9 Nous y reviendrons. Pour une synthèse récente, voir Michelle Landry, L’Acadie politique  : histoire sociopolitique de l’Acadie du Nouveau-Brunswick, Québec, Presses de l’Université Laval, 2015, 170 p.
10 Joel Belliveau, « Nationalismes périphériques, ethno-nationalisme canadien et chronologie : aux origines du communautarisme acadien  », Bulletin d’histoire politique, vol. 26, n o 1 (automne 2017), p. 170-204.
11 En effet, à partir de la fin des années 1880 – donc très peu de temps après les premières conventions acadiennes –, une véritable vague de fond balaie la fédération canadienne, une nébuleuse idéologique aux factions diverses, qui provoque l’adoption, au « Canada anglais », d’un nationalisme culturel affirmé déguisé en sentiment pro-impérial. À ce sujet, voir notamment James Rodger Miller, « Unity-Diversity: The Canadian Experience, from Confederation to the First World War », dans R. Douglas Francis et Donald B. Smith (dir.), Readings in Canadian History: Post-Confederation, 4 e éd., Toronto, Harcourt-Brace, 1994, p. 68-78; Carl Berger, The Sense of Power: Studies in the Ideas of Canadian Imperialism, 1867-1914, Toronto, University of Toronto Press, 1970, p. 4-5, 128-152; Paula Hastings, « “Our Glorious Anglo-Saxon Race Shall Ever Fill Earth’s Highest Place”: The Anglo-Saxon and the Construction of Identity in Late-Nineteenth-Century Canada », dans Phillip Buckner et R. Douglas Francis (dir.), Canada and the British World: Culture, Migration, and Identity, Vancouver, UBC Press, 2006, p. 92, et Arthur I. Silver, «  Quelques considérations sur les rapports du Canada français avec l’impérialisme britannique au XIX e siècle  », Revue canadienne des études africaines/Canadian Journal of African Studies, vol. 15, n o 1 (1981), p. 55-75.
12 Voir notamment Doug Owram, Born at the Right Time: A History of the Baby-Boom Generation, Toronto, University of Toronto Press, 1996, 392 p.; Lizabeth Cohen, A Consumers’ Republic: The Politics of Mass Consumption in Postwar America, New York, Knopf, 2003, 576 p., et Henri Mendras, La Seconde Révolution française (1965-1984), Paris, Gallimard, 1994, 456 p.
13 Joel Belliveau, Le « moment 68 » et la réinvention de l’Acadie, Ottawa, Presses de l’Université d’Ottawa, 2014, chap. 1 et 2, p. 67-120.
14 Ricky Richard, « Les formes d’acadianité au Nouveau-Brunswick : action collective et production de l’identité (1960-93) » thèse de M.A., Université Laval, 1994, 123 p. Voir aussi Joseph Yvon Thériault, « Le moment Robichaud et la politique en Acadie », dans L’ère Louis J. Robichaud, 1960-1970 : actes du colloque, Moncton, Institut canadien de recherche sur le développement régional, 2001, p. 39-54.
15 Notons les propos et les gestes agressifs de la part du maire de Moncton concernant l’accueil réservé à la Société nationale des Acadiens par le président de Gaulle, une hausse annoncée des droits de scolarité à l’Université de Moncton et les conclusions troublantes du premier rapport de la Commission Laurendeau-Dunton, publié en novembre 1967.
16 Notamment par la nouvelle Association des enseignants francophones du Nouveau-Brunswick, l’Association des francophones du Nord-Est (1969), le Conseil régional d’aménagement du Nord et le Conseil régional d’aménagement du Sud-Est, la SNA après 1971, la nouvelle SANB (1973), le Parti acadien (1972), la revue L’Acayen, des productions du nouveau bureau régional de l’Office national du film, etc.
17 La bretonne, la catalane, la basque, l’écossaise et la québécoise, pour ne nommer que celles-là.
18 Voir à ce sujet Julien Massicotte, « L’Acadie du progrès et du désenchantement, 1960-1994 », thèse de Ph.D., Université Laval, 2011, ch. 4 : « Le pays intérieur », p. 253-307.
19 Jean-Paul Hautecœur, L’Acadie du discours  : pour une sociologie de la culture acadienne, Québec, Presses de l’Université Laval, 1975, 351 p.